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Nouvelle loi du travail controversée au Venezuela « bolivarien »

publié le 2012-05-29

Voilà près de 14 ans que la « révolution bolivarienne » suit son cours au Venezuela. Initiée en 1998 avec l’arrivée au pouvoir d’Hugo Chávez, elle suscite depuis lors des réactions tantôt enthousiastes, tantôt hostiles.  Après 3 ans de consultation, une nouvelle « Loi organique du travail » vient d’être promulguée. Si les avis divergent sur l’effet de certaines dispositions, ils s’accordent pour considérer qu’elle bouleverse les relations de travail.

point d'interrogation

Pour le gouvernement d’Hugo Chávez, cela ne fait aucun doute. La nouvelle « Loi organique du travail » adoptée le 1er mai 2012 constitue « a première loi de transition vers le socialisme ». Elle est le fruit de 3 ans de consultation, qui ont permis de recueillir pas moins de 19 000 propositions de la part d’organisations diverses, à 90% émanant des travailleurs eux-mêmes. Comme souvent au Venezuela, les avis concernant ce nouvel épisode de la « révolution bolivarienne » sont tranchés. Le texte s’inscrit néanmoins dans une tendance plus large à la recherche d’alternatives dans une région marquée par plusieurs décennies de réformes structurelles.

La loi revient ainsi sur des mesures d’inspirations néolibérales prises durant les années 90 sous la pression du FMI. Celles-ci avaient mis à mal la législation sociale héritée de 1936, au nom d’ajustements structurels jugés nécessaires dans l’ensemble de la région. Le principe de la double indemnisation fait ainsi son grand retour. Ce dernier consacre l’obligation, pour un employeur suspecté de licenciement injustifié, de payer le double des indemnités normalement prévues. La nouvelle loi interdit également la sous-traitance, une pratique étroitement identifiée au « consensus de Washington ». Et puis citons aussi l’augmentation du salaire minimum, qui devient ainsi l’un des plus élevés de la région.


Vers le « socialisme du 21ème siècle »

Mais la nouvelle loi ambitionne également de contribuer à l’avènement d’un « socialisme du 21ème siècle », présenté depuis 2005 comme l’objectif ultime de la révolution bolivarienne. On y trouve ainsi la volonté de réduire progressivement le temps de travail (avec passage immédiat de la semaine de 44h à 40h), mais surtout la mise en place de dispositifs de contrôle ouvrier sur l’entreprise. Parmi ceux-ci, le rôle des futurs conseils de travailleurs est une inconnue de taille. La Loi les institue pour « promouvoir la participation des travailleurs et de la communauté vivant autour des lieux de travail dans la gestion de l’entreprise », mais leurs prérogatives exactes doivent encore faire l’objet d’une loi spéciale. Craignant un effet d’annonce, la plupart des associations impliquées dans l’élaboration du texte ont donc appelé à la vigilance.

La présidentielle en ligne de mire
De son côté, l’opposition vénézuélienne dénonce d’ailleurs volontiers une manœuvre électoraliste, à quelques mois d’un scrutin qui verra le Président briguer un troisième mandat. Affaibli par un cancer, Hugo Chávez reste pour l’instant en tête des sondages. Ses adversaires se sont pourtant entendus sur une candidature unique, celle du jeune Gouverneur de Miranda Henrique Capriles, une première depuis les débuts du Chavisme. Dans ce contexte, le passage d’une Loi qui bénéficie de 80% d’opinion favorable dans la population pourrait effectivement contribuer à consolider l’avance du commandante… Mais pour le patronat vénézuélien, ce serait au risque de nuire à la compétitivité de l’industrie nationale. La principale chambre de commerce du pays considère d’ailleurs que la survie de nombreuses PME est menacée par ces mesures dont elles seront incapables de supporter le coût.

La liste des pays engagés dans des processus plus ou moins ambitieux de réformes sociales s’allonge depuis quelques temps. La Bolivie, l’Équateur, l’Argentine ou encore le Pérou vivent des transformations similaires.

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