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Traduit de l’anglais par Eva Quéméré

En 2023, Nicola Düll (Economix, Munich) a réalisé avec une équipe (Tim Vetter et Inga Pavlovaite) et des experts nationaux, une   « thematic review » intitulée « Fair Transition Towards Climate Neutrality » pour la Commission européenne. Metis en a traduit le chapitre IV « The rôle of social dialogue for a green transition » qui évalue le rôle des différents niveaux de dialogue social s’étant emparés du sujet. En fait c’est surtout aux niveaux intermédiaires, régional et sectoriel, que des initiatives se développent.

1) Déroulement de l’étude

Cette section du rapport Fair Transition Towards Climate Neutrality réalisé pour la Commission Européenne examine des exemples d’accords et de pratiques de dialogue social dans le contexte de la transition écologique. Les partenaires sociaux comprennent les employeurs individuels, les organisations d’employeurs, les syndicats et les représentants des salariés au niveau de l’entreprise. Le dialogue social existe principalement sous forme de processus tripartite (impliquant les partenaires sociaux et les institutions gouvernementales) ou de processus bipartite (employeur ou organisations d’employeurs et syndicats et/ou représentants des employés sur le lieu de travail). Les thématiques  peuvent varier et englober le partage d’informations, la consultation et la négociation contraignante ainsi que la négociation collective aux niveaux supranational, national, régional, sectoriel et de l’entreprise.

Il existe d’importantes différences de densité syndicale entre les États membres. Elle varie également selon le type de secteur concerné par le verdissement. Souvent, la représentation syndicale dans les secteurs et entreprises émergents est plus faible que dans les secteurs traditionnels. Le pouvoir des partenaires sociaux varie d’un secteur à l’autre. Le cadre institutionnel et juridique de régulation des marchés du travail (par exemple, la pratique de prolonger légalement les résultats des accords collectifs) a un impact important sur les relations de pouvoir et le format dans lequel le dialogue social a lieu. Cette section résume les actions des partenaires sociaux pour anticiper les changements ou les processus de restructuration liés à la transition écologique, tels que la mise hors service d’activités et d’installations très émettrices de carbone, les efforts de décarbonisation des activités économiques et la réduction de la pollution (par exemple, de l’air, de l’eau, du sol) provenant des processus industriels, ou l’adoption de technologies à faibles émissions et de modèles commerciaux durables.

Ce sont surtout des approches régionales et sectorielles qui ont été identifiées, tandis que les approches nationales sont moins fréquentes. Quelques pratiques et accords ont été identifiés au niveau de l’entreprise. Les accords et les pratiques sont examinés par rapport aux critères définis dans le cadre de qualité de l’UE pour l’anticipation des changements et la restructuration[1], évaluant les critères mis en œuvre dans les exemples examinés et leurs caractéristiques et résultats. Les experts nationaux impliqués dans le programme ont identifié des exemples de dialogue social au niveau de l’entreprise, du secteur, de la communauté ou de la région par le biais de recherches documentaires et d’entretiens avec des entreprises, des organisations syndicales sectorielles et des autorités régionales. La principale méthode, dans 24 des 27 pays, a été de mener des entretiens avec les partenaires sociaux et quelques entreprises, car de nombreuses initiatives sont plutôt récentes et ne sont pas bien documentées dans des sources accessibles au public.  29 entretiens ont été menés avec des syndicats et 12 avec des organisations d’employeurs, ainsi que 4 entretiens avec des chambres de commerce et des organisations sectorielles (parmi 15 interviewés parmi diverses parties prenantes, y compris des institutions de recherche, des ministères et des institutions de formation). Des accords et des pratiques individuels ont été identifiés grâce à ces entretiens et recherches documentaires, davantage dans certains pays que dans d’autres. Cela est lié au type de pratiques de dialogue social dans les pays et à la visibilité des éléments liés à la transition écologique. Les accords collectifs et les pratiques mises en avant donnent un aperçu de la manière dont l’impact de la transition verte peut être abordé. Cependant, ils ne représentent pas un inventaire complet de tous les accords et pratiques.

1) Positions des syndicats et des employeurs sur une transition écologique équitable et les questions de négociation collective

La position des partenaires sociaux sur une transition verte équitable varie également en fonction du niveau d’implication, avec des points de vue divergents qui peuvent émerger au niveau national, régional et local. Dans certains cas, les syndicats peuvent soutenir la transition verte au niveau supérieur mais résister à la transformation au niveau sectoriel et de l’entreprise (sortie du charbon). Au niveau sectoriel et de l’entreprise, les compensations et les régimes de retraite anticipée sont au centre des préoccupations face aux cas de licenciements (massifs). Dans certains États membres et secteurs, les syndicats considèrent le développement des compétences comme essentiel pour anticiper et gérer la restructuration. Les organisations d’employeurs peuvent également intégrer des objectifs de transition verte dans leurs conception générale (voir par exemple en Estonie). Les intérêts des employeurs poursuivis dans le dialogue social sont parfois motivés par des pénuries de main-d’œuvre, considérées comme un défi pour le « verdissement » des processus de production, ainsi que par les coûts de la restructuration.

