par Blanca Jiménez García
Diverses estimations donnent une idée de l’importance des industries liées au sexe dans le monde : ainsi près de 250 millions de personnes seraient consommatrices des biens et services produites par ces industries dont le chiffre d’affaires représenterait près de 100 milliards de dollars selon des sources américaines se rapportant à l’année 2006 et se serait multiplié par 6 en 20 ans. En comparaison et pour la même période, le chiffre d’affaires de Microsoft s’élevait à 44,8 milliards de dollars….Mais qu’entend-on par industries du sexe?
Les industries du sexe ne se limitent pas à la prostitution ou au trafic d’êtres humains à des fins sexuelles. Au-delà de ces deux activités très connues, elles regroupent des activités comme la pornographie, la commercialisation de produits destinés aux adultes, les clubs de striptease, le tourisme sexuel, le cybersexe. Selon les pays, ces activités peuvent être légales ou illégales et, en de ce dernier cas renvoient à des catégories plus larges mais souvent floues de marché noir, d’économie souterraine ou encore d’économie de l’ombre.
Economie de l’ombre et prostitution
D’après Havocscope Global Black Market Information , les Etats-Unis sont le pays où l’économie de l’ombre procure les revenus les plus élevés : celle-ci totaliserait 625 Milliards de dollars dont 215 Milliards en provenance du trafic de drogues, 37,5 Milliards du téléchargement illégal (que ce soit de la musique ou des films) et 14,6 milliards de la prostitution. Le deuxième pays de ce palmarès serait la Chine avec une économie de l’ombre générant 261 milliards de dollars dont 73 milliards résultant de la prostitution, 17 milliards du trafic de drogues et 1,031 milliards du téléchargement illégal. L’Espagne serait le quatrième pays de la liste avec 126 Milliards de dollars dont 95 issus du trafic de drogues et 26,5 de la prostitution. Puis viendraient par ordre décroissant l’Italie en cinquième position, le Japon, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Indonésie, le Brésil, le Maroc, le Nigeria.
S’agissant de la prostitution, les pays où celle-ci génère le plus de revenus sont : la Chine (73 Mds), l’Espagne (26,5 Mds), le Japon (24 Mds), l’Allemagne (18 Mds), les Etats-Unis (14,6 Mds), la Corée du Sud (12 Mds) et l’Inde (8,4 Mds). A l’inverse, certains pays ont une « réputation » qui n’est guère corroborée par les chiffres : il en va par exemple des Pays-Bas où les revenus de la prostitution ne se monterait « qu’à 800 millions » ou encore de la Russie avec « seulement » 540 millions. A noter aussi que les différences entre le Nord et le Sud se font plus marquantes : prostitué(e)s de luxe des pays du Nord et de la misère des pays du Sud et de l’Est.
Tourisme sexuel : la mondialisation du sexe
D’après Franck Michel (« Faits, effets et méfaits du tourisme sexuel dans le monde », 2013), la crise actuelle amplifie le phénomène du tourisme sexuel qui peut prendre des formes variées, y compris parfois déguisé en voyages culturels ou thématiques. Les principales destinations sont les pays du Sud et du soleil, et l’Asie est aujourd’hui le continent le plus touché par ce phénomène. Selon le même auteur, l’industrie du sexe vient à représenter dans plusieurs pays – Philippines, Thaïlande, Cambodge, Malaisie et Indonésie – entre 2 et 14% du PIB. L’Amérique Latine et l’espace caribéen – Cuba, Brésil, Costa Rica et République Dominicaine – sont également deux importantes régions où le tourisme sexuel est en augmentation. Mais cette industrie s’est aussi installée en Afrique, notamment au Maroc, Tunisie, Cameroun, Gambie, Sénégal, Afrique du Sud, Zambie, Kenya ou le Madagascar. Se développant avec l’arrivée plus importante de touristes individuels, il acquiert rapidement rentabilité économique forte.
Les autres business de l’industrie du sexe
Par ailleurs, Sabine Dusch (« Le trafic d’êtres humains ») chiffre les revenus de la pornographie aux Etats-Unis, qui concentrent 89% de la production mondiale, à plus de 10 milliards par an. Au Danemark, la pornographie serait la troisième industrie et, selon UNICEF, la pornographie et la prostitution enfantine compteraient à eux deux plus d’un milliard d’euros par an. D’après Internet Pornography Statistics , les revenus de l’industrie pornographique seraient supérieurs à ceux de compagnies comme Microsoft, Google, Amazon ou Apple. On notera que selon certaines études ce sont 3 pays asiatiques qui sont ici champions du monde, la Chine en tête (27,4 milliards de dollars), suivie de la Corée du Sud (25,73 milliards de dollars) et du Japon (environ 20 milliards de dollars). Ce seraient les ventes et locations de films qui généreraient les revenus les plus importants, arrivant jusqu’à 3,62 milliards.
Les industries du sexe sont souvent pratiquées par des entreprises dont le cœur de métier est tout autre. Ainsi, de grandes corporations comme AT&T, General Motors ou la chaîne hôtelière Marriott sont aussi des distributeurs de films pornographiques. 14% du chiffre d’affaires de Canal+ viendrait des films pornographiques; pour sa part, France Telecom tire 30% des revenus totaux de l’audiotel rose, dont le montant s’élève à 250 millions d’euros.
Clubs de strip tease, sex shops mais surtout cybersexe constituent d’autres aspects de l’industrie du Le rythme de croissance annuelle du cybersexe serait de 5% par an! Quant aux clubs de striptease ils généreraient des revenus annuels de 75 milliards de dollars annuels.
Avec la mondialisation croissante et l’essor des nouvelles technologies, les industries du sexe, légales ou non, ne cessent de rapporter de plus en plus d’argent. Leur profitabilité attire à elles de grandes entreprises. Aujourd’hui certains colosses de la finance, futurs empereurs de marchés ou « stratèges efficaces » ne placent pas tous leurs œufs dans le même panier ! Après la vague de fonds d’investissements « socialement responsables », les gens d’affaires s’engagent, depuis le nouveau millénaire, dans l’exploitation des « vice fund ». Le fonds d’investissement américain Vice Fund, créé en 2002, a d’ailleurs pour ambition d’encourager les investissements dans tout ce qui est socialement immoral, tout en restant légal. Partant du principe que l’être humain est régit par divers vices, aucune récession économique ne l’éloignera de ses besoins de satisfaction sexuelle. En clair, l’homme consommera toujours le sexe d’une façon ou d’une autre et il sera toujours prêt à payer pour s’en procurer. Illustration s’il en fallait que le débat entre morale, marché et libertés est loin d’être clos !
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