L’allocation logement (AL) est une composante importante de la politique du logement et de la politique sociale, c’est un sujet sensible. Les projets de revenu universel d’activité (RUA) proposent de la fusionner avec d’autres prestations notamment le RSA et la Prime d’activité (PA). Un grand chamboulement aux enjeux importants.
Dans un premier temps, nous rappellerons la place prise progressivement par l’AL dans la politique du logement, dans les mécanismes de redistribution et comment les contraintes budgétaires ont conduit à procéder à un recentrage social. Ensuite quelques mots sur son mode de calcul qui explique comment cette allocation intervient et s’articule aujourd’hui avec le RSA et la Prime d’activité. Une fois ces préalables apportés, nous exposerons quelques pistes envisagées pour fusionner l’AL dans le futur Revenu Universel et décrirons les enjeux de ce projet de réforme.
L’Allocation Logement : rappel
Sous le terme d’AL, on désigne des aides personnelles apportées pour payer son logement principal, que l’on soit locataire ou accédant à la propriété. Cette aide est attribuée sous condition de ressources.
C’est une aide ancienne. Dès 1948, il existait une allocation logement qui était une prestation familiale. Progressivement, celle-ci a été étendue à différentes catégories (les personnes seules ou jeunes couples sans enfant, étudiants, etc.) pour permettre aux ménages modestes de payer leur loyer voire pour aider les accédants à la propriété à rembourser leurs prêts.
La réforme de 1977 (dite Raymond Barre) a renforcé son rôle pour pouvoir réduire le budget des aides à la pierre qui permettaient de construire un parc de logements à loyer maîtrisé. L’hypothèse sous-jacente était que l’enrichissement de la société devait permettre à l’essentiel des ménages d’avoir les moyens de payer pour leur logement et que seule une petite minorité aurait besoin de cette allocation qui devait à terme devenir résiduelle.
Cette hypothèse s’est révélée fausse. Différentes réformes de cette allocation ont élargi son champ d’application, mais, pour éviter une « explosion » des dépenses, des modifications successives des modalités de mise en œuvre ont été apportées. Ainsi le niveau du revenu au-delà duquel l’AL n’est plus versée, est passé, pour une personne isolée, de 2,4 SMIC en 1977 à 1 SMIC.
De nombreux ajustements paramétriques ont été introduits pour recentrer cette aide sur des populations de plus en plus pauvres d’où une formule de calcul complexe et relativement illisible.
Les dernières mesures d’économies proviennent du gouvernement actuel avec successivement la diminution autoritaire de 5 € et surtout (loi de finances 2018) la réduction du loyer de solidarité (RLS) qui a fortement impacté les bailleurs sociaux. Il faut en rappeler le principe : c’est un dispositif destiné aux foyers à faibles revenus occupant un logement social. La RLS a pour but de faire diminuer le coût du loyer initial (par exemple de 32,33 € pour un bénéficiaire isolé en région Ile-de-France) et, ipso facto, le montant de l’AL. Le montant de la RLS est défini en fonction de la taille du ménage et de sa zone d’habitation, la réduction de l’AL est de 98 % de la RLS. L’économie attendue pour le budget des AL était de 800 millions en 2019 et de 1,5 milliard en 2020.
Mais comme cette mesure mettait en péril les bailleurs qui logent beaucoup de bénéficiaires de l’AL (donc proportionnellement un grand nombre de familles à faible revenu), il a fallu imaginer un mécanisme compensateur concernant tous les bailleurs sociaux. Le résultat est que cette économie du budget des AL est en réalité financée par une sorte de taxe de l’ordre de 5 % sur montant des loyers perçus par les bailleurs sociaux. Ceci a incontestablement affaibli ces acteurs à un moment où la demande de logements sociaux n’a jamais été aussi haute.
Aujourd’hui, les montants annuels versés pour les AL sont de l’ordre de 17 Mds d’€ pour 6 479 000 allocataires correspondant à 13 489 000 personnes (chiffres 2016). Ces montants sont à comparer aux 25 Mds d’€ pour les autres minimas sociaux : le revenu de solidarité active (RSA) 11 Mds), l’allocation de solidarité spécifique (ASS) 2.7 Mds, l’allocation adulte handicapé (AAH) 9,1 Mds, l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) 2.5 Mds).
Les AL ont un effet redistributif très important : elles représentent 14 % des ressources des ménages pauvres.
Le mode de calcul de l’Allocation Logement
Les modalités de mise en œuvre (conditions, calcul) sont d’une grande complexité. Le manuel d’« Eléments de calcul des aides personnelles au logement » est un document d’une centaine de pages ! Heureusement, il y a, sur le site de la CAF, un outil de simulation.
Pour simplifier, le montant de l’AL est égal à la différence entre le loyer plafonné augmenté d’un forfait pour charges moins une contribution composée d’une somme égale à 8,5 % du loyer et d’une somme complémentaire proportionnelle au revenu du ménage. Les paramètres de calcul dépendent de la composition du ménage et de sa zone d’habitation.
