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En 2000, prenant conscience de l’impact du vieillissement démographique, les pays de l’Union Européenne ont ouvert leurs portes à l’immigration du travail avec des résultats plus ou moins satisfaisants.

 

Au 1er janvier 2009, 31, 9 millions de personnes vivaient dans un pays qui n’était pas le leur, soit 6,4 % de la population totale de l’UE. 11,9 millions d’Européens vivent dans un État membre d’adoption. Trois millions de migrants légaux extra-communautaires entrent chaque année en Europe. En nombre absolu et par ordre décroissant, les pays qui accueillent le plus d’étrangers sont l’Allemagne, l’Espagne, le Royaume-Uni, la France et l’Italie. Au total, 75% des étrangers non-européens y vivent.

 

En nombre relatif, les situations sont très variables. Au Luxembourg, les ressortissants étrangers représentent 43,5% de la population ! Les autres pays où la part des étrangers est importante (supérieure à 10% de la population) sont Chypre, l’Espagne, l’Irlande et l’Autriche. La Lettonie, l’Estonie, sont des cas à part, car elles comptent les citoyens russes des anciennes République Soviétiques, qui n’ont pas pris la nationalité du pays.

 

Par ordre d’importance, les Turcs, les Roumains, Marocains, Polonais et Italiens sont les plus nombreux à s’être déracinés (voir le graphique ci-dessous). Ils sont suivis par les Albanais, les Portugais, les Britanniques et les Allemands. Les Turcs sont en tête avec 2.4 millions de ressortissants, 7.5% de tous les étrangers vivant en Europe en 2009. Les 1,9 millions de Roumains représentant 6.2% en 2009, sont six fois plus nombreux qu’en 2001, suivis des Marocains. Chinois et Polonais sont les deux groupes de migrants qui ont le plus fortement augmenté en 2009.

 

Graphique Immigration 3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La géographie des flux migratoires s’est transformée avec la crise. Les soldes migratoires sont devenus négatifs dans les pays jusque là attractifs comme l’Islande et l’Irlande (Eurostat 2009). De même davantage de Lettons, de Lituaniens et de Maltais ont quitté leur pays. Le nombre de nouveaux arrivants a fortement augmenté au Luxembourg, en Belgique, en Italie, en Suisse et en Norvège.

 

 

Intégrer sur les marchés du travail

L’âge moyen de la population étrangère résidant dans l’UE est de 34,3 ans, alors que l’Européen moyen a 39 ans aujourd’hui et en aura 49 en 2050. En 2000, les États européens ont abandonné définitivement l’objectif d’immigration zéro qui prévalait dans les années 1990, pour des raisons économiques et démographiques. Ils soulignent les besoins d’immigration peu qualifiée et très qualifiée qu’ils mettent en regard avec leurs capacités d’accueil. Même si, la migration n’est ni nécessaire ni suffisante pour répondre aux besoins de main d’œuvre ou pallier le déficit démographique de pays vieillissants expliquait déjà en 2007 Yves Chassard.

 

La mise en œuvre de systèmes de quotas à l’échelon européen, par profession, région, ou secteur d’activité, se présente comme la solution pour gérer la pénurie de main d’œuvre. Chaque État définit sa propre législation en accord avec les directives européennes selon sa situation économique. En France, en Allemagne et aux Pays-Bas, les migrants sont par exemple moins éduqués que la moyenne des nationaux, c’est pourquoi ces pays s’efforcent de faire venir des migrants plus qualifiés par des nouveaux dispositifs.

 

Certains pays posent des restrictions d’accès ou donnent des dérogations à des ressortissants de pays « amis ». Ainsi, le 1er mai dernier, l’Allemagne et l’Autriche ont ouvert les dernières restrictions qui s’appliquaient aux travailleurs polonais, tchèques et hongrois.

