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Bilan social de l’UE en 2012 : esquisse d’une nouvelle vision?

publié le 2013-09-18

Chaque année, l’Observatoire social européen (OSE) publie le « Bilan social de l’Union européenne », en collaboration avec l’Institut syndical européen (ETUI). Une tentative de synthèse des principales évolutions socio-économiques intervenues en Europe durant l’année écoulée. Si la crise et les réponses qui lui sont apportées occupent à nouveau une place de choix dans l’édition 2012, celle-ci se caractérise également par la volonté d’aller au-delà du simple constat pour proposer des alternatives à l’austérité dominante.

 

OSE

L’édition 2012 du « Bilan social de l’Union européenne » s’ouvre sur un constat familier : l’UE est toujours en crise et les coûts sociaux de cette dernière ne cessent de s’alourdir. Creusement des déséquilibres « Nord-Sud », chômage endémique (en particulier chez les jeunes), détériorations des conditions de travail, l’UE semble toujours incapable d’enrayer cet engrenage infernal, notamment en lui opposant autre chose qu’une stratégie d’austérité qui a montré ses limites.

 

Du nouveau dans la crise
Mais il y a du nouveau. Selon les auteurs, nous serions ainsi rentrés dans la sixième étape de la crise. Une étape d’autant plus dangereuse qu’elle se caractérise cette fois par une défiance politique des citoyens vis-à-vis de leurs instances nationales et/ou supranationales. En témoignent la montée des populismes et le succès de mouvements anti-européens qui surfent sur la crise de légitimité qui affecte plus que jamais la « gouvernance économique » européenne. À ce sujet, l’ouvrage rappelle que 2012 a vu la mise en oeuvre de l’ensemble des révisions de cette gouvernance décidées en 2011 (pacte budgétaire, « six-pack », programme OMT), dont la composante sociale reste, au mieux, timide. Les ressources dérisoires débloquées dans le cadre du « Pacte pour la croissance et l’emploi » ou encore les atermoiements qui ont entouré l’adoption d’un nouveau cadre budgétaire pour la période 2014-2020 témoigneraient d’ailleurs de la priorité qui continue d’être accordée à « l’assainissement budgétaire » en Europe.

Pourtant, et c’est une autre nouveauté, 2012 a vu des institutions internationales aussi variées que l’OIT, le FMI et l’OCDE, critiquer ouvertement l’orientation actuelle de la stratégie européenne de réponse à la crise. Leur point commun : elles dénoncent toutes les effets récessifs d’une consolidation budgétaire menée au pas de charge, de même que les faiblesses persistantes d’un secteur financier dont la « régulation » se fait décidément attendre…

 

Quelles alternatives ?
C’est dans ce contexte que les auteurs du « Bilan social » ont souhaité cette année aller au-delà de l’analyse de la crise et de ses effets pour envisager des solutions alternatives à l’impasse actuelle. Les différentes contributions s’organisent ainsi autour de deux grands axes : la gouvernance européenne en matière socio-économique et les politiques sociales et outils de solidarité disponibles au sein de l’UE.

Concernant le premier axe, on peut noter l’accalmie intervenue sur le front de la crise de l’euro (grâce à l’engagement résolu de la BCE), qui masque néanmoins des asymétries persistantes entre le « Nord » et le « Sud » et surtout un désaveu croissant de l’opinion publique européenne face à l’évolution de l’UE. D’autres pistes devraient ainsi être explorées pour faire face aux dimensions économiques et politiques de la crise, à l’image des débats portant sur une stratégie de développement économique et social « au-delà du PIB », qui permettrait d’intégrer les aspects économiques, mais aussi socio-écologiques d’une éventuelle sortie de crise.

Sur le plan des politiques sociales, les éléments présents dans la stratégie « Europe 2020 » doivent impérativement s’accompagner des ressources nécessaires à leur mise en oeuvre, sans quoi ils risquent de tomber dans la même désuétude que la stratégie européenne pour l’emploi dans le cadre de la gouvernance économique et sociale de l’UE. De son côté, l’éducation ferait face à un risque de développement à deux vitesses, entre un « centre » disposé à renforcer des investissements déjà conséquents et une « périphérie » dont la crise a au contraire entraîné un retrait potentiellement dévastateur. Une situation qui n’est pas sans rappeler l’État du dialogue social européen, coincé entre un abandon relatif des mécanismes de coordination de la fixation des salaires (surtout au Sud) et une marginalisation croissante du mouvement syndical dans le cadre d’une stratégie décentralisée et unilatérale privilégiée par les employeurs.

 

Quatre lignes d’action pour un nouvelle « vision européenne »
On le voit, les défis demeurent énormes. Pour y faire face, le Bilan se conclue sur quatre lignes d’action susceptibles d’orienter une sortie de crise plus équitable pour l’avenir du projet européen. Celle-ci débuterait par l’adoption d’une feuille de route plus équilibrée pour la croissance (par exemple à travers une augmentation du budget de l’UE et/ou par une révision du mandat de la BCE), pour se poursuivre par une meilleure prise en compte de la fracture géographique au sein l’UE et de la crise de légitimité qui l’affecte (élection des principaux responsables de l’UE, renforcement du Parlement), le tout dans le cadre d’une nouvelle « vision européenne » capable de s’incarner dans un projet à long terme mobilisateur pour l’ensemble des citoyens.

 

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