L’art, rouage du monde

On oppose volontiers l'art et le travail. L'artiste semble souvent plus lié aux muses ou au génie qu'au labeur. L'inspiration s'oppose à l'effort, la flamme créatrice, à la formation. L'objet d'art lui-même échappe, pense-t-on, au cycle du travail laborieux ; il n'est pas nécessaire mais généreux et libre ; l'apprécier, c'est éprouver la « faveur » (Kant) qu'il nous fait, non le service qui nous rend. Loin d'être consommé, comme le sont les produits du travail, il est sacralisé, exposé et patrimonialisé. À l'inverse de cette vision romantique encore largement répandue s'exprime parfois un désenchantement : non, l'art n'est pas cette chose élevée et sacrée, c'est un rouage de l'économie mondiale.