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par Léo Vigny

Léo Vigny a réalisé un mémoire de recherche en sociologie dans le cadre d’un Master de Paris 1-Sorbonne. Il y montre en particulier comment dans le secteur de la restauration parisienne la sociabilité propre au travail peut conduire à des formes très particulières de conciliation vie professionnelle/vie privée. Les témoignages de Claire, Nadine, Sophie, Simon, Patrick et Romain donnent chair à son propos.

 

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Depuis les premières réformes de 1982 du septennat de François Mitterrand, l’aménagement du temps de travail est au cœur des politiques de l’emploi et du travail. A cette époque la mise en place de la modulation annuelle collective déroge avec la règle de la fixation par l’employeur de l’horaire hebdomadaire ainsi qu’au régime des heures supplémentaires. C’est le début d’une diversification des horaires de travail qui correspond aux besoins de flexibilisation du marché du travail afin de permettre aux entreprises d’être plus compétitives. Cette modulation du temps de travail va être développée par les dispositifs des lois Aubry I et II (1997-2000), notamment en renvoyant la négociation de la réduction du temps de travail à l’échelle des entreprises afin que celles-ci puissent s’adapter à leurs impératifs de production.

Aujourd’hui, cette évolution de l’économie se caractérise aussi par le phénomène dit de « l’uberisation », avec des applications de type Gofer qui permet d’employer un serveur pour quelques heures. C’est-à-dire que la relation de travail évolue vers des formes non conventionnelles dans lesquelles le contrat commercial se substitue au contrat de travail, et où les structures hiérarchiques, en place au sein d’une entreprise classique, n’existent plus. Ces différentes évolutions du droit ont favorisé le développement d’un phénomène : la désynchronisation des temps de travail par rapport à d’autres temps sociaux, dont le temps familial, qui est lui rythmé par les calendriers scolaires.

Cette flexibilisation du marché du travail s’est accompagnée d’une autre transformation de l’économie : l’essor des loisirs. Joffre Dumazedier décrit l’évolution de ce secteur économique dès les années 1960, en mettant l’accent sur la réduction du temps de travail de long terme qui a permis son développement. Entre le 19e et le 20e siècle, l’ouvrier a vu son temps de travail passer de 4000 heures à 1600 heures annuelles. Cette baisse du temps de travail annuel permet aux individus de consacrer du temps à d’autres activités, comme celles dites de loisir. L’essor de cette économie contribue à alimenter la demande adressée aux secteurs des services, comme la restauration, qui se « consomment » sur le temps hors travail et contribue à une réorganisation du travail dans sa dimension temporelle. Certains horaires de travail sont qualifiés de désynchronisés lorsqu’ils ne suivent plus la journée classique.

 

Dans le même temps, les liens sociaux se sont modifiés au sein de la famille. Laurent Lesnard étudie la transformation de la cohésion familiale dans La Famille désarticulée. Pour reprendre les termes de Durkheim, il y a passage d’une cohésion organique de la famille, où le lien familial est dû à la division du travail au sein de la famille, à une cohésion mécanique, où le temps passé ensemble, notamment le temps de loisir, est primordial. La transformation de la famille est aussi à mettre en lien avec l’évolution du statut de l’enfant, qui prend une place prépondérante au sein de l’univers familial. Le temps familial augmente et devient même l’une des caractéristiques qui définit la famille. Laurent Lesnard observe aussi que la majorité de cette sociabilité familiale se fait à l’heure des repas le soir et le week-end. La désynchronisation des horaires de travail peut alors empiéter sur le temps consacré à la sociabilité familiale.

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À partir de ces différents constats, il est intéressant de chercher à comprendre comment les individus concilient travail et famille. Dans certains secteurs professionnels, la désynchronisation des temps du travail et de la famille est compensée en important le travail dans la sphère privée. Cependant si on conçoit aisément que les cadres, les indépendants, ou les professeurs « amènent » du travail à leur domicile, ce mécanisme de conciliation entre vie privée et vie professionnelle est impossible à mettre en place dans les secteurs où la présence sur le lieu de travail est nécessaire à la production du service. Comment les serveurs de restaurant font-ils ? L’enquête de terrain a été faite à partir d’entretiens avec des personnes travaillant sur Paris. Quelles sont les caractéristiques de ce secteur et comment s’y concilient vie professionnelle et vie privée ?