Il existe souvent un intérêt commun pour le développement des compétences afin d’atténuer les pertes d’emploi et de soutenir la transition verte. Il s’agit déjà d’une pratique bien établie pour la gestion des restructurations. Par exemple, en Suède, les Accords de sécurité de l’emploi / de transition sont des exemples d’approches négociées de flexisécurité mettant fortement l’accent sur les mesures de qualification. Cependant, les transitions internes et externes d’emploi peuvent être entravées par d’autres facteurs, tels que les différences salariales. Par conséquent, quelques syndicats ont proposé la création d’un fonds spécifique pour compenser la perte de revenus (voir IG Metall en Allemagne et en Slovaquie). La coopération avec d’autres partenaires devient nécessaire dans le domaine du développement des compétences et du développement économique local.

Outre les pertes d’emplois et les compensations, les discussions autour de l’équité concernent l’augmentation des prix de l’énergie et l’impact social sur les ménages. Ces arguments sont liés à la rapidité de la transition énergétique et à l’argument sur le manque de stratégies globales.

3) Le dialogue social « vert » est peu développé au niveau national

Dans les États membres où existent des conseils tripartites, il existe un dialogue social limité autour des questions liées à une transition verte équitable, et aucune résolution concrète ou contraignante n’a été adoptée (comme indiqué dans certains articles nationaux, par exemple, en Belgique, à Chypre, en Croatie, en Lettonie, à Malte et au Portugal). Dans certains États membres, des conseils spécifiques pour la transition verte ont été créés plus récemment et impliquent les partenaires sociaux dans différents conseils et comités concernés par le développement durable et la transition écologique[2]. Cependant, ces conseils n’ont pas encore abordé ou n’ont touché que partiellement aux sujets relatifs à une transition verte équitable. Dans quelques États membres, des conseils ont été créés ciblant et impliquant un large public de la société civile, et peuvent inclure les partenaires sociaux (par exemple, le Conseil climatique en Autriche) ou non (par exemple, le Conseil climatique au Danemark, le Dialogue national sur l’action climatique en Irlande).

Quelques exemples existent où des stratégies spécifiques pour la transition verte ont été présentées et discutées au sein de conseils tripartites bien établis (par exemple, la Stratégie de développement durable pour 2050 de Malte ; en Roumanie, la Stratégie nationale pour l’emploi vert 2018-2025). De même, au Danemark, plusieurs conseils et comités bi- et tripartites participent à la conception et au développement de la formation professionnelle, y compris la formation tout au long de la vie. Ils impliquent généralement des représentants des partenaires sociaux et abordent des questions de qualification liées à la transition verte. Il en va de même pour d’autres États membres où les partenaires sociaux sont impliqués dans l’orientation de l’éducation et de la formation professionnelles (par exemple, en Allemagne). En France, où les négociations tripartites sont bien développées et où l’extension des accords collectifs par la législation joue un rôle important, un exemple de dialogue social national pour une transition verte équitable a été identifié (voir encadré 1).

Encadré 1. Négociation tripartite sur les questions de transition écologique équitable en France

Au moment de la rédaction (début 2023), deux cycles de négociations nationales sur les questions environnementales étaient en cours en France. L’un portait sur le plan national de décarbonisation et l’autre sur le secteur présentant des émissions élevées de gaz à effet de serre. Du point de vue des syndicats, l’objectif principal était d’introduire des éléments liés aux conditions de travail et à la qualité de l’emploi et de les rendre obligatoires par un accord national interprofessionnel (ANI) pouvant être transformé en loi.

Source : Article national – France

De même : le dialogue social existe également autour de l’élaboration et de la coordination des plans et programmes d’accès aux Fonds européens. Des exemples incluent le développement des Plans territoriaux de transition juste (PTTJ) en Bulgarie et le travail sur le Plan de développement national pour la période 2021-2027 en Lettonie, dans le cadre du financement du FSE (Fond Social Européen) et du FEDER (Fond Européen de Développement Régional).

Dans certains États membres, les partenaires sociaux (en particulier les syndicats) estiment ne pas être suffisamment informés et impliqués dans la consultation tripartite (comme mentionné dans les entretiens réalisés pour cette étude en Autriche, en Belgique, en Finlande, en Croatie et en Roumanie).

Il existe peu d’exemples de négociations collectives bipartites avec des accords pertinents pour une transition verte équitable. En Suède, de tels accords nationaux ont été récemment conclus, mettant l’accent sur le développement des compétences dans un contexte de transition économique, qui inclurait la transition verte (voir encadré 2).

