par Metis
L’Organisation Internationale du Travail a publié il y a quelques années un rapport sur le harcèlement sexuel au travail dans divers pays du monde. En voici les principales conclusions.
L’OIT constate d’abord que « depuis une dizaine d’années, la généralisation et le coût du harcèlement sexuel, une des manifestations de la discrimination, suscitent une préoccupation grandissante aux échelons national et international ». Pour elle, le « harcèlement sexuel » désigne un comportement d’ordre sexuel, intempestif et insultant pour le destinataire, qui peut revêtir deux formes:
- celle d’une « contrepartie », quand un avantage professionnel – augmentation salariale, promotion, voire maintien dans l’emploi – est accordé si en échange la victime accepte des relations sexuelles;
- ou celle de conditions de travail hostiles, où la victime est l’objet d’intimidation ou d’humiliation.
Différents comportements peuvent être associés au harcèlement sexuel: physique verbal, non verbal, violence physique, attouchements, proximité inutile. Mais cela peut aussi se traduire selon l’OIT par des réflexions et questions sur l’apparence, le mode de vie, l’orientation sexuelle, par des appels téléphoniques inconvenants ou encore par des sifflements, des gestes suggestifs ou encore l’étalage d’objets sexuels.
Parmi les faits importants relevés autour du monde, l’OIT souligne que
- Dans l’Union européenne, 40 à 50% des femmes ont signalé une forme quelconque de harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Par ailleurs, d’après un rapport établi en 2004 en Italie, 55,4% de femmes, dans la fourchette des 14 à 59 ans, auraient été victimes de harcèlement sexuel. Une travailleuse sur trois est l’objet d’intimidations d’ordre sexuel en échange d’une promotion et 65% d’un chantage par semaine et par le même auteur, en général un collègue ou un supérieur hiérarchique. En outre, 55,6% des femmes victimes d’intimidation d’ordre sexuel sont licenciées.
- En Asie, une enquête publiée à Hong Kong en février 2007 a révélé que près de 25% des travailleurs interrogés (dont un tiers d’hommes) ont subi un harcèlement sexuel. Seuls 6,6% des hommes ont fait connaître leurs griefs (20% chez les femmes), par crainte du « ridicule ».
- En Océanie, selon une enquête réalisée en 2004 par la Commission australienne sur l’égalité des chances, 18% des personnes interrogées, âgées entre 18 et 64 ans, ont déclaré qu’elles ont été l’objet de harcèlement sexuel sur le lieu de travail. De ce pourcentage, 62% ont subi un harcèlement physique et moins de 37 % pouvaient invoquer des violences sexuelles.
- Les recherches indiquent que les femmes les plus exposées au harcèlement sexuel sont jeunes, financièrement dépendantes, célibataires, ou divorcées et migrantes. Quant aux hommes, ils sont jeunes, homosexuels et membres de minorités ethniques ou raciales.
- Le harcèlement sexuel entre personnes du même sexe, quoique récent, tend à croître.
Enfin, l’OIT revient sur ce qui découle aujourd’hui de certaines décisions de justice relatives au harcèlement sexuel en matière de reconnaissance des faits mais aussi de coûts pour les personnes et organisations incriminées. Ainsi:
- En 2006, la Commission sur l’égalité des chances en matière d’emploi (EEOC) aux Etats- Unis a été saisie de 12 025 plaintes pour harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Ce chiffre représente une augmentation de 100% en cinq ans à peine, 15,4% de ces plaintes étant déposées par des hommes. L’EEOC a tranché 11 936 griefs et obtenu 48,8 millions de dollars de dommages-intérêts des entreprises où travaillaient les plaignants, sans compter les indemnités versées lors de procès.
- Selon une enquête réalisée par l’armée américaine en 1999, le coût des affaires de harcèlement sexuel impliquant des membres de ses rangs (hommes et femmes) s’est élevé à 250 millions de dollars. Moindre rendement, absentéisme, départs, remplacements et autres figuraient parmi les coûts étudiés.
- En 2004, une femme sud-africaine travaillant comme agent de sécurité a gagné un procès marquant pour harcèlement sexuel: c’était la première fois qu’un employeur était poursuivi à ce titre par une employée. L’entreprise a été condamnée à verser des dommages-intérêts à la victime pour licenciement abusif et harcèlement sexuel.
- En Inde, l’affaire, qui a fait date, opposant Vishaka à l’État du Rajasthana a conduit la Cour suprême à modifier la définition juridique du harcèlement sexuel. De « taquineries », le harcèlement sexuel est devenu, par décision de ladite cour, une violation des droits humains des femmes. La décision contenait également des directives concernant la prévention et la réparation.
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