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Lors d’un débat sur les leviers de régulation mondiale pour le social organisé par l’Observatoire Social International (OSI), Pascal Lamy esquisse l’avenir d’ISO 26 000

 

Bouteille2

ISO 26 000, que les aficionados de la responsabilité sociétale attendent avec impatience, doit sortir de l’oeuf d’ici la fin de l’année. Il est possible de suivre la gestation sur un site dédié. « L’ISO 26 000 encouragera l’application, dans le monde entier, des meilleures pratiques en matière de responsabilité sociétale. Les recommandations qui figurent dans cette norme s’appuient sur les meilleures pratiques dégagées dans ce domaine par le secteur public et le secteur privé. Elles devraient être utiles aux organisations, grandes et petites, dans ces deux secteurs » énonce le dernier communiqué de presse.

 

L’ambition de départ était de ne plus limiter ces pratiques aux entreprises, mais de l’ouvrir aux organisations. Une avancée, car jusqu’à présent les principes directeurs du BIT se limitaient au droit du travaillant. Pour l’ISO donc, toutes les organisations sont concernées.

 

L’ISO 26 000 qui va définir la responsabilité sociétale à l’échelon international déçoit à l’avance. Elle ne rendra pas contraignante l’application des normes fondamentales de travail. « Ce n’est plus une norme, c’est une déclaration de principes, un guide de bonnes pratiques, pour les volontaires qui ne savent pas par où commencer » explique Marie-Caroline Caillet, juriste de l’ONG Sherpa.

 

Premier pas

L’OSI organisait justement le mois dernier un débat autour d’une possible régulation mondiale pour le social. Face aux exigences « liquides » de la finance, sur les piliers « solides » que sont l’homme, les lois et les produits, que devient le système social « gazeux » ? ISO 26 000 est un premier pas.

 

La RSE est un instrument « intéressant » qui est limité par « l’incompatibilité des normes utilisées d’une entreprise à l’autre, par la liberté du consommateur à choisir des produits qui ne sont pas responsables et par les modes de production indécents » estime Raymond Torres, directeur de l’Institut international d’études sociales du BIT. Si on interdit le travail des enfants dans certains pays, et dans certains secteurs, « ils se tourneront vers des emplois encore moins décents ».

 

Bernard Chambon, directeur général adjoint chez Rhodia est plutôt optimiste : « La crise est un accélérateur de changement. Les travaux menés sur ISO 26000 sont très importants. Ce sera le début du commencement avec tous les problèmes que cela soulève, notamment sur les visions du développement durable. Le débat sur l’indicateur PIB montre que les lignes commencent à bouger intellectuellement au niveau des entreprises et des Etats. Dans une entreprise, le social existe à deux conditions : soit c’est une culture intégrée, soit c’est une cerise sur le gâteau, car c’est un élément qualitatif qu’il n’est pas facile de chiffrer ».

 

Vers le « Dumping social » à l’envers

Pascal Lamy, directeur général de l’OMC, enchérit : « les standards internationaux sont une voie intéressante pour encadrer le social qu’on pourrait qualifier « de gazeux ». Du point de vue de l’OMC, la stratégie consiste à pousser à une démarche de standardisation. Mais comme les multinationales sont largement dans des économies d’échelle, la multiplication des standards ne les réjouit pas ».

 

L’aveu d’impuissance BIT est glacial: « certains domaines ne sont pas dans les mains de l’OIT, ils rendent difficile la pression pour davantage de protection sociale (finance internationale, fiscalité) ». Cependant, la crise financière et économique « a bon dos ». Certes elle a bousculé la géo-économie mondiale. Certes la réglementation financière et fiscale est la condition sine qua none au redressement économique durable, mais l’OIT répète depuis 2008, que « la crise sociale couvait déjà : altération des revenus, inégalités croissantes, le processus de mondialisation a généré de nombreux bénéfices mais il est aujourd’hui déséquilibré, injuste et précaire ». Un coup d’oeil à l’observatoire de la crise mondiale de l’emploi (ILO Global Job Crisis Observatory) semble indiquer que les bonnes pratiques ont été mise au placard. Le dernier communiqué sur le travail des enfants date de 2007, ceux sur la mondialisation plus juste et le dialogue social de 2008.

 

Alors que va changer ISO 26 000 ? La norme confirme pour le moment que les entrepreneurs volontaires sont encore les mieux placées pour mener des stratégies de développement durable. Danone et Rhodia, les incontournables de la RSE se présentaient justement ce jour-là comme des précurseurs, auxquels leurs concurrents reprochent parfois de faire du dumping social à l’envers !

 

 

 

 

L’Observatoire Social International, OSI

Créé à l’initiative du groupe GDF SUEZ en 1998, est né de la volonté de mieux prendre en compte les exigences sociales de la mondialisation au-delà des seuls impératifs économiques et financiers. Son objectif : contribuer à une intégration de la dimension humaine et sociale à travers des propositions concrètes.

 

 

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