par Henri Bourillon
La loi du 4 mai 2004 a été une timide étape dans la voie de la rénovation du dialogue social en révisant la hiérarchie des normes conventionnelles, en définissant de nouvelles règles de conclusion des accords collectifs (le principe majoritaire) et en encadrant les conditions de négociation en l’absence de délégués syndicaux et en faisant une ouverture relative concernant le dialogue social territorial. Les rapports Chertier et Hadas-Lebel sur des sujets différents font des propositions pour certaines plus radicales.
Le rapport Hadas-Lebel pointe principalement quatre sujets : la représentativité des organisations syndicales allant jusqu’à proposer une élection de représentativité par branche ; la validité des accords de la négociation collective, en renversant le schéma actuel (le principe majoritaire, c’est-à-dire une opposition majoritaire en nombre d’organisations syndicales) au profit de la majorité d’engagement (les organisations syndicales signataires, doivent représenter plus de 50 % des suffrages exprimés) ; la négociation dans les très petites entreprises avec la proposition d’une instance mixte de dialogue et de négociation dans les entreprises de moins de 200 salariés à titre expérimental et, enfin, le financement des organisations syndicales.
Ces propositions ont peu de chances d’aboutir, que ce soit l’augmentation du crédit d’impôt, des subventions publiques ou une cotisation des entreprises.
Le rapport Chertier s’intéresse aux modalités du dialogue social, il propose principalement les pistes de réforme suivantes : une simplification des instances nationales de concertation et une autre articulation du dialogue entre les partenaires sociaux et le politique par l’établissement d’un agenda de réforme partagé et par la réservation avant toute réforme d’un temps laissé à la négociation et à la concertation. Il semble que le gouvernement souhaite rapidement prendre en compte certaines propositions avant les élections présidentielles. La simplification des instances nationales de concertation est peu « coûteuse » et ne devrait pas provoquer de débat et, dans l’après CPE, une mesure plus ambitieuse avec la mise en place d’un temps préalable laissé à la concertation et à la négociation.
Le temps des élections n’est pas un temps propice à la mise en place de réformes structurelles aussi cruciales pour l’avenir du pays que celles concernant la réforme du dialogue social. Les questions de critères de représentativité, de modes de financement, de modalités de négociation dans les PME, de conditions de validité des accords, de la représentativité des organisations patronales sont pourtant décisives dans la perspective d’une rénovation du dialogue social, elles n’ont pas été retenues dans les propositions de réforme par le gouvernement.
Il faut craindre que cette question fondamentale du renouveau du dialogue social ne soit pas débattue au cours de la présidentielle et que ces rapports perdent leur actualité et ne se retrouvent bien rangés au fond d’un tiroir… jusqu’au prochain rapport… qui débutera invariablement par le constat du déclin renforcé de la représentativité syndicale. Autrement dit, « pendant les travaux, la vente continue ». Indépendamment de ce que peut l’Etat pour le syndicalisme, on pourrait aussi attendre des organisations syndicales qu’elles ouvrent le chantier de leur rénovation…
Henri Bourillon
Pour aller plus loin :
Rapport Chertier
ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/064000351
Rapport Hadas-Lebel
ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/064000364
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