Des horaires et des organisations du travail atypiques


La restauration traditionnelle est un secteur de service. Le service vendu est pour la plupart du temps un loisir. Il se déroule donc pendant le temps de repos des autres travailleurs : le soir, le week-end et pendant les vacances. Les horaires atypiques restent la norme pour les serveurs. Dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, 66 % des employés travaillent le dimanche et environ 20 % des employés du secteur indiquaient, dès l’enquête Emploi de 1998, travailler le soir après 22 h.

 

Un établissement qui répond à des demandes de loisir sera actif durant les temps inactifs pour le reste de la société. Cette désynchronisation des temps se joue aussi bien à l’échelle de la journée, de la semaine qu’à l’échelle de l’année. En effet le fonctionnement de la restauration se fait par « coup de feu ». Ces coups de feu sont les moments où il y a des afflux de clients : le midi et le soir généralement. Le matin et l’après-midi étant respectivement le moment des cafés et de la « limo » (service de boissons de l’après-midi avec principalement soda et alcool léger). Durant ces temps sans coup de feu, le travail est moins intense puisqu’il y a peu de demandes à satisfaire : on fait alors les préparations. Pierre travaille en tant que serveur et barman dans un restaurant du 17e arrondissement, pour lui ces temps entre les services servent principalement à « mettre la salle en place, ensuite tu fais la remontée de cave (…) tu remontes les bouteilles, tu prépares ton bar bon comme dans toute la restauration, il faut être en place ». Cette mise en place correspond à toutes les taches que l’on n’a pas le temps de faire pendant le « chaud » du service : couper du pain, dresser les tables, préparer les panneaux, remplir les réfrigérateurs. Pendant ces temps de répit, c’est aussi le moment pour le personnel de restauration de manger ou de prendre des pauses. Au cours de mes observations il n’était pas rare de voir déjeuner le personnel à 11 h ou bien 15 h, ou le soir dîner vers 23 h avant que la cuisine ne ferme. Ainsi j’ai observé une désynchronisation des temps quotidiens comme ceux des repas, mais aussi du sommeil. La désynchronisation des temps hebdomadaires a pour principale cause le travail le week-end, tandis que la désynchronisation annuelle est due au travail de saison. Dans les zones touristiques, il y a des périodes creuses et des périodes intenses. Un travailleur saisonnier travaillera alors de mars à octobre, ses vacances seront décalées par rapport aux vacances « classiques », rythmées par les vacances scolaires.

L’organisation temporelle du travail dans la restauration est donc désynchronisée des temps scolaires, que ce soit pour une journée, une semaine ou une année. Ce constat pose évidemment des problèmes de conciliation entre vie familiale et vie professionnelle. Laurent Lesnard affirme que « la désynchronisation n’est pas un choix, mais le résultat des inégalités individuelles en matière d’horaire ». Il me faut discuter cet avis, car lors de mes entretiens avec les enquêtés certains se plaignaient de cette désynchronisation des temps tandis que d’autres s’en accommodaient parfaitement. Par exemple, Simon, un jeune serveur de 22 ans me dit à propos des horaires décalés :

« Non, moi je trouve cela limite plaisant (…) au final oui je me lèverais plus tôt (pour commencer à 6 h 30 ou 7 h), mais à 15 h ou 16 h j’aurais fini le travail alors que la plupart des gens finissent à 17, 18, 19 h. Moi j’ai la fin de mon aprèm, ma soirée donc c’est assez relax. Si je travaille le soir (…) je me lève à midi en soit j’ai mon aprèm, je commence à 16 h 30 d’autres endroits 18 h donc si je me lève à 11 h j’ai toute ma journée ».

Le même enquêté parle ensuite de ses heures de repos :

« Les day off sont plus intéressants pour moi qu’en entreprise parce qu’à l’époque où je travaillais (il a repris des études de restauration), je décidais de mon jour de repos. Mes jours c’était le dimanche et le jeudi, ce qui était cool parce que j’avais mon dimanche et après j’avais un jour en semaine et avoir un jour en semaine c’est bien plus pratique qu’avoir son samedi/dimanche ».

