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par Piotr Sula

L’auto-emploi est toujours une forme de travail très répandue en Pologne. Le chiffre stagne autour de 3 millions, représentant entre 27% et 31% des actifs depuis maintenant 10 ans. Metis avait publié un article en avril 2008, que complète l’analyse de Piotr Sula de l’Institute of Public Affairs.

 

Cette forme d’emploi s’est développée suite aux difficultés de la transition économique après 1989. Il s’agissait de retrouver une activité et un revenu à tout prix dans un pays aux prises avec des restructurations lourdes et tous azimuts. Ce type d’emploi s’est ensuite consolidé, les auto-employés travaillant de plus en plus pour le compte d’un tiers. Ceci témoigne à la fois d’une extension de l’esprit d’entreprise en Pologne, stimulé grâce à une fiscalité avantageuse pour les créateurs, mais aussi d’une tentative d’échapper à de nombreuses taxes et paiements tant du côté de l’auto-employé que du côté de « l’employeur ».

 

Les métiers couverts vont de l’agriculture (majorité écrasante des indépendants) au BTP en passant par le commerce, les transports mais aussi les emplois administratifs, les garçons de café, les soignants, les manutentionnaires.

 

pologne

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les études polonaises montrent que plus de la moitié des auto-employés travaillent -au moins en partie- pour un employeur qui les avaient employés précédemment dans une relation salariale. 400 à 600 mille d’entre eux peuvent être résolument qualifiés de faux-indépendants. Et 17% des Polonais font du télétravail, ce qui classe la Pologne en tête des 27 Etats membre.

 

Depuis 2001, la société polonaise discute âprement cette situation et les pouvoirs publics ont pris plusieurs initiatives :
– modification du code du travail visant à éviter les transformations des contrats de travail en relations d’auto-emploi
– établissement d’un nouveau régime pour la création d’entreprises en 2004
– introduction en 2007 d’une liste détaillée de critères pour définir l’auto emploi légal et pouvoirs renforcés confiés à l‘inspection du travail pour lutter conte la fausse indépendance et le travail illégal.

 

Les questions toujours discutées concernent les pouvoirs de requalification des administrations fiscales et sociales comme celui du niveau des taxes et cotisations et enfin les avantages sociaux issus du régime de protection sociale, la Pologne connaissant comme beaucoup de pays d’Europe centrale un niveau élevé de cotisations salariales pour des prestations assez faibles.

Depuis le 1er janvier 2007, l’administration fiscale vérifie que les auto-employés fournissent bien des prestations à un client qui ne soit pas seulement leur ancien employeur. Sinon, le cas est traité comme une situation de salariat sous contrat de travail avec toutes les conséquences légales et fiscales associées. Si l’ancien l’employé veut travailler pour son ancien employeur comme indépendant, il doit avoir au moins un autre client. Dans l’année qui suit son changement de statut, il paiera des cotisations aussi élevées, que celles que payait son employeur lorsqu’il était sous contrat. Exception faite, si son contrat limite sa prestation à une tâche très spécifique.

 

Un projet de loi discuté en 2007 visait à établir un contrat de non-salariat, mixant les formes indépendantes et salariales des relations de travail en donnant aux employés un accès à certains droits sociaux : rémunération minimale, protection en matière de santé-sécurité, droit à des congés non payés, préavis minimal avant la fin du contrat etc… Mais la proposition, tout à fait innovante et qui aurait pu faire école dans plusieurs pays européens n’a pas survécu au changement de majorité en 2008.

 

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