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Que sont devenus les financiers de la City qui partaient avec leurs cartons sous le bras après avoir appris leur licenciement par email ? Un sur deux n’est jamais revenu. Pourtant, les Britanniques croient toujours à la finance et à la main invisible.

GB

Ou plutôt, ils sont dans l’expectative. Gordon Brown doit annoncer le détail du nouveau budget à la fin du mois de mars, mais rien n’a encore filtré. L’orientation politique va dépendre des élections du mois de mai. Les annonces de campagne électorale sont « prudentes », car tout le monde sait que les décisions seront « douloureuses » explique Andrea Broughton de l’IES (institute for employment studies).

L’économie anglaise est toujours dans une situation très mauvaise. L’Etat a fait très peu pour stimuler l’économie. « D’ailleurs ce n’est pas vraiment dans notre culture, explique l’économiste. Les Britanniques sont inquiets, mais pragmatiques et croient au rétablissement économique naturel. Les dernières crises (2001 et 1993) sont passées, celle-ci passera aussi, espèrent-ils ».

 

Regain de conflictualité

Le taux de chômage a doublé entre septembre 2008 et septembre 2009 (7,8%), revenant à son niveau de… 1971. Il est stable depuis. Le secteur financier accuse 50% des pertes d’emploi. Le secteur public qui avait embauché 300 000 personnes au cours des années Blair (1997-2007) commence à licencier. Les politiques de l’emploi n’ont pas vraiment amorti la hausse du chômage selon Florence Lefresne de l’IRES. « La confédération patronale a tenté de mettre en place le chômage partiel, financé à part égale avec l’Etat et l’employeur ». Andrea Broughton confirme que « c’est très rare, ça peut aider à sauver des emplois, et maintenir des personnes dans les entreprises, mais ça va contre la mentalité britannique… »

Florence Lefresne insiste a contrario sur la perception sociale de la crise, qui dénote d’un changement de mentalité. « Jusqu’alors les licenciements étaient plutôt bien acceptés, mais avec la perspective du retour au pouvoir des conservateurs, les Britanniques ont le sentiment que leur marge de manoeuvre va se réduire, alors que l’ajustement se fait déjà par le sacrifice des salariés ». Peu de conflits ont éclaté pour le moment, hormis dans certains secteurs : transport, énergie (Total) et automobile. « Le regain de conflictualité se manifeste par des occupations d’usine, à cause du non-respect d’accords collectif ou bien des annonces de licenciement ». L’agence de notation Moody’s avançait mi-décembre que des troubles sociaux risquaient d’éclater courant 2010 suite aux coupes budgétaires visant à résorber le déficit public.

 

Wait and see

La crise n’affecte pas tout le monde de la même manière argumente Andrea Broughton. « Ceux qui ont la chance d’avoir un emploi, ont parfois accepté des gels ou des baisses de salaire (1/3 dans le secteur privé). Mais, ils se consolent (ou se réjouissent) avec la baisse des taux d’intérêt sur leurs prêts immobiliers. Ceux qui n’ont plus d’emploi s’inquiètent surtout parce que l’indemnisation-chômage est extrêmement faible ». Elle n’est pas indexée sur le salaire et équivaut à 200€ par mois pour une durée très courte. « Dans les séminaires sur les restructurations, que j’anime partout dans le pays, je ne note pas de mouvement de protestation majeure, pourtant dans les régions du Nord, il y a peu d’alternative pour trouver un nouvel emploi, contrairement à la région de Londres et dans le Sud-Est ».

Les Britanniques attendent donc le mois de mai, en se disant que pour l’instant la dévaluation de la Livre (d’un quart!) et les attaques sur l’Euro (de la City notamment) bénéficient à leurs exportations. Jusqu’ici tout va bien.

 

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