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Mais Simon n’a que 22 ans et se consacrait pleinement à son travail. Devoir travailler sur un rythme temporel désynchronisé ne le dérangeait pas, car il n’avait pas d’autres impératifs à gérer. Pour qu’il y ait désynchronisation des temps, il faut déjà qu’il y ait plusieurs temps sociaux en tension, le plus souvent les temps familiaux et les temps professionnels. Simon reconnaîtra tout même avoir des difficultés à voir ses amis du fait de ses horaires décalés. Ce que Patrick un restaurateur quadragénaire explique de la manière suivante : « c’est assez difficile de les voir en régulièrement, parce que, eux aussi, ont des activités. Des fois il y a des soirées, mais j’arrive toujours à 1 h-2 h du matin (après le service), ils sont tous un peu fatigués, je sais qu’ils m’attendent ».

La désynchronisation des horaires de travail peut ne pas constituer un problème majeur pour une partie des individus. D’autres vont ressentir les difficultés à concilier vie professionnelle et vie privée, notamment les personnes ayant des enfants, et surtout les femmes ayant des enfants. Quelles sont alors les solutions de conciliation et quelles sont les possibilités de les mobiliser selon le genre, le revenu ou la position hiérarchique au sein d’un établissement ?

S’adapter aux contraintes, reconstruire la vie privée au travail


Avec des horaires de travail désynchronisés, le temps accordé aux proches l’est aussi. Pourtant les enquêtés que j’ai rencontré avaient souvent une vie sociale très épanouie. Cette importante sociabilité s’appuie principalement sur un phénomène : les individus reconstruisent la vie privée au travail. Cela de deux manières : 1) par le développement d’une sociabilité importante sur le lieu de travail entre collègues et avec les clients, 2) en amenant sa vie privée sur le lieu de travail.

Le développement d’une sociabilité importante sur le lieu de travail se fait dans un premier temps auprès des pairs, comme dans beaucoup d’autres professions. Cependant dans la restauration il existe des moments privilégiés pour construire cette sociabilité : comme « les fermetures ». Ce terme « indigène » désigne le moment où l’établissement se ferme. Plus précisément, il se ferme au public, car les protagonistes chargés de son fonctionnement l’investissent toujours. C’est le bon moment pour discuter entre collègues. Selon Romain, employé dans un bar-restaurant du 13e arrondissement :

 

« T’as le côté débriefing, tu vas débriefer, forcément, naturellement en disant : tu l’as vu celui-là ce qu’il a fait, on parle des clients, de ce qui n’a pas été pendant le service. C’est pas un truc que tu fais contraint et forcé, c’est un truc que tu fais naturellement parce que quand tu sors du service, t’as besoin d’en parler ».

Les expériences et épreuves vécues collectivement permettent aussi de développer une familiarité. « C’est une espèce de seconde famille. T’es dans les mêmes galères, c’est pas facile tous les jours » dit-il ensuite. Ces expériences permettent de constituer des présupposés communs, les interactions futures entre membres de l’équipe « sont l’occasion de réactiver un passé, des présupposés communs » (Voir Erving Goffman). Cependant, résumer ces moments à une réunion de travail serait un tort. En effet Romain explique aussi : « Puis écoutes après l’effort le réconfort, tu bois des verres, tu rigoles. Au Dupont on mettait de la musique ». Les « fermetures » permettent de développer une sociabilité privilégiée entre pairs.

 

Cette sociabilité est d’autant plus privilégiée que pendant le temps hors travail, il est plus simple de voir les individus qui ont eux aussi des horaires désynchronisés. Simon me dit à ce propos :

« Les gens qui sont en couple, dans des tafs ou dans des stages, t’arrives à les voir quand même, mais c’est plus compliqué. Voir des gens de la restauration c’est très simple alors que les mecs qui se lèvent à 7 h du matin c’est sûr qu’à deux heures du matin tu vas pas appeler en mode viens on se voit ».

