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par Amparo Grau, traduit de l’anglais par Eva Quéméré

L’Espagne va retourner aux urnes en juin pour de nouvelles élections législatives. Les différents partis politiques, dont les deux « nouveaux », Podemos et Ciudadanos, n’ayant pas trouvé d’accord permettant la mise en place d’une majorité. Ou comment faire aller la démocratie traditionnelle avec la nouveauté des souhaits des citoyens. Mais où en est l’Espagne économique et sociale après la crise et des années de strictes politiques budgétaires ? Les indicateurs du dernier Rapport de l’OCDE montrent du mieux… (OECD Economic Surveys: Spain 2014, OECD Publishing, Paris, 2014). Mais quelles seront les conséquences structurelles qui demeureront, par exemple la tendance à l’allongement des durées d’études par crainte d’entrer sur le marché du travail… Quelques données chiffrées :

 

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Alors que l’économie espagnole revenait à une croissance modérée à la suite d’une récession prolongée et que le rendement des obligations souveraines était brutalement tombé, les objectifs clés selon l’OCDE étaient de reconstruire sur des réalisations passées pour améliorer la croissance et réduire de façon significative le chômage – au travers de gains de productivité soutenables et d’une meilleure compétitivité – ainsi que la réduction de la dette extérieure.

 

Au 4e trimestre de 2015, les indicateurs de confiance – y compris sectoriels et des consommateurs – ainsi que l’indice de confiance globale, se sont améliorés par rapport au trimestre précédent. De plus, d’après le nombre d’affiliés à la Sécurité sociale, la création d’emplois s’est accélérée.

 

La croissance estimée du PIB pour cette période est de 0,8%, ce qui veut dire qu’il a été maintenu par rapport à la période précédente. La demande intérieure a contribué à 3,4 points de la croissance du PIB, alors que les exportations nettes l’ont diminué de 0,2 %. La croissance du PIB pour 2016 est, elle, estimée à 2,7%, sans changement depuis la période précédente.

 

L’indice de production industrielle (IPI), déjà trop faible lors du 3e trimestre, s’est maintenu au 4e. Ceci est plus visible dans l’indice général que dans celui de l’industrie à cause de la tendance négative du secteur de l’énergie. Ainsi, les estimations de croissance de l’IPI, dans son ensemble, pour 2015 étaient de 3,3% pour retomber, en 2016, à 3,1%.

 

Le nombre d’affiliés à la sécurité sociale a augmenté de 3,2% sur toute l’année 2015, représentant 530 000 nouveaux affiliés. D’après les chiffres des comptes nationaux, le nombre d’emplois équivalent temps plein a augmenté de 3,0% l’an passé tandis que les prévisions pour 2016 ont été coupées d’un dixième ramenant alors cette croissance à 2,4%.

 

La tendance des comptes du gouvernement central suggère qu’ils devraient rencontrer leurs objectifs en matière de déficit. Toutefois, ce n’est ni le cas du système de sécurité sociale ni des régions autonomes. Par conséquent, les estimations du déficit public – à 4,7% du PIB – sont supérieures aux objectifs. Pour 2016, ces prévisions sont inchangées et restent supérieures aux objectifs à 3,3%. Les personnes interrogées sont divisées entre ceux qui considèrent que la politique budgétaire devrait être expansionniste par rapport à l’état de l’économie espagnole, et ceux qui estiment qu’elle devrait être neutre (ceux-ci représentant la majorité). Concernant la politique monétaire, la majorité estime qu’elle est en faveur des liquidités, et que c’est la position appropriée.

 

Selon les données du sondage sur la population active publié par Eurostat, la croissance de l’emploi espagnol a dépassé la moyenne de la zone Euro (EA-18) depuis le deuxième trimestre de 2014, menant alors le classement des pays de l’Union européenne depuis le quatrième trimestre de cette année. La croissance de l’emploi a été particulièrement élevée chez les jeunes travailleurs migrants de sexe masculin (16-29 ans). Entre 2014 et 2015 la croissance du taux d’emploi était en revanche beaucoup plus faible chez les jeunes espagnols, ceci suggérant une préférence à poursuivre les études plutôt que de se précipiter sur le marché du travail. Ayant connu une baisse moins radicale au cours de la crise, le taux d’emploi des femmes a, lui, moins augmenté que celui des hommes.

 

En 2014, 29,2% des habitants étaient considérés comme à risque de pauvreté ou d’exclusion. Ce risque avait fortement augmenté pendant la crise chez les personnes de moins de 65 ans mais diminué parmi la population âgée. En effet, l’Espagne se classe parmi les pays au plus faible taux d’AROPE pour ce groupe. Mais elle fait pâle figure au vue des premiers et troisièmes indicateurs (distribution de revenu et intensité de travail). Toutefois, ses performances concernant les privations matérielles sont moins négatives. En effet, l’important taux de dénuement matériel (7,1% en 2015) a constamment été inférieur à la moyenne de l’UE.

 

La réduction de la dette des secteurs publics et privés, l’amélioration des politiques du marché du travail ainsi que des réformes sur le secteur environnemental restent souhaitables. Comme l’OCDE l’a recommandé, il serait bon de renforcer les politiques actives du marché du travail en améliorant les formations professionnelles. Elle recommande aussi d’améliorer les capacités et l’efficacité du service public de l’emploi en renforçant la coordination entre les différents niveaux administratifs (les entreprises soufrant d’un cadre réglementaire régional fragmenté). Enfin, l’OCDE conseille de poursuivre les bonnes politiques de développement durable déjà mises en place.

 

Pour en savoir plus :

– Amparo Grau est Professeur à l’Université Complutense de Madrid

– BBVA Research Observatorio Económico España: el ritmo de crecimiento se mantiene al arranque de 2016, 10 de marzo 2016.

– Funcas Economic Trends and Statistics Department (2016): « Spanish economic forecasts panel: January 2016« , Spanish Economic and Financial Outlook, SEFO FUNCAS, Vol.5, No.1, 2016 [version électronique consultable en ligne]. The Spanish Economic Forecasts Panel est une enquête dirigée par Funcas qui consulte les 16 départements d’analyse. Les prévisions du gouvernement espagnol, la Banque d’Espagne, et les principales organisations internationales sont également inclus à titre de comparaison, mais ne font pas partie de la prévision de consensus

– Gual, J.: CaixaBank Research (2015): Informe mensual IM12, No. 396, Diciembre de 2015.

– Herce, J.A. (2016): « The impact of ageing on the Spanish economy », Spanish Economic and Financial Outlook, SEFO FUNCAS, Vol.5, No.1, 2016, p. 49.

– Montoriol-Garriga, J.: Economía española: nuevos retos, Cuadernos de Información Económica Departamento de Macroeconomía, Área de Planificación Estratégica y Estudios, CaixaBank, 250, enero-febrero 2016 p.V -VI

 

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