Le nouveau Traité permet aux 27 Etats membres de coordonner et de rationaliser leurs politiques de défense au sein de la « coopération structurée permanente » (CSP). Les armées européennes sont justement mises à la diète dans le cadre des politiques de rigueur. Est-ce le gage d’une intégration par la défense ?
Depuis la crise grecque, les propositions se bousculent pour donner un budget, une ligne politique et économique à l’Union européenne. Notons entre autres le rapport d’EuropaNova « Une Europe qui ose – dans l’intérêt des européens », et l’accord de principe pour renforcer la gouvernance économique.
Mais c’est bien la mise en œuvre effective de la CSP, qui au-delà des aspects strictement « défense », va obliger les Européens à davantage coopérer, tout en donnant une place nouvelle tant à la Commission européenne qu’aux représentations parlementaires dans la gouvernance des différents processus requis, estime un expert dans un document de synthèse pour « convaincre les Etats et les différents opérateurs économiques et financiers de dépasser leurs réticences pour opérer les convergences et rationalisations requises par la CSP ».
Chaque Etat-membre peut décider d’intégrer la CSP ou non. Il s’engage alors à remplir des objectifs planifiés en commun afin de consolider et rationaliser tant les offres que les demandes nationales et européennes attachées aux différentes dimensions capacitaires et armement de la PSDC (politique de sécurité et de défense commune).
Ceci requiert « d’impliquer dans ce nouveau processus de nouvelles institutions européennes et nationales ». Sur les volets « réglementaire », « technologique », « économique » et, plus globalement, « civils » de la PSDC, les exécutifs (Commission européenne, ministères de l’économie, des finances et de l’industrie) disposent désormais de compétences leur permettant de prendre une part active à la définition des besoins de consolidation et de rationalisation sur les registres capacitaires et de l’armement, ainsi qu’à la planification et à la programmation opérationnelle qui y sont attachées.
Les Etats candidats à rejoindre cette CSP pourront bénéficier d’une offre d’assistance financière (notamment de nature budgétaire, mais pas uniquement) afin de compenser les risques de défaillance – budgétaire ou programmatique – si l’état de leurs finances publiques fait craindre une incapacité – conjoncturelle ou structurelle – à compenser le déficit d’investissement consécutif à une crise budgétaire grave ou à une défaillance industrielle par rapport à leurs objectifs de coopération.
Parlements décisifs
Le rôle des parlements – Parlement européen et parlements nationaux – serait alors essentiel, car « un premier stimulus consisterait à entreprendre un processus de mise en cohérence par la voie de la coopération interparlementaire lors des débats d’orientation parlementaire engagés au niveau national » indique les annexes du document.
Jusque là, les Etats renâclaient à publier les performances nationales en matière de respect des engagements budgétaires pris au titre des programmes de coopération. Comme le souligne par ailleurs l’eurodéputé PPE Alain Lamassoure, « Le recours à ces comparaisons nationales était au cœur de la stratégie de Lisbonne. Mais les gouvernements se sont opposés à la publication, autre que confidentielle, des performances individuelles, qui n’aurait pas été flatteuse pour certains amours-propres nationaux. Cette comparaison, ce ‘benchmarking’, est pourtant un outil essentiel. La mobilisation des parlements est la meilleure garantie de sa large diffusion auprès des médias et des opinions publiques ».
Ce débat d’orientation prendrait en compte des hypothèses économiques communes – prévisions relatives aux PIB, aux taux d’intérêt, au cours de l’euro, au prix du baril, etc. – pour garantir une stabilité financière auxdites consolidations/rationalisations. « Ce qui marquerait un progrès sensible par rapport à la pratique actuelle, où chacun choisit les prévisions qui facilitent ses choix. Ainsi, l’ouverture du débat national sur les orientations budgétaires par la prise en compte de la dimension européenne et des perspectives de chacun des partenaires serait un rempart non négligeable contre la tentation du repli sur soi » précise le rapport.
Il va sans dire que la mise en œuvre effective du dispositif dit du ‘semestre européen’ évoqué par la Commission européenne dans ses recommandations à l’égard de la nouvelle gouvernance économique de l’Union participeront à créer un environnement budgétaire, structurel et macroéconomique particulièrement propice au lancement de ces réformes. Selon ce dispositif, les Etats membres devront présenter simultanément à la Commission leurs programmes de stabilité ou de convergence (dont le contenu sera adapté à l’exercice) et les programmes nationaux de réformes, afin qu’une coordination ex ante puisse avoir lieu. « La complémentarité des plans nationaux avant que les décisions finales sur le budget de l’année suivante ne soient prises dans les Etats membres », précise la communication. Il ne s’agit pas d’interférer avec la souveraineté des parlements nationaux, a de nouveau répété devant la presse Olli Rehn, « mais de s’assurer que les budget nationaux sont cohérents avec les engagements européens des Etats membres et ne mettent pas en danger la stabilité financière en Europe ».
Reste à convaincre les différents acteurs traditionnels de la politique de sécurité et de défense commune (ministères de la défense et des affaires étrangères, Conseil) du bienfondé de ces propositions afin qu’ils ne retardent pas sine die la mise en œuvre effective de la CSP.
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