 

En France,  » les dispositions de l’immigration professionnelle ne concernent pas les ressortissants de l’Union européenne (à l’exception de la Bulgarie et de la Roumanie) ni des pays assimilés (Norvège, Islande, Liechtenstein, Suisse, Andorre, Monaco, Saint Marin) », explique le ministère de l’intérieur. Elles ne s’appliquent pas non plus à l’Algérie dont les ressortissants sont soumis aux dispositions des accords franco-algériens. Entrés dans l’UE en 2007, Les Roumains et les Bulgares encore sont soumis à des dispositions transitoires jusqu’en 2014. La liste des métiers qui leurs sont ouverts est de 150 dans l’hôtellerie, la restauration, l’industrie, le BTP, le médico-social et le nettoyage. Les Roumains très qualifiés sont également bienvenus (cadre financier, informaticien, juriste financier, ingénieur).

  

Concernant les non-européens, la France, la Belgique et le Luxembourg « gâchent leur potentiel économique en leur fermant de nombreux secteurs d’activité », selon l’index européen des politiques d’intégration des migrants (MIPEX: www.mipex.eu), dont les résultats ont été publiés en février dernier.

 

L’Europe a son mot à dire, même si les politiques d’intégration professionnelle relèvent de la subsidiarité, c’est-à-dire des États, voire d’autres échelons, comme les Länder en Allemagne, jugés plus proches du terrain. La marge de manœuvre des États et des collectivités est donc assez large. Sauf que l’Europe finance en partie l’intégration sur le marché du travail par le Fonds européen d’intégration doté de 825 millions d’euros (2007 – 2013).

 

 

La palme de l’intégration revient à la Suède

Cet index dresse un palmarès des politiques d’intégration professionnelle à l’échelle européenne. La Suède en sort au premier rang, suivi du Portugal, des Pays-Bas et de l’Espagne (score entre 84 et 100), devant l’Allemagne (77), loin devant la France (49).

 

L’étude estime qu’entre 2007 et 2010, les immigrés ont bénéficié d’une amélioration de l’accès au marché du travail dans 10 pays d’Europe. Davantage de résidents légaux ont en effet accès à l’emploi et à la formation dans des nouveaux pays d’immigration (Irlande, Espagne, Portugal) et en Europe Centrale (Hongrie, Pologne, Lituanie). Certains pays ont profité de la transposition de directives (liberté de circulation et de prestation de services,  égalité de traitement) pour améliorer leur législation. Des pays d’immigration ancienne ont aussi mis en place des mesures ciblées, qui sont en général peu nombreuses dans tous les pays d’Europe. Les nouveaux arrivants en Autriche et au Danemark vont profiter de nouvelles mesures de soutien, remarque encore le MIPEX.

 

Tous les étrangers n’ont pas le même accès au marché du travail, au système d’éducation et à la sécurité sociale. Seuls les nationaux et les ressortissants communautaires ont les mêmes possibilités dans le secteur public et profitent de meilleures procédures de reconnaissance des diplômes. La plupart des immigrés ont accès aux services publics de l’emploi. Les plus en difficultés sont les femmes et les jeunes. Une fois qu’ils ont trouvé un emploi, les migrants sont sensés avoir les mêmes conditions de travail et possibilités de syndicalisation que les nationaux. Ces travailleurs qui paient leurs impôts sont souvent exclus en partie des systèmes de protection sociale.

 

Les pays qui dépendent nouvellement des migrants (République Tchèque, Italie, Espagne, Portugal) ont tendance a les traiter sur un pied d’égalité, mais ignorent les difficultés spécifiques que rencontrent les personnes nées à l’étranger. L’Estonie et la Roumanie (score 65 et 68), sont les seuls pays d’Europe Centrale qui se préparent vraiment à faire face à leurs futurs besoins en main d’œuvre étrangère.

  

  

Lire aussi

High-Skilled Immigration Policy in Europe, Martin Kahanec (Central European University and IZA), Klaus F. Zimmermann (IZA, DIW Berlin, Bonn University)

 

Foreigners living in the EU are diverse and largely younger than the nationals of the EU Member States – Issue number 45/2010

  

– MIPEX : www.mipex.eu

 

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