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Quand on pense « microcrédit », on pense d’abord à des prêts à des entrepreneurs (ou plutôt entrepreneuses car ce sont le plus souvent des femmes) ou à des artisans pour leur permettre de développer une activité qui va en quelque sorte devenir leur propre emploi : par exemple en achetant du matériel, ou bien les matières premières dont ils ont besoin. Le microcrédit personnel, lui, se trouve entre le microcrédit classique (modèle Yunus) et le simple don ou « coup de main », pour aider quelqu’un à s’en sortir. Irene Valdelomar Zurera explique pour Metis comment Le Secours Catholique l’utilise :

 

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Qu’est-ce que le microcrédit ?

Outil permettant l’accès au financement dans des circonstances « délicates », le microcrédit personnel est destiné à tous ceux qui n’ont pas accès au financement classique du fait d’une situation économique ou sociale précaire. Il permet donc d’emprunter même si on est au RSA, au chômage, voire interdit bancaire sous certaines conditions (par exemple : l’emprunteur doit être en phase de remboursement de son plan d’apurement depuis au moins 8 à 12 mois).

 

Ainsi, selon le site officiel de France Microcrédit : c’est un prêt « sur mesure » adapté à la situation budgétaire d’un particulier. Le montant est compris entre 300 euros et 3000 euros remboursables sur 36 mois à taux d’intérêt fixe. Les mensualités constantes ne peuvent pas dépasser 100 euros par mois. Aujourd’hui la loi permet d’atteindre les 5000 euros sur 48 mois.

 

Le microcrédit, que ce soit en France ou au Bangladesh, a toujours voulu répondre à un même problème de base : le chômage et le travail précaire. Ainsi, presque 80 % des microcrédits aujourd’hui ont comme objet l’emploi, la mobilité et la formation.

 

Le sens du microcrédit en France

Aujourd’hui, autour de quantre-cent mille personnes en France n’ont pas accès à un compte bancaire. Bien que cela ne représente que 1% de la population, le microcrédit se présente comme une solution d’intégration dans le système bancaire existant, grâce à un coût du crédit et à des modalités de remboursement compatibles avec des revenus faibles.

 

Son rôle n’est en aucun cas de se substituer au crédit à la consommation. Ainsi, derrière chaque microcrédit se cache un projet : le retour à l’emploi dans la plupart des cas. Le microcrédit à la française a donc été lancé pour répondre à trois sujets principaux : la création d’entreprise, l’insertion professionnelle et la lutte contre l’exclusion bancaire.

 

On peut en distinguer deux types en France:

– Le microcrédit professionnel : financement pour création ou reprise d’une activité professionnelle ;
– Le microcrédit personnel : financement des dépenses de la vie courante et de projets d’insertion plus divers (achat d’une voiture, permis de conduire, suivi d’une formation, aide pour le logement ou encore la santé).

 

Le rôle de l’accompagnateur social en France

Le microcrédit inclut des opérations d’accompagnement que ce soit par des partenaires associatifs (tel que le Secours Catholique, la Croix Rouge ou les CCAS des municipalités) ou par des partenaires professionnels de financement tels que France Active ou encore l’ADIE (voir l’entretien de Metis avec Catherine Barbaroux, directrice de l’ADIE). Cet accompagnement est obligatoire, l’accès au microcrédit est impossible sans passer par ce mécanisme. Le rôle de l’accompagnateur est donc essentiel.

 

Le Secours Catholique fait donc partie de ces structures accompagnantes. Il œuvre pour que les personnes en situation de précarité puissent avoir un accès normal à la banque, à la relation avec l’argent et à l’ouverture aux mêmes possibilités que les autres. Il s’agit d’un devoir de solidarité face aux situations de vulnérabilité. « Personne n’est à l’abri d’un accident. Personne n’est dépourvu de facultés, de capacités et de talents ».

 

La principale différence avec le « coup de pouce » est le fait de passer d’une logique distributive : le « faire pour » (donner une aide ponctuellement), à une logique d’agir ensemble : le « faire avec » ou « empowerment ».

