6 minutes de lecture

AT Kearney publie un index des délocalisations depuis 2003. Phénomène émergent à l’époque, la délocalisation d’activités est désormais parfaitement intégrée aux stratégies d’entreprise. La part de la valeur créée à l’étranger augmente sans cesse. Mais la crise est passée par là, certains pays en ont pâti, d’autres en ont profité. La géographie des délocalisations connaît une nouvelle mutation.

carte devlpnt

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les tendances et incertitudes qui affectent la géographie économique du monde

La production et la consommation se déplacent des pays développés vers les pays émergents.
Le FMI prévoit une croissance de 6,4% dans les pays émergents en 2011 et de 2,2% dans les pays développés. Le différentiel de croissance va perdurer, ce qui permet aux émergents d’accélérer le développement de leurs industries manufacturières mais aussi, fait plus récent, du secteur des services dans lequel certains pays se spécialisent. Ils vont dorénavant faire des offres globales de services, notamment dans le secteur des technologies de l’information. Les entreprises occidentales ne vont plus seulement externaliser des activités de bout de chaîne aux armées de programmeurs indiens ou chinois, elles vont pouvoir sous-traiter des processus de gestion complets.

 

La globalisation des services recèle un gigantesque potentiel inexploité

Les pays émergents sont devenus en quelques années des puissances industrielles, on peut s’attendre à un essor identique pour le secteur des services. Les échanges de services entre pays développés et pays émergents vont augmenter rapidement et « avec le temps les controverses sur les pertes d’emplois dues aux délocalisations devraient s’amenuiser (AK) ». Les évolutions démographiques vont également accélérer le processus. « Les pays développés devront choisir entre libéralisation de l’immigration et achat de biens et services produits ailleurs (AK) ». Les jeunes générations d’Inde et d’Egypte (quand le pays retrouvera stabilité et croissance) sont bien placées pour proposer leurs services aux nations vieillissantes.

 

La guerre des monnaies et des taux de change pourrait durer

Une incertitude qui pèse sur l’avenir du marché globalisé. Ce problème mondial suscite bien des débats mais aucune solution ne recueille un début de consensus. AT Kearney déplore l’absence d’une organisation internationale institutionnalisée qui seule pourrait résoudre cette question cruciale, notamment pour l’Europe.

 

Les stratégies économiques des pays développés divergent, ce qui rend également l’avenir incertain

La Grande Bretagne poursuit une politique d’austérité drastique (notamment fiscale), alors que les Etats-Unis n’arrivent pas à opter entre augmentation des impôts pour diminuer la dette ou maintien des stimuli de croissance. Ce sont les deux nations qui délocalisent le plus et qui donc ont la plus grande influence sur le marché globalisé des produits et des services. Quant à l’Europe, sa situation économique est précarisée par les dettes souveraines et la division des Etats membres qui obère le long terme. L’OCDE prévoit sur le continent européen des sorties de crise très variables et « pour les entreprises qui s’en sortiront, une recherche de compétitivité qui les conduira à poursuivre les délocalisations même si les opinions publiques y sont de plus en plus hostiles (AK) ».

Faits marquants de l’index 2011 des délocalisations

L’index établit un classement des 50 premiers pays d’accueil des délocalisations. Le score de chaque pays est pondéré en fonction de trois catégories de facteurs : attractivité financière, qualification de la main d’œuvre et environnement économique.

delocalisation a

L’Inde, la Chine et la Malaisie conservent les trois premières places de l’index depuis sa création. La crise a pourtant bouleversé le classement. Les changements de structure salariale (baisse des salaires et des charges) et de taux de change des monnaies, ont renforcé l’attractivité de certains pays et en ont fragilisé d’autres. Les pays baltes, la Grande Bretagne, la Pologne, le Mexique et l’Egypte (jusqu’à la révolution) ont amélioré leurs scores.

delocalisation b

 

En Europe, ce sont les pays hors zone euro qui deviennent attractifs. Estonie, Lettonie, Lituanie ont diminué de 35% le salaire moyen et réalisé des coupes drastiques dans leurs dépenses publiques et privées. Leur nouvelle compétitivité a déjà des résultats, la Grande Bretagne et les Etats-Unis s’y sont installés. La Pologne grimpe aussi de la 24ème à la 15e place. La France, l’Irlande, Le Portugal chutent. La Grèce et l’Italie ne figurent pas dans le classement. En Grande Bretagne, le premier ministre tente actuellement d’échanger avec l’Inde la délocalisation d’emplois high tech britanniques contre des investissements indiens en Grande Bretagne. Le solde d’emplois pour la Grande Bretagne risque pourtant de rester négatif.

 

Les délocalisations américaines ont ralenti pendant la crise. AT Kearney n’y voit pas une tendance durable, les délocalisations vont reprendre. Les Etats Unis sont actuellement confrontés à une opinion très hostile aux délocalisations, d’autant que le taux de chômage reste élevé. « Si certaines délocalisations ont été reportées, dès que la situation économique s’améliorera, les délocalisations seront inévitables (AT) », même si l’attractivité de certaines régions des Etats-Unis permettra quelques relocalisations.

 

En Amérique latine, les échanges avec les Etats Unis vont croître. Le Brésil excelle dans les technologies de l’information, Le Mexique devient un sous traitant pour de multiples activités. Le Chili devient une niche pour la recherche développement.

 

On l’a vu, l’Asie détient les premières places du classement. L’Inde, la Chine et la Malaisie offrent une main d’œuvre disponible quelle que soit le type d’activité délocalisée.

L’Afrique du Nord et le Moyen Orient sont des régions privilégiées pour les délocalisations européennes, l’Egypte est ainsi devenue le quatrième pays d’accueil des activités externalisées, mais l’incertitude politique qui affecte la région aura des conséquences importantes.

La crise n’a pas fini de redistribuer les cartes de la géographie économique du monde, les débats sur la « démondialisation » vont se poursuivre, les délocalisations continueront à être dénoncées comme responsables du chômage mais « n’espérez pas qu’elles vont s’arrêter. De fait, le plein potentiel de la globalisation est prêt à être exploité (AK) ».

 

Rapport d’AT Kearney : index des délocalisations

 

 

Print Friendly, PDF & Email
+ posts