France : quelle retraite pour les indépendants ?
publié le 2010-11-04
Quelles sont les modalités de la retraite pour un indépendant ? Depuis 2006, les travailleurs indépendants non agricoles sont couverts par un régime de protection sociale unique : le Régime social des indépendants (RSI).
Le RSI s’est substitué à trois organismes professionnels : l’ORGANIC pour les commerçants, la CANCAVA pour les artisans (qui géraient la retraite de base, la retraite complémentaire et l’assurance invalidité décès) et la CANAM qui gérait pour les commerçants, les artisans, les industriels et les professions libérales l’assurance maladie, l’assurance maternité et les indemnités journalières. ll pérennise ainsi un régime de protection autonome pour les travailleurs indépendants. L’objectif est notamment de simplifier les démarches des assurés avec la mise en place de l’Interlocuteur Social Unique (ISU).
En dépit de l’existence du RSI, le régime de retraite dont relève un travailleur indépendant dépend de la nature de son activité, de la forme juridique de son entreprise, de la reconnaissance ou non d’un lien de subordination.
– Les exploitants agricoles relèvent d’une catégorie particulière et leur protection sociale est assurée par la Mutualité Sociale Agricole (MSA). Les professions libérales relèvent elles aussi d’un régime spécifique, la CNAVPL.
– Le régime dont relève un artisan ou un commerçant dépend de la forme juridique de son entreprise : s’il s’agit d’une entreprise unipersonnelle ou s’il est gérant majoritaire d’une société à responsabilité limitée (SARL), il relève du régime des travailleurs non salariés des professions non agricoles, le RSI. S’il est gérant d’une société anonyme ou gérant minoritaire d’une SARL, il relève du régime général de sécurité sociale.
– Les salariés portés sont considérés a priori comme des salariés, relevant donc du régime général.
– Les auto-entrepreneurs relèvent quant à eux de la CNAVPL, ce qui est étonnant. Pourquoi ne pas les avoir intégrés dans le RSI ?
Quels revenus pendant la retraite ?
Les travailleurs indépendants ont le plus souvent partagé leur carrière entre salarié et indépendant. Une carrière débutée comme indépendant est plus fréquemment marquée par des changements de statuts. Et l’entrée dans le statut d’indépendant est souvent tardive et précédée d’un passage par le salariat. Au moment de la retraite, les indépendants sont donc pour la plupart poly-pensionnés. En 2004, c’est le cas de 45% des anciens exploitants agricoles, 86% des anciens artisans, 76% des anciens commerçants et 66 % des anciens professionnels libéraux. Parmi les retraités du RSI fin 2007, 96 % sont polypensionnés. Ils perçoivent donc une pension composite.
Par ailleurs, les activités exercées nécessitent souvent de constituer un capital professionnel pour disposer d’un lieu de travail et du matériel nécessaire. Ce capital est valorisé lors du passage à la retraite (revente de l’exploitation agricole, du fonds de commerce, de la clientèle, …). Cette spécificité explique que les régimes de retraite des non salariés aient été, à l’origine, établis sur des bases minimales. Les revenus du patrimoine (produits d’assurance-vie, patrimoine professionnel, patrimoine immobilier) sont en effet des compléments importants de la pension de retraite.
Comme pour les salariés, la pension de retraite moyenne des femmes est inférieure de 40 % à celle des hommes. Aux écarts de durée de travail s’ajoutent pour les non-salariées l’exercice de l’activité au seul titre de conjointe, avec une couverture plus faible.
Le travail indépendant après la retraite ?
Dans le contexte d’un allongement de la durée d’assurance requise pour une pension à taux plein, le travail indépendant apparaît comme l’une des modalités possibles d’un prolongement d’activité. Diverses formes de travail indépendant sont a priori envisageables : passage à un emploi sous statut d’indépendant, recours au « portage salarial », création d’entreprise, y compris dans le cadre de l’auto-entreprenariat…
Fin 2008, près d’un cinquième des indépendants en activité au-delà de 55 ans cotisants au RSI cumulent leur activité avec une pension du régime général. Parmi les cotisants du RSI qui ont liquidé une pension au régime général depuis 2003, 22% d’entre eux étaient salariés avant de liquider leur pension et ont commencé une activité au RSI ensuite.
L’auto-entreprenariat semble remporter un certain succès auprès des retraités, qui y trouvent une occasion de démarrer une activité indépendante leur procurant une rémunération complémentaire. Le portage salarial concerne lui aussi plus fréquemment les 45 ans et plus.
Ce qui pourrait être un développement de l’emploi indépendant après la retraite ou en fin de carrière soulève plusieurs questions. Les emplois indépendants permettent-ils d’accroître l’autonomie dans le travail (contenu et horaires, en particulier), offrant les marges de manœuvre plus nécessaires avec l’avance en âge ? Est-ce la conséquence d’un déséquilibre entre offre et demande d’emploi pour les seniors ? Ces formes d’emploi sont-elles ouvertes à tous ou entérinent-elles le parcours antérieur et les différences socioprofessionnelles ?
Enfin, le portage salarial comme l’auto-entreprenariat apparaissent très ambivalents : s’ils font figure de solutions individuelles au problème de réemploi des seniors, ne risquent-ils pas de conforter des comportements défavorables, voire discriminatoires, de la part des employeurs ?
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