Faiblesse et désaffection syndicale, difficile articulation des niveaux national/européen. Liviu Apostoiu, vice-président de la confédération syndicale roumaine Cartel-Alfa, est aussi responsable de la question des comités d’entreprises européens.
Quels sont les avantages à travailler avec la Confédération Européenne des Syndicats (CES) ? Quelles sont les difficultés ?
La collaboration avec la CES a toujours été fructueuse et nous aide beaucoup. Pour plusieurs raisons : des informations en continu sur tous les aspects de notre activité syndicale, la rapidité avec laquelle la CES répond à nos demandes, le soutien dans certains moments face à des organisations, institutions et autorités de toutes sortes et de tout niveau. Enfin, sa préoccupation permanente de formation (à travers des séminaires, des conférences) est pour nos organisations une opportunité pour se développer.
Un aspect mécontente néanmoins parfois certains participants. Car ce sont des experts indépendants qui interviennent dans les séminaires sur des thèmes spécifiques, ce ne sont pas des permanents de la CES, ils ne connaissent donc pas vraiment les participants ou l’histoire de leurs organisations.
Par conséquent, le dialogue est beaucoup moins efficace. Participants et experts n’ont pas tant que ça à échanger, un peu comme dans un cours magistral d’université où l’atmosphère générale est « sans âme ». Parfois, même l’organisation générale en souffre, parce que les experts ou les organisateurs traitent malheureusement le séminaire de façon superficielle.
En tant qu’organisation syndicale, comment travaillez-vous avec les entreprises étrangères qui se sont installées en Roumanie ? Les comités d’entreprises européens sont-ils efficaces ?
La plupart des entreprises étrangères qui se sont installées en Roumanie sont contre l’idée même du syndicalisme et menacent leur personnel de licenciement s’il se syndicalise. Certaines entreprises ont des organisations syndicales, mais repoussent indéfiniment la mise en place d’un comité d’entreprise européen. Enfin, quand un comité d’entreprise européen existe, la partie roumaine obtient des représentants, mais pendant les réunions, leurs problèmes sont très souvent négligés.
C’est difficile d’échanger au sein d’une telle organisation. Si les représentants du personnel demandent une réunion avec le management, les représentants du management l’évitent souvent de manière diplomatique, ou bien explicitement. Les problèmes des salariés sont parfois très sérieux dans certaines compagnies : les salaires sont très bas, le temps de travail du week-end n’est jamais compensé de quelque manière que ce soit, les licenciements sont souvent abusifs, les heures de travail dépassent de loin la limite légale ; les conditions de travail ne sont pas sécurisées, etc…
Les syndicats européens perdent des membres chaque année. Quelles sont les réformes que le syndicalisme roumain a connu ces dernières années pour augmenter le nombre de ses affiliés et pour se financer ?
Le syndicalisme roumain n’a pas connu de réforme jusqu’à présent, les syndicats ont la même structure et les mêmes stratégies depuis leur création au début des années 90. Je constate que le syndicalisme ne convient plus aux besoins de la société actuelle, nous essayons d’initier une réforme pour prendre en compte les nouveaux enjeux.
Pour répondre aux exigences du Fonds monétaire international, le gouvernement roumain a mis en place un programme de coupes budgétaires drastique. Quelle est la position des syndicats et ses actions ?
L’austérité décidée par le gouvernement a affecté toute la population sans exception. Les syndicats ont donc organisé des manifestations locales et nationales. Mais le gouvernement a dénigré publiquement ces mobilisations syndicales, dès qu’il en avait la possibilité dans les médias. Et de leur côté, les employeurs ont exercé une pression énorme sur les salariés pour qu’ils renoncent à participer aux manifestations. Cela explique le manque de confiance dans les organisations syndicales et l’absence de réaction de la population. Tous nos espoirs ont été déçus.
Cette situation prouve le déclin du pouvoir syndical. Nous devons nous réformer d’urgence : réorganiser toute la structure, renforcer le mouvement unitaire, modifier le système de financement, offrir de nouveaux services, adapter nos actions aux relations professionnelles actuelles. Dans cette période difficile, la confédération syndicale internationale (CSI-ITUC), la CES et l’organisation internationale du travail (OIT) nous soutiennent.
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