A l’origine du Fonds d’investissement social (FISO) début 2009, la CFDT tire aujourd’hui un premier bilan. Doté de moyens important, le Fiso souffre des rivalités entre acteurs explique Marcel Grignard secrétaire général adjoint de cette grande centrale syndicale française. Entretien.
La CFDT a été à l’initiative de la création du Fiso : quel premier bilan en tirez-vous ?
La CFDT a proposé la mise en place d’un Fonds d’investissement social début 2009. Face aux conséquences de la crise pour les salariés, l’objectif de la CFDT était triple : apporter des réponses immédiates autour de la problématique « former plutôt que licencier », préparer l’avenir en investissant dans la qualification des salariés et en responsabilisant les entreprises, mobiliser les financements nécessaires en dépassant la logique de « tuyaux d’orgues » des dispositifs existants de façon à avoir la meilleure réactivité possible.
Les fortes mobilisations du début d’année 2009 ont permis d’obtenir la mise en place du Fiso dans les conditions que nous souhaitions : les partenaires sociaux et le Gouvernement rassemblés dans une cellule de pilotage ont coordonné différentes initiatives ; le Fiso était doté d’1.3 milliards d’euros en 2009 (1.4 en 2010) et le gouvernement s’engageait à apporter d’autres ressources si des besoins supérieurs apparaissaient.
En revanche, la mise en place du Fiso a pris du temps ; ce n’est que le 8 juin 2009 que le secrétaire d’Etat à l’Emploi a pu officiellement informer les préfets des modalités et principes d’intervention du Fiso. Les différents acteurs ne se sont mis en mouvement que lentement avec des difficultés à sortir des logiques ordinaires pour faire face de façon coordonnée à une situation de crise exceptionnelle.
De ce fait la montée en charge des mesures a été très lente, avec un suivi qui ne permet pas de fournir suffisamment d’éléments précis sur les bénéficiaires réellement concernés par chacune d’elles : nous disposons régulièrement de tableaux de bord des engagements financiers de l’Etat, mais de très peu d’éléments sur le nombre de salariés concernés, sur les actions de formation développées.
Pour autant, le Fiso a manifestement contribué à deux choses : favoriser un meilleur recours au chômage partiel par les entreprises. La mission « Activité partielle de longue durée » (APLD) a permis ainsi l’engagement de 22 branches professionnelles dans la démarche, notamment en dehors des secteurs industriels. Il a créé une dynamique autour de certains projets sectoriels en faveur de l’emploi et du développement des compétences dans l’intérim, la vente à distance, l’industrie agro-alimentaire, la chimie ou la métallurgie.
Quelles ont été les difficultés de fonctionnement ?
Les projets territoriaux ont souffert en premier lieu des rivalités pré- électorales entre les préfets de régions et les conseils régionaux. Les régions (Franche-Comté et Lorraine notamment) ont mis en place des dispositifs d’accompagnement prioritaire des salariés des PME hors Fiso soit parce qu’elles ont craint que l’Etat ne s’approprie leurs réalisations, soit parce que les préfets ne voulaient pas apparaître comme les porte-voix d’initiatives régionales (lire Formation : arme anti-crise en Franche-Comté).
Nous effectuons actuellement un bilan en vue du sommet social qui devrait être réuni en avril ou début mai de façon à ce que les dispositifs apportant des réponses aux salariés et entreprises en difficulté soient poursuivis ou réorientés si nécessaires.
On peut d’ores et déjà affirmer qu’en matière de formation qualifiante pour les salariés en chômage partiel ou privés d’emploi, la réalisation est très en deçà de ce qu’on attendait. Il reste un fossé très important à franchir entre la mise en œuvre et le nombre de salariés touchés.
Parmi vos priorités figurait une meilleure prise en compte des travailleurs précaires impactés par la crise : qu’est-ce qui a été fait et quelles leçons en tirez-vous ?
Les salariés intérimaires ou en fin de CDD qui ont été les premières victimes de la crise fin 2008 – début 2009 ont manifestement été laissés sans filet de protection pour beaucoup d’entre eux. La nouvelle convention d’assurance chômage qui en baissant à 4 mois d’activité la condition d’ouverture des droits à l’indemnisation-chômage a permis d’améliorer la couverture sociale de ces salariés.
La mise en place du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnel est aujourd’hui essentielle pour ces salariés : la mutualisation d’une partie des fonds de la formation professionnelle doit permettre de leur apporter des réponses.
Au final, un an après la mise en place du Fiso, nous sommes convaincus de son utilité majeure tout en pensant qu’il y a beaucoup à faire pour être plus réactifs et opérationnels. C’est aujourd’hui moins une question de moyens que d’impulsion, de détermination et d’organisation.
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