Encadré 2. Accords nationaux sur le « soutien à l’éducation pour une transition équitable » en Suède

Deux accords nationaux ont été signés le 22 juin 2022 entre la confédération suédoise de syndicats d’ouvriers (Landorganisation, LO-SE), le Conseil de négociation PTK pour les travailleurs intellectuels et la Confédération des employeurs suédois (Svenskt Näringslivet). Ces accords sur le « soutien à l’éducation pour une transition équitable » donnent aux travailleurs, qu’ils soient employés ou entre deux emplois, le droit à un soutien financier pour des formations plus ou moins longues afin de développer leurs compétences. Il peut être accordé aux personnes âgés de 27 à 62 ans ayant travaillé au moins 8 ans sur une période de référence de 14 ans (condition d’éligibilité). Les travailleurs indépendants peuvent également demander la nouvelle bourse d’études de transition.

Ces deux accords faciliteront les transitions d’emploi à emploi, amélioreront les compétences et la sécurité de l’emploi des travailleurs déjà en poste, favoriseront l’apprentissage tout au long de la vie et garantiront que la transition verte impliquera le développement de « bons emplois verts ». Les organisations à but non lucratif gérées par les partenaires sociaux, les fondations de sécurité d’emploi (« Trygghetsstiftelser »), assisteront les employés couverts par les accords collectifs avec des formations, des reconversions et des montées en compétences. Selon les accords collectifs, la compensation financière sera plus élevée pour les employés travaillant dans une entreprise couverte par les accords collectifs, par rapport aux employés non couverts par ceux-ci mais éligibles au soutien financier pour l’éducation de transition (« Omställningstudiestöd »).

Source : Article national Suède

 4) Dialogue social et partenariats au niveau régional : plus proches du terrain

Dans certains cas, le dialogue social au niveau régional est institutionnalisé dans la structure de gouvernance. Par exemple, en Belgique, il s’agit du Conseil Économique Central (CCE/CRB) au niveau fédéral, et du Conseil Économique, Social et Environnemental de Wallonie (CESE), de Brupartners dans la Région de Bruxelles-Capitale et du Conseil socio-économique de Flandre (SERV). Le dialogue social, impliquant les partenaires sociaux et d’autres acteurs clés tels que les autorités régionales et les institutions éducatives, a également été créé dans les régions particulièrement touchées par la réduction et la fermeture d’usines de production liées à la transition verte. Ainsi, les approches de dialogue social et de partenariat au niveau régional et sectoriel peuvent se chevaucher. Des approches prometteuses et des bonnes pratiques de dialogue social, impliquant également d’autres acteurs pertinents, sont illustrées ci-dessous (ces informations proviennent d’articles de presse nationale) :

