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Reclassements et reconversions se sont multipliés durant l’année 2009. Et ce n’est malheureusement pas fini. L’étude très documentée du Conseil économique, social et environnemental (CESE) présentée mi-janvier et intitulée « Les cellules de reclassement » était donc très attendue. Expérimentales au début des années 1980, leurs méthodes ont convergé et influencé celles du Service public de l’Emploi sur des questions comme l’individualisation de l’accompagnement. Professionnalisées et souvent rebaptisées « antenne emploi », elles ont pourtant toujours aussi mauvaise presse.

 

chômeur

La méfiance à l’égard de ces cellules de reclassements est due bien sûr à la difficulté en soi des transitions professionnelles qui suivent les licenciements. Elle est due au peu de suivi et au peu d’évaluation de leur travail, alors même qu’elles font partie des mesures inscrites dans 85% des Plans de sauvegarde de l’emploi (PSE). Dans ce contexte le CESE joue totalement son rôle en débattant d’une question qui mérite plus qu’un débat entre experts ou un débat au coup par coup. Pourtant l’étude laisse sur sa faim. Plusieurs raisons à cela.

L’obsession actuelle du quantifiable, la quantophrénie disent certains, conduit les rapporteurs à consacrer beaucoup de temps et de soin aux définitions et aux indicateurs chiffrés qui permettraient de comparer les performances, d’unifier les cahiers des charges, de standardiser les prestations des différents cabinets privés. L’objectif d’une meilleure connaissance des résultats de ces cellules est louable. L’objectif d’encadrer l’activité d’entreprises privées est légitime. Peut-on pour autant faire entrer dans un même tableau statistique, le reclassement d’ingénieurs d’un centre de R&D et de salariés d’une unité de production, le reclassement après la fermeture d’un site à la Défense et à Clairoix, le reclassement avant 35 ans et après 50 ans ? Comment apprécier lors des démarches d’évaluation le travail fait dans ces cellules pour rendre les personnes plus autonomes dans leurs recherches, plus aptes à s’investir dans un projet de création par exemple ?

 


Confusion et sentiment d’injustice

 

Le même souci d’homogénéité pousse ensuite à chercher les moyens de simplifier et d’uniformiser les différents dispositifs. Très bien. Toutes ces mesures spécifiques à certains territoires ou à certains publics, louables en ce qu’elles cherchent à « donner plus à ceux qui ont moins » entraînent confusion et sentiment d’injustice. Mais force est de constater que du même coup, ce sont les expérimentations, les innovations, les constructions locales, qui risquent de passer à la trappe. Les cellules inter entreprises, le travail fait pour intégrer les intérimaires et les salariés de sous-traitants touchés, l’accompagnement vers la création d’entreprise ou l’auto-entrepreneuriat, la question des plans de départs volontaires qui se multiplient, les promesses de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, sont à peine ou pas du tout évoqués.

Dernière chose. La question pourtant centrale de la responsabilité des entreprises qui licencient, celle des rôles respectifs des pouvoirs publics et des opérateurs privés, ne sont pas posées. L’action des premières cellules de reclassement a été liée à la création au sein de grandes entreprises de missions ou de structures propres chargées de mener les restructurations de façon responsables vis à vis des salariés licenciés, de ceux qui restaient dans l’entreprise et vis à vis des territoires. L’action des cabinets spécialisés appelés en renfort n’était pas conçue comme une façon pour l’entreprise de s’exonérer de ses responsabilités, de « faire un chèque pour être débarrassé du problème et avoir un coupable tout désigné en cas de difficulté ». L’engagement de l’entreprise et des organisations syndicales, au côté des partenaires territoriaux pour les Conventions de revitalisation, est un élément fondamental du fonctionnement des Comités de suivi. Le CESE, fort de la composition de son Assemblée aurait pu insister davantage sur ce point plutôt que sur les mesures permettant de mieux exercer un contrôle administratif dont on connaît trop les limites.

Au total, les critiques comme les propositions du CESE risquent d’être insuffisantes pour améliorer la qualité du travail des cabinets privés et donner confiance aux salariés concernés. Cette confiance conditionne pourtant non seulement les adhésions à ces antennes emploi, mais la possibilité même d’accompagner les transitions vers un nouvel emploi. Dans ce contexte beaucoup continueront à ne croire qu’aux indemnités, qui faute de préparer l’avenir, permettent sur le moment d’afficher une victoire et un résultat tangible.

 

PS : Honneur à Marie-Hélène AMIABLE, députée des Hauts de Seine. C’est elle qui a initié la résolution approuvée cette semaine à l’Assemblée Nationale à l’unanimité et « visant à promouvoir l’harmonisation des législations européennes applicables aux droits des femmes suivant le principe de la clause de l’Européenne la plus favorisée ». Il est possible d’être sceptique sur les effets concrets à court terme de cette résolution, mais c’est néanmoins une bonne nouvelle pour les femmes sans doute, mais aussi pour l’Europe et pour le fonctionnement de l’Assemblée nationale. Trois fronts sur lesquels les bonnes nouvelles ne sont pas si fréquentes !

 

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Directeur d’une Agence régionale de développement économique de 1994 à 2001, puis de l’Association Développement et Emploi, devenue ASTREES, de 2002 à 2011. A la Fondation de France, Président du Comité Emploi de 2012 à 2018 et du Comité Acteurs clés de changement-Inventer demain, depuis 2020. Membre du Conseil Scientifique de l’Observatoire des cadres et du management. Consultant et formateur indépendant. Philosophe de formation, cinéphile depuis toujours, curieux de tout et raisonnablement éclectique.