Les sociabilités ne se développent pas seulement avec les pairs, mais aussi avec les clients. Les « habitués » sont un type de clients que l’on retrouve avec différentes définitions dans beaucoup de métiers de service. J’ai choisi de garder le terme indigène, car il décrit bien comment ces relations se construisent : avec l’habitude. Ce sont effectivement des clients qui reviennent régulièrement. Et c’est en partie le même mécanisme qu’avec les collègues : la fréquence des interactions permet de se créer un passé commun et d’établir une familiarité. Simon évoque aussi la fréquence des interactions comme un facteur primordial de modification des rapports « ça peut être un mec comme il vient tous les jours à ton taff au final tu le vois tous les jours, au final à mon sens c’est pareil qu’un pote ». « Parfois les relations qui se créent amènent à dépasser le cadre d’une relation marchande. Pas souvent, car il y a « beaucoup de déceptions », dit Patrick, mais ce cadre peut être dépassé lorsque l’on va se voir en dehors du restaurant. L’ex – client peut alors pénétrer dans les coulisses notamment pour « les fermetures » où les individus n’endossent plus le « costume » de serveur et cessent le jeu théâtral de la « représentation du service ». Les habitués sont une catégorie de clients compliquée à analyser, car si pour certains c’est une façade d’amitié qui est affichée, en partie pour un but commercial, pour d’autres une vraie relation affective peut se développer.

Comment voir ses proches ? Les personnes les plus impactées par la désynchronisation des horaires sont celles qui ont un ou plusieurs enfants. Les tensions entre les horaires de travail et la vie de famille sont évidentes pour Claire, gérante d’un restaurant du 18e arrondissement et jeune maman : « c’est compliqué de partir en week-end et puis quand il (son fils) va être scolarisé on va faire comment… ».

Les solutions mises en place par les individus afin de concilier leur vie professionnelle et leur vie privée aboutissent souvent à un rapprochement de ces deux sphères. La première solution consiste à rapprocher le logement et le lieu de travail. Pour Nadine qui travaille à Levallois et habitait :

« Dans le 1er, ça faisait trop loin, à 6 h du matin Maëlle (sa fille) était dans la rue, dans mes bras c’était pas évident. Enfant de restaurateur c’est pas évident soit t’as une nounou qui vient chez toi, mais du coup tu vois pas ton enfant (…) soit tu trouves une habitation à côté du boulot et tu as de la chance ». Claire en convient aussi : « c’est essentiel d’avoir un logement facile d’accès ».

Une autre solution à laquelle les enquêtés ont beaucoup recours est l’investissement du lieu de travail par les proches. C’est rendu possible par la nature du travail dans la restauration. En effet, les serveurs délivrent un service qui est un loisir et qui est non exclusif. Les proches des employés peuvent donc eux aussi bénéficier de ce service. Romain m’a donné cet exemple lors de notre entretien :

« Rien que ce midi mon pote Nico de la bande de Bretagne, il a deux enfants et une copine, qui est une bonne pote, je suis le parrain du petit. Il m’a appelé ce matin pour me demander est-ce que tu travailles ce midi, parce que pour eux c’est jour férié, donc ils ne travaillaient pas tous les deux et ils sont venus manger avec les enfants ici. Ca m’a permis de voir les enfants et de les voir un peu donc c’est super cool, ils avaient déjà fait ça en septembre au P7 où j’ai travaillé, ils avaient déjà fait ça au Dupont où j’ai travaillé avant. C’est pareil Sylvain (un autre ami de la bande de Bretagne) ça lui arrive de venir sur mon lieu de travail. »

J’ai retrouvé ce procédé chez tous les enquêtés : la sœur de Patrick vient manger presque tous les samedis soirs à son restaurant et ses frères l’accompagnent souvent. Pour compenser les horaires atypiques, les proches peuvent venir pendant ces temps de loisir. Il est alors fréquent de passer du temps avec eux pendant les périodes creuses, du fait du fonctionnement en « coup de feu ».