  • En République tchèque, à partir de 2018, les partenaires sociaux de la région de Moravie-Silésie sont impliqués dans des projets régionaux et européens visant à mettre en œuvre un écosystème pour identifier les besoins futurs du secteur (projet ESSA de l’Alliance européenne des compétences) ou pour la reconversion actuellement nécessaire (projet TRAUTOM). Le dialogue à un niveau régional plus large contribue à résoudre les intérêts contradictoires dans le secteur, avec la pression d’une partie de l’industrie (constructeurs automobiles) en faveur d’importations bon marché d’acier et les efforts des producteurs d’acier pour maintenir les tarifs douaniers sur l’acier.
  • En Estonie, la plateforme de transition verte dans la région d’Ida-Virumaa a été créée en 2020. 47 membres sont répertoriés parmi d’autres entreprises impliquées dans l’industrie du schiste bitumineux et de la production d’énergie, des organisations patronales sectorielles et des organisations syndicales. Le comité de pilotage se concentre principalement sur la surveillance du processus de transition verte au niveau régional et formule des propositions pour ajuster le processus si nécessaire. Le comité est également une plateforme pour impliquer un groupe plus large d’acteurs dans l’anticipation des besoins de transition, la mise en œuvre d’un plan de transition verte et le soutien aux transitions en douceur pour les employés et les communautés locales. En conséquence, la plateforme propose des actions au comité de pilotage de la transition verte en Estonie.
  • En Allemagne, le Conseil de transformation (« Transformationsrat ») a été créé en 2019. Il implique les partenaires sociaux, l’État fédéral de Rhénanie-Palatinat, les Chambres des métiers, les Chambres de commerce et d’industrie, et l’Agence fédérale pour l’emploi. Cet organe discute des mesures nécessaires pour maintenir et développer la création de valeur industrielle, qualifier et former les employés. En septembre 2020, ce Conseil a décidé d’un premier ensemble de mesures axées sur l’emploi, la qualification et la formation continue ; la formation professionnelle ; la recherche et le financement de l’investissement, les énergies renouvelables et la stratégie de l’hydrogène. Les différentes parties prenantes se sont engagées à mettre en œuvre des mesures concrètes dans ces domaines.
  • En Irlande, en 2018, l’équipe de transition régionale des Midlands (MRTT) et le commissaire à la transition juste ont été créés dans le contexte de la fin de l’extraction de tourbe et de la production d’énergie à base de tourbe dans la région. Les parties prenantes comprennent les partenaires sociaux, les organismes éducatifs et les agences régionales et locales. La mission du MRTT est de rechercher des opportunités de financement et des actions pour atténuer l’impact des pertes d’emplois dans l’industrie de la tourbe sur l’économie locale et régionale, et de positionner la région pour développer des formes alternatives d’emploi, attirer de nouveaux investissements et maximiser les opportunités et ressources d’emploi existantes (AARC, 2021). Un nombre significatif de travailleurs concernés ont été formés ou réaffectés et des financements sont déployés pour générer de nouvelles entreprises, notamment dans des activités économiques durables.
  • En Italie, un partenariat a été établi en 2020 entre la raffinerie Saras sur le site industriel de Sarroch en Sardaigne, Enel Green Power, la municipalité de Cagliari, l’Université de Trente et l’organisation patronale Confindustria Sardegna Meridionale. L’objectif était d’anticiper le changement et de gérer la restructuration de la raffinerie en lien avec la transition verte. Particulièrement grâce à la participation de Confindustria Sardegna Meridionale, ces acteurs travaillent à établir un dialogue avec les institutions nationales pour proposer des propositions au Plan territorial de récupération et de résilience du JTF. Grâce à des tables rondes thématiques, des analyses de scénarios et des recherches sur le terrain, les parties prenantes ont identifié plusieurs domaines d’intervention à privilégier : mobilité durable, compétences professionnelles, santé et sécurité, économie circulaire, durabilité environnementale, création de partenariats et inclusion.
  • En Bulgarie, les partenaires sociaux estiment ne pas être suffisamment impliqués et expriment leurs préoccupations dans le processus d’établissement des Plans territoriaux de transition juste (PTTJ). Selon le PTTJ proposé pour Stara Zagora, le plan a été élaboré grâce aux efforts conjoints des autorités institutionnelles nationales et régionales et d’un éventail d’acteurs, en menant des consultations publiques. Cela incluait l’Agence de développement économique régional de Stara Zagora, les municipalités de la région et des ONG.

De plus, quelques partenariats locaux, comprenant des partenaires sociaux et un éventail plus large d’acteurs locaux, ont été établis au niveau des municipalités. Dans certains secteurs, un dialogue territorial a lieu, mais ne conduit pas à des accords collectifs. En Espagne, un dialogue territorial entre les communautés d’énergie renouvelable (CER) et le secteur économique agroalimentaire est en cours depuis 2019. Cet exemple diffère des pratiques menées par les partenaires sociaux traditionnels, car il implique jusqu’à présent un dialogue dans les territoires entre de petites entreprises énergétiques, des représentants de l’agriculture et de l’élevage, et des municipalités locales, y compris la société civile dans certains cas. Cependant, il n’existe aucune preuve d’accords de travail.

Il existe également des exemples identifiés dans les articles nationaux où une structure de dialogue social a été mise en place mais n’a pas réussi à convenir et à mettre en œuvre des activités concrètes ou a démontré des effets limités (par exemple en Roumanie et dans une région minière de Slovaquie).

5) Dialogue social sectoriel : des initiatives importantes

Le dialogue social sectoriel et les partenariats sectoriels sont concentrés dans les secteurs où les syndicats sont traditionnellement forts et où une culture de dialogue social existe depuis un certain temps, comme dans l’industrie du charbon. Même dans les pays ayant une structure de dialogue social relativement faible, le dialogue social a été établi autour de l’exploitation minière du charbon (sauf en Roumanie, où le dialogue social est trop faible pour générer un accord).

Tab.1. Secteurs où il y a un dialogue social sur la transition verte équitable dans les différents pays européens

Pour une transition verte équitable, tout comme pour toute autre restructuration économique majeure, au-delà des objectifs d’emploi et sociaux, l’anticipation et la restructuration bien gérées sont des conditions préalables au succès économique et à de meilleures conditions de travail. Le Cadre de Qualité de l’UE pour anticiper le changement et la restructuration énonce plusieurs domaines d’activités et principes qui constitueraient une bonne pratique. Anticiper les besoins en capital humain et gérer les restructurations concernent une multitude d’acteurs (entreprises, représentants des travailleurs, partenaires sociaux, services publics de l’emploi, administration publique et autorités, etc.) à différents niveaux (européen, national, régional, sectoriel et organisationnel). La cohérence et les synergies entre les actions de tous les intervenants, ainsi qu’une planification et des actions correctement coordonnées pour l’anticipation et la restructuration, sont cruciales pour assurer l’efficacité et des solutions durables.