 

Plusieurs études ont montré que la relation unilatérale issue du don, crée une relation asymétrique et de déséquilibre difficile à surmonter. Le microcrédit est donc une forme d’aide moins délicate à vivre que le don. Les personnes se trouvant dans l’impossibilité de rembourser peuvent souffrir de perte de confiance et d’angoisse. Ils risquent de « s’habituer » à ne pas tenir leurs engagements. Il est donc important (si possible) de responsabiliser la personne sur les engagements pris vis-à-vis d’une véritable réinsertion. Lorsque la mobilisation est au rendez-vous, l’effet sur l’estime de soi et sur la dignité issue de cette mobilisation dévient irremplaçable. « L’importance intrinsèque à la liberté de choix elle-même ».

 

« La microfinance s’illustre comme étant l’outil le plus prometteur et le moins coûteux de la lutte contre la pauvreté mondiale. » Jonathan Morduch, président du Groupe d’experts des Nations unies sur les statistiques relatives à la pauvreté mondiale.

 

Le microcrédit n’est donc qu’un outil parmi d’autres et n’est pas applicable dans tous les cas. Le but est de redonner de la confiance pour agir de façon autonome, et non de mettre la personne dans une situation pire qu’elle ne l’était. Cet outil contre le surendettement implique un grand discernement de la structure accompagnante sur le projet présenté.

 

Le processus de prise de décision et le système de garantie

Après avoir rencontré la personne « aidée et suivie » afin de déterminer son « projet personnel », l’accompagnant de la Structure présentera au Comité de Décision son dossier de « Proposition d’Intervention Crédit Projet Personnel ». Ce Comité est composé de quatre membres : deux de la Structure (deux personnes dûment mandatées par la structure d’accompagnement) et deux de la Banque (normalement, cela dépend des partenaires).

 

Une fois que les vérifications de la faisabilité du prêt ont été réalisées, l’accord sera donné avec le consentement unanime des quatre membres (la réalité est un peu plus flexible, les échanges peuvent être informels).

 

En cas d’impayé, le suivi des dossiers se fait de la façon suivante :
– Dès le 1er impayé, le Directeur de la banque prêteuse devra informer immédiatement l’accompagnant de la Structure afin que celui-ci rencontre l’emprunteur afin de régulariser la situation.

– Dès le 3ème impayé, le Comité de Décision analysera la situation de la personne « aidée et suivie » et décidera alors de l’intervention du « Fonds de Garantie» de la CDC.

 

La particularité du Secours Catholique est qu’il dispose de son propre dispositif garant. L’appel en garantie se fait donc directement de son budget et de la partie « Fond Social de Garantie ». Il s’agit d’un fond composé dans sa première moitié par les fonds de l’Etat (FCS) et dans son autre moitié par les dons reçus en interne. Pour les autres structures accompagnantes, la garantie se déclenche directement du Fond de Cohésion Sociale.

 

Ce modus operandis lui permet d’avoir une plus grande autonomie sur la gestion des dossiers octroyés. En se portant garant d’une partie de l’encours de la dette, il témoigne un réel engagement vis-à-vis des projets acceptés et soumis à la banque.

 

Statistiques du Secours Catholique

Le Secours Catholique dispose d’un maillage territorial de plus de 76 délégations en France couvert par un partenaire bancaire sélectionné par région. Plus de 56 de ses équipes font du microcrédit.

 

L’enveloppe engagée en 2004 conjointement avec la Caisse de Dépôts ne représente pas beaucoup dans les finances du Secours Catholique. Dix ans après le lancement du dispositif, la réserve engagée n’a pas été complètement épuisée. Les statistiques démontrent que les gens exclus du crédit bancaire sont comme les « endettés du système classique ». Le taux de sinistralité des dossiers déposés atteint à peine 7,5% par an, le même que celui pour le crédit à la consommation. Encore une fois, l’accompagnement joue un rôle essentiel dans ce résultat.

 

En conclusion, le microcrédit a montré que débloqué à bon escient et grâce à un bon accompagnement (public ou privé), il était un soutien efficace aux trois sujets énoncés plus haut : la création d’entreprise, l’insertion professionnelle et la lutte contre l’exclusion bancaire.

 

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