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Pour concilier vie privée et vie professionnelle, certains modulent leurs horaires en fonction des besoins de la sphère domestique. La présence de l’employé est absolument nécessaire pendant les moments de grande affluence, en dehors la gestion du flux de clientèle et la préparation des services doit être assurée mais cela est modulable. Nadine commence le travail à 6 h 30, une nounou vient alors garder sa fille entre 6 h 30 et 8 h 30. Puis c’est « Cédric ou Moussa (les cuisiniers) qui restent derrière le bar le temps que je l’emmène à l’école, ils viennent un quart d’heure – 20 minutes ». Afin d’emmener sa fille à l’école Nadine organise son temps de travail. Patrick fait la même chose l’après-midi pour aller chercher son fils à l’école. Il interrompt les préparations du soir et va s’en occuper. Ensuite on retrouve le mécanisme précédent puisque son fils peut être présent dans le restaurant pendant tout le temps de préparation du service et s’en va à 19 h.

Cet investissement du lieu de travail par la vie privée, le rapprochement du logement et du lieu de travail ou encore le développement de la sociabilité au travail conduit à rapprocher vie privée et vie professionnelle. Ces adaptations aux horaires atypiques en usage dans la restauration contribuent au brouillage de la séparation entre vie professionnelle et vie privée, mais d’une manière bien différente de celle que l’on rencontre chez les professions supérieures. Le travail n’est pas « apporté » au sein de la sphère privée, c’est le lieu de travail qui est « investi » par les proches.

Mais tous les individus ne peuvent pallier au problème de la désynchronisation de manière équitable. Romain lorsqu’il finit son service à 2 h du matin à Bibliothèque François Mitterrand doit marcher jusqu’à Bastille pour prendre le Noctilien numéro 2 jusqu’à Gare de l’Est, puis marcher encore pour reprendre un Noctilien jusqu’à Stalingrad, et marcher encore jusqu’à Porte de la Villette. Se rapprocher de son lieu de travail pourrait être une solution adéquate, mais la précarité de son statut de simple serveur ne lui permet de changer de logement.

La position hiérarchique influe sur la capacité des individus à concilier vie professionnelle et vie privée. Il est plus facile de moduler ses horaires de travail lorsqu’on est son propre patron que lorsque l’on est employé. Mais c’est le fait d’être parent qui met le plus en tension ces deux sphères. Pour les femmes qui assurent principalement les taches familiales et domestiques, ces tensions amènent à faire des choix : tenir ou partir. Le parcours de Sophie est révélateur : elle a travaillé toute sa vie en tant que serveuse. Elle « faisait des ouvertures de bistrots, puis (elle a pris) une gérance un an (…) puis après j’ai fait des enfants ». Elle a quitté sa gérance pour différentes raisons, mais notamment à cause de l’amplitude horaire qu’elle ne pouvait gérer tout en attendant un enfant :

« Quand j’avais ma gérance, je faisais 8 h du matin – 2 h du matin, bon c’est pour ça que ça use un peu et après je suis allé bosser chez un copain et là c’était en coupure (…), mais comme je mettais un bébé en route c’était très bien. Tu sais tu bosses 3 h tu te reposes à la maison, tu retournes bosser 3 h. En tant que congé maternité bosser 3 h-3 h c’était bien. »

En fait il existe de nombreuses stratégies qui permettent aux individus de concilier leur travail et leur vie privée, dont la mobilité au sein d’un secteur où le turn-over est important. La plupart de ces mécanismes aboutissent à un rapprochement de la sphère professionnelle et de la sphère privée. Cependant les stratégies d’adaptation sont inégalement mises en place, les femmes ont plus de difficultés à concilier les deux, car elles assument la majeure partie des activités domestiques.

Les employés de la restauration ne sont pas les seuls impactés par la désynchronisation des horaires de travail. Cette désynchronisation produit d’autant plus d’inégalités que certains services, les crèches par exemple, ne sont pas adaptés aux horaires atypiques. Une solution pourrait être d’élargir l’amplitude horaire de ces services afin que tous y aient accès, mais cela augmenterait le nombre d’emplois désynchronisés…


Pour en savoir plus :

– Laurent Lesnard, La Famille désarticulée, PUF, 2009
– Sylvie Monchatre, Etes-Vous qualifié pour servir ?, La Dispute, 2010

 

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