Le dialogue social sectoriel sur une transition verte équitable, dans la plupart des cas, remplit au moins partiellement le cadre de qualité de l’UE pour anticiper et gérer le changement structurel. Cependant, le dialogue social sectoriel sur les questions de transition verte n’existe pas dans tous les États membres, et les exemples actuels ne couvrent que quelques secteurs. Quelques exemples sont présentés ci-dessous pour inspirer de bonnes pratiques. La plupart des initiatives de dialogue social sont très récentes, et il est trop tôt pour évaluer leur impact. En particulier, le schéma 1 présente un aperçu de six exemples de dialogue social sectoriel, impliquant principalement des partenaires sociaux et, dans certains cas, des partenaires supplémentaires (tels que les services publics de l’emploi, les municipalités et les autorités régionales), répondant à plusieurs critères du cadre de qualité pour le dialogue social dans le contexte de l’anticipation du changement structurel. Le schéma 2 sur la gestion des restructurations montre que dans 5 des 6 cas, un consensus interne a été favorisé par le biais d’un diagnostic conjoint. Cependant, dans seulement la moitié des cas, toutes les options possibles avant d’envisager des licenciements ont été explorées, et un soutien individuel et personnalisé pour les travailleurs licenciés a été organisé.

Schéma 1. Anticipation du changement au niveau sectoriel (conformément au cadre de qualité de l’UE) dans six cas

Note : Les six exemples comprennent le dialogue social en Allemagne (industrie chimique), en Espagne (exploitation minière du charbon), en Pologne (exploitation minière du charbon), en Italie (énergie et pétrole), en Italie (électricité) et en Lituanie (électricité). Les informations ont été compilées dans les articles nationaux et les évaluations ont été réalisées sur la base des connaissances des experts du pays.

Schéma 2. Gestion des restructurations au niveau sectoriel (conformément au cadre de qualité de l’UE) dans six cas

Note : Les six exemples comprennent le dialogue social en Allemagne (industrie chimique), en Espagne (exploitation minière du charbon), en Pologne (exploitation minière du charbon), en Italie (énergie et pétrole), en Italie (électricité) et en Lituanie (électricité). Les informations ont été compilées dans les articles nationaux de la CEE et les évaluations ont été réalisées sur la base des connaissances des experts du pays. 

Quelques exemples supplémentaires de différents secteurs sont présentés plus en détail ci-dessous. Les initiatives de dialogue social se concentrent sur le développement des compétences, les packages de compensation et, dans certains cas, sur l’exploitation d’autres opportunités d’emploi et le potentiel des « emplois verts ».

Encadré 3. Exemples de dialogue social sectoriel et de partenariats dans l’industrie automobile

L’Automotive Skills Alliance, liée au Pacte pour les compétences, réunit les parties prenantes impliquées dans l’écosystème automobile pour assurer une coopération continue, pragmatique et durable autour de l’agenda des compétences dans l’écosystème, collaborant au niveau européen, national et régional. De telles alliances de compétences sont en cours de développement dans certains États membres, largement encouragées par le Pacte pour les compétences. Il s’agit d’une initiative très récente en République tchèque, par exemple, avec un fort accent régional.

En Allemagne, les partenaires sociaux font partie de la « plateforme stratégique sur la transformation de l’industrie automobile », créée par le ministère de l’Économie et de la Protection du climat en juin 2022. Des dialogues régionaux ont eu lieu, entre autres, sur le thème de la formation continue et de la qualification. Il a été convenu que les entreprises devraient identifier les besoins en nouvelles compétences pour adapter la formation professionnelle ou introduire de nouveaux profils de formation professionnelle, et pour identifier les besoins en formation continue et en compétences transférables pour la mobilité professionnelle et sectorielle. Les instruments financiers de la Stratégie nationale des compétences (« Nationale Weiterbildungsstrategie ») peuvent être utilisés.

Source : Articles nationaux de l’UE

Encadré 4. Exemples de dialogue social sectoriel et de partenariats dans l’industrie chimique

En Allemagne, l’Alliance Chemie3 a été créée en 2013 par les partenaires sociaux de l’industrie chimique. Les objectifs et le cadre d’action comprennent 12 points, avec notamment : la garantie du travail de qualité et du partenariat social ; la protection de l’environnement et de la biodiversité ; des processus opérationnels durables, l’efficacité énergétique et le soutien à la protection du climat. Les activités poursuivies par l’initiative comprennent une série de webinaires sur la durabilité, des échanges de pratiques et d’experts, le développement de guides pour les PME et un contrôle de durabilité. Cela aide les entreprises visant à accroître leur durabilité à identifier les domaines où des améliorations sont les plus nécessaires. L’initiative produit également un rapport de durabilité, recueillant des données sur 40 indicateurs de progrès en matière de durabilité, et diverses enquêtes sont menées sur l’emploi et les compétences par chacun des partenaires sociaux. Les facteurs de succès comprennent l’engagement commun à partager les connaissances et les idées pour progresser vers l’objectif de durabilité commun.

Également en Allemagne, les partenaires sociaux du secteur et l’Agence fédérale pour l’emploi ont signé l’Offensive Qualification Chimie en 2021. Les résultats essentiels de l’offensive de qualification sont le Future Skills Report Chemistry publié en 2021 et l’outil informatique Pythia pour déterminer les besoins en formation continue et fournir des conseils de qualification complets, produit par l’Agence fédérale pour l’emploi, entre autres. Les projets communs comprennent un modèle de qualification pour les employés non qualifiés, des qualifications professionnelles et une formation continue pour les employés devenant des pilotes de transformation pour façonner le changement technologique de l’intérieur de l’entreprise. D’autres activités comprennent des modèles de transfert ‘du travail à l’emploi’ où le personnel excédentaire d’une entreprise est transféré vers d’autres entreprises ayant besoin de personnel, ainsi que l’organisation de forums de dialogue communs.

Source : Article allemand

Encadré 5. Exemples de dialogue social sectoriel et de partenariats dans l’industrie de la construction

En Allemagne, le syndicat du secteur de la construction IG BAU a négocié une convention collective destinée aux employés travaillant en extérieur, offrant une plus grande sécurité au travail en matière de changement climatique. Cela inclut la couverture des absences liées aux conditions météorologiques (par exemple, en cas de chaleur ou de froid). Dans l’industrie du ciment, une initiative d’IG BAU était un plan de formation professionnelle sur le thème de la nature et de la protection du climat.

Source : Article allemand

Encadré 6. Exemples de dialogue social sectoriel et de partenariats dans le secteur de la production d’énergie

En Italie, en octobre 2019, le renouvellement de l’accord interprofessionnel pour le secteur italien de l’électricité a fourni un cadre unique pour l’ensemble des travailleurs du secteur, y compris l’industrie des énergies renouvelables et les rôles commerciaux et de vente. Parmi les objectifs, l’accord comprend une disposition spéciale sur la formation pour garantir l’employabilité et le soutien pendant la transition énergétique. L’accord prévoit un droit à 28 heures de formation certifiée (en plus de la formation à la santé et à la sécurité). Un organe conjoint sectoriel est censé surveiller les initiatives de formation dans le secteur et proposer des programmes spécifiques pour soutenir les relations industrielles sur les impacts de la transition énergétique. Au moment du précédent renouvellement en janvier 2017, les parties avaient déjà convenu d’introduire diverses mesures pour relever les défis posés par la transition énergétique et soutenir les entreprises et les travailleurs du secteur confrontés à des situations critiques, en relation notamment avec les processus de réorganisation. Ces mesures comprenaient la création d’un fonds de solidarité pour compléter les mesures de soutien au revenu disponibles pour les travailleurs de l’industrie et un système de reclassement des travailleurs excédentaires entre les entreprises du secteur (Planet Labor, 2019).

Source : Article italien

6) Dialogue social au niveau de l’entreprise : faiblard !

Seul un petit nombre d’accords collectifs pertinents au niveau de l’entreprise ont été identifiés dans les États membres. Selon une enquête menée auprès des syndicats et des employés en Finlande, seulement environ 15 % des représentants syndicaux interrogés ont déclaré que les représentants des employés participent aux discussions sur les mesures visant à ralentir le changement climatique. En France, seuls deux accords collectifs abordant la transition verte ont été identifiés (Teraga et Total). Certains accords de responsabilité sociale des entreprises (RSE) ont été identifiés dans quelques grandes entreprises. Certains accords collectifs identifiés dans les articles par pays se concentrent principalement sur les indemnités de licenciement, laissant de côté les mesures de formation et de reclassement (par exemple, en Slovaquie, un accord collectif signé en 2023 à la centrale de production de chaleur TEKO à Košice et un programme incitatif de départ volontaire de l’entreprise U.S Steel à Košice)[3].

Tab 2. Exemples de dialogue social au niveau de l’entreprise pour gérer une restructuration industrielle équitable.

Source : Compilation de l’auteur sur la base d’articles des pays cités.

7) Initiatives et actions des partenaires sociaux

Les initiatives des partenaires sociaux pour anticiper et gérer une transition verte équitable comprennent principalement trois types d’activités : la recherche, la sensibilisation et la formation :

  1. Recherche réalisée par des organisations patronales et/ou des syndicats (par exemple en Autriche, en Bulgarie, en Allemagne, en Italie, en Roumanie, en Suède, en Slovénie) : ces activités aident les partenaires sociaux à préparer leurs approches pour anticiper et gérer une transition verte équitable.
  2. Activités de sensibilisation et d’information : ces activités peuvent être ciblées sur leurs propres membres ou sur un public plus large.
    1. Activités des syndicats : par exemple, en Finlande, l’organisation centrale des syndicats du travail tente d’activer ses syndicats membres pour mettre en avant l’avis des employés dans les plans de transition verte. En France, les syndicats ont établi des unités traitant de la transition verte au niveau national, mais au niveau local, les membres des syndicats y semblent moins sensibles qu’à d’autres problématiques d’emploi. Par conséquent, les syndicats français ont mis en place des programmes de sensibilisation pour leurs membres et présentent des « boîtes à outils vertes » au niveau régional et local. Le projet JusTRA de l’Institut syndical européen ETUI, cofinancé par l’Union européenne, prépare une boîte à outils commune avec des lignes directrices pour une transition équitable. Les syndicats de Belgique, de Bulgarie, de France et d’Italie y participent (rapport national français). Au Danemark, le syndicat 3f, qui représente principalement les travailleurs non qualifiés, dispose d’un site web dédié aux « emplois verts ».
    2. Les activités des organisations patronales comprennent l’organisation de concours et de prix. Par exemple, l’association patronale française MEDEF a lancé une initiative appelée French Business Climate Pledge. Elle vise à identifier les entreprises ayant réussi leur transition vers une économie à faibles émissions de carbone et l’innovation en développant des solutions, des technologies, des produits et des services à faibles émissions de carbone. Cependant, les initiatives recueillies par les entreprises incluent rarement des questions liées à l’emploi.
  3. Formations pour anticiper et gérer la transition verte. Dans certains États membres, les partenaires sociaux et les chambres gèrent leurs propres organismes de formation. Les employeurs ont intérêt à se concentrer sur le développement et l’adaptation des compétences et les syndicats peuvent poursuivre des politiques visant à améliorer l’employabilité des travailleurs. L’institut de formation WIFI des Chambres de commerce en Autriche inclue par exemple le développement de « compétences vertes » dans leurs programmes de formation. En Finlande, l’industrie chimique fait partie de l’initiative Responsible Care, un programme international vieux d’environ 30 ans qui surveille la consommation de ressources dans l’industrie. L’industrie fournit également une formation aux employés (en partie) sur les nouvelles compétences et informations liées à la transition écologique.

L’encadré 7 présente des exemples de collaboration entre les instituts de formation en vue du développement de nouveaux formats et de l’introduction de formations pertinentes pour les « compétences vertes ».

Encadré 7. La coopération entre les entreprises et les institutions de formation pour le développement des « compétences vertes » dans le secteur de la construction et l’industrie manufacturière.

Le projet BUILD UP Skills Bulgarie 203060, mené par la Chambre de la construction bulgare, vise à élargir les connaissances et les compétences des professionnels de la construction afin de construire des bâtiments à émissions nulles. Le projet dispose de 18 mois pour réaliser une cartographie nationale, préparer une analyse approfondie des conditions de travail et des besoins en compétences, et identifier les meilleures pratiques écologiques globales à promouvoir.

Au Danemark, le projet de transformation verte de l’ensemble de l’entreprise combine les efforts des organismes de formation professionnelle avec les employeurs privés. Des modules de micro-apprentissage seront développés dans un format pris en charge par les technologies de l’information pour 18 entreprises du secteur de la construction et de la fabrication. Il a été inspiré par plusieurs partenariats établis en 2022 pour l’éducation à la durabilité, y compris la formation professionnelle. Le projet se déroulera de 2023 à 2025, financé par le ministère de l’Éducation.

Il existe également des exemples d’entreprises qui coopèrent pour promouvoir les transitions d’emploi à l’intérieur de l’entreprise (mobilité interne) ou vers une autre entreprise (mobilité externe). Placer les travailleurs dans de nouveaux emplois au sein de l’entreprise ou ailleurs est un élément clé de la gestion d’une transition verte équitable. L’encadré 8 propose un exemple de coopération entre entreprises visant à faciliter les transitions d’emploi et ainsi encourager la mobilité externe des salariés.

 Encadré 8. L’Alliance des opportunités en Allemagne

En Allemagne, l’Alliance des opportunités (« Allianz der Chancen ») est un réseau de coopération regroupant plusieurs entreprises allemandes (représentant environ 46 entreprises avec 2,6 millions d’employés en janvier 2023). En initiant des projets de coopération entre secteurs et entreprises et en favorisant la formation continue, le réseau vise à accroître la capacité d’employabilité de la main-d’œuvre et à favoriser l’échange de travailleurs confrontés à des licenciements dans une entreprise mais pouvant être nécessaires dans une autre. Par exemple, Continental a créé un marché interne du travail pour replacer les travailleurs menacés de chômage en interne dans des entreprises locales. Selon l’organisation patronale allemande BDA, la coopération entre les entreprises situées dans la même région pour maintenir les travailleurs en emploi n’est pas inhabituelle à la lumière des pénuries de travailleurs qualifiés. Par exemple, dans la région du Rhin, BASF a employé des travailleurs précédemment touchés par des licenciements chez Ford.

Demandes spécifiques et recommandations politiques des partenaires sociaux :

  • La création d’une institution de Transition Juste ou d’une Agence (comme revendiqué par la Chambre du Travail autrichienne et la confédération syndicale ÖGB), ou la création d’un fonds structurel spécifique et de mécanismes de compensation financière pour les travailleurs directement touchés par la transition verte afin d’atténuer les impacts sur l’emploi (par exemple, en Allemagne, comme suggéré par le syndicat IG Metall). Le syndicat allemand IG Metall propose également l’introduction d’un régime de chômage partiel lié à la transition (« Transformationskurzarbeitergeld ») pour soutenir les travailleurs licenciés dans les industries à salaires élevés touchées par la transition verte, dans le but qu’ils acceptent des emplois moins bien rémunérés. Des revendications similaires ont été formulées par les syndicats slovènes concernant la sortie de l’exploitation minière du charbon.
  • L’introduction d’une compensation financière pour atténuer l’impact social potentiellement négatif des mesures climatiques a été suggérée par les syndicats OGBL au Luxembourg. Renforcer le soutien financier et les incitations aux entreprises et aux familles à faible revenu investissant dans des solutions d’efficacité énergétique (l’organisation patronale FEDIL et la Chambre de Commerce au Luxembourg) ont demandé un soutien public plus fort pour la transition verte.

Conclusion

Cette partie du rapport explore le rôle du dialogue social pour une transition verte équitable. Les progrès dans le dialogue social pour une transition verte sont très variables d’un Etat membre à l’autre. La consultation tripartite n’a que rarement abordé des sujets liés à la transition écologique et a rarement discuté de stratégies globales.

La négociation collective s’est concentrée sur des secteurs spécifiquement touchés par les pertes d’emploi et les changements de compétences dans le contexte de la transition écologique. Cela a principalement inclus le secteur de l’exploitation du charbon, d’autres secteurs de production d’énergie, des industries intensives en énergie telles que l’industrie sidérurgique, le secteur de la construction, le secteur chimique et l’industrie automobile. La plupart des exemples collectés se réfèrent au dialogue social sectoriel, souvent mené pour des régions spécifiques. Les partenariats régionaux, comprenant également d’autres acteurs en plus des partenaires sociaux, se sont révélés cruciaux pour anticiper et gérer une transition verte équitable, en exploitant les synergies et en combinant les ressources des différents partenaires.

Particulièrement dans les régions minières (charbon), des tentatives ont été faites pour mettre en œuvre des approches de dialogue social plus complètes, comprenant une analyse des compétences, du potentiel de développement économique des zones locales, et des formations, en plus des compensations financières et des programmes de retraite anticipée. Il semble que la création de Plans territoriaux de transition juste ait favorisé le dialogue social, en particulier dans les États membres ayant une pratique faible en la matière. Dans les États membres dotés d’une structure de dialogue social bien développée, l’accent a été mis sur les mesures de qualification et sur la gestion de la flexibilité interne et externe des travailleurs. Dans ces pays, le dialogue social et les activités propres aux partenaires sociaux se sont concentrés sur le développement des compétences pour anticiper le changement et aborder les pénuries de compétences et de main-d’œuvre en tant que moteurs importants pour les stratégies anticipatives.

Notes

[1] Communication from the Commission of 13 December 2013 on ‘EU Quality Framework for anticipation of change and restructuring’, COM(2013) 882 final.

[2] Il s’agit, par exemple, du Conseil de l’environnement en Autriche ; de l’Assemblée générale pour une transition juste mise en place en 2022 en Belgique ; du Conseil économique et environnemental établi en 2007 au Danemark ; du Comité de suivi du Programme équitable de transition pour le développement en Grèce ; du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et du Conseil national pour la transition écologique (CNTE) en France ; du Conseil national de l’énergie et du climat établi en 2019 en Lettonie ; et du Conseil national de l’environnement et du développement durable ainsi que du Conseil national de l’énergie au Portugal.

[3] Bien que la formulation visant à éviter les licenciements massifs ait déjà été incluse dans les anciens accords collectifs grâce à des avantages disponibles, un nouveau programme d’incitation au départ volontaire représente un mécanisme novateur régulant les licenciements massifs découlant des changements structurels survenant dans l’entreprise. L’accord stipule que, si des licenciements sont nécessaires, l’employé devrait avoir la possibilité de résilier volontairement le contrat d’un commun accord avec l’employeur et le syndicat en échange d’une indemnité de départ accrue.

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Économiste du travail, Associée Economix Research & Consulting, Munich