Le calcul de l’AL intègre une partie du loyer et des charges. Plus précisément, ce qui est pris en compte est un loyer plafonné et pour les charges, il s’agit d’un forfait dont le montant est largement inférieur au montant des charges réelles supportées par le ménage. Pour donner un exemple, pour une personne seule dans la région Ile-de-France, le plafond de loyer est de l’ordre de 300 € et le forfait charge de 53 €. La part de loyer supérieure à cette somme (ce qui est pratiquement toujours le cas pour les locataires du privé) n’est pas prise en compte dans le calcul de l’AL. Depuis 2016, il existe même un loyer au-delà duquel l’AL diminue à partir de 995 € (pour une personne seule) jusqu’à être supprimée pour un loyer de 1171 €. |
Ce qu’on peut retenir :
- Le montant de l’AL croit avec le loyer tant que celui-ci est inférieur au loyer plafond (qui dépend de la composition du ménage et de son lieu d’habitation).
- Pour un montant donné du loyer, l’AL ne dépend pas du revenu : elle est constante tant que celui-ci est inférieur à un certain revenu pivot puis elle décroît rapidement jusqu’au revenu d’exclusion au-delà duquel on ne peut être éligible à cette prestation.
On peut donc assimiler l’AL à un impôt négatif à deux tranches ; il dépend de la taille de la famille.
L’AL joue un rôle positif joué dans la prévention des risques d’impayés ou de certaines formes de mal-logement (surpeuplement accentué ou logement indigne ou insalubre), car les bailleurs sociaux ont la possibilité de la percevoir directement par un mécanisme de subrogation : ils le font systématiquement. Les locataires n’ont plus qu’à payer un loyer résiduel qui, pour les populations démunies, peut être très faible. Cela diminue d’autant les risques d’impayés, d’accumulation de dettes locatives et d’expulsions.
Articulation actuelle avec le RSA et la Prime d’activité
L’AL est une allocation ancienne. Avec la montée de certaines formes de pauvreté, il a fallu introduire le RMI (1988) puis le RSA (2009) et le RSA-activité pour « favoriser » la reprise d’activité. Pour assurer un complément de revenu aux personnes qui occupent un emploi à faible revenu, la prime pour l’emploi a été créée en 2001. Elle vient d’être fusionnée avec la RSA-activité pour donner la prime d’activité (2016).
Il se pose inévitablement des problèmes d’articulation entre ces dispositifs engendrés par leurs règles d’attribution et leur calcul. L’AL, pour certaines plages de revenu, décroît fortement quand le revenu augmente. Symétriquement, le RSA est une allocation différentielle dont le montant diminue avec tout ou partie d’autres ressources.
Il est apparu, surtout avec le RSA activité, que travailler plus ne rapportait pas grand-chose sous l’effet cumulé de la réduction de l’AL et de la réduction du RSA. D’une manière générale, pour d’autres prestations comme l’allocation adulte handicapé (AAH), l’allocation de solidarité spécifique (ASS), il y a des situations où travailler plus conduit à gagner moins.
La mise en œuvre de la prime d’activité a corrigé en grande partie ces effets regrettables.
Aujourd’hui les règles sont les suivantes :
- Pour le RSA, c’est une allocation destinée aux personnes sans ressources ou avec de faibles ressources. C’est une allocation différentielle destinée à garantir un revenu minimal. Pour une personne, ce revenu minimal est de 559,74 € en 2019. Le montant du RSA est calculé de la manière suivante :Rsa = (montant forfaitaire) — (autres ressources du foyer + forfait logement). On compte parmi les ressources la plupart des prestations familiales.Il a fallu définir comment on déduit la ressource procurée par l’aide au logement. La règle prise a été de déduire un forfait logement dont le montant dépend de la composition du ménage : son montant est de 66,17 € pour une personne seule.Ainsi, pour une personne seule sans activité, le montant versé de RSA est égal à :559,74 €-66,17 €= 493,57 €, sachant qu’elle perçoit une allocation logement dont le montant n’est pas impacté de son revenu RSA.
- Pour la Prime d’activité, il s’agit de compléter le revenu de tous ceux qui tirent un faible revenu de leur activité (salarié ou en indépendant). La formule de calcul est la suivante : Montant de la prime d’activité = (montant forfaitaire éventuellement majoré + 61 % des revenus professionnels + bonifications individuelles) — les ressources prises en compte du foyer.Le montant forfaitaire est plus ou moins similaire au RSA selon la situation familiale, il sert de base de calcul de la prime activité. A compter d’octobre 2018, il est de 551,51 euros auquel on rajoute une majoration selon le nombre de personnes présentes dans le foyer.Les prestations sociales (aide au logement, allocations familiales) sont intégrées aux ressources du foyer.A l’image du calcul du RSA, un forfait AL est appliqué pour les personnes percevant l’aide au logement (locataire et propriétaire) ainsi que pour les personnes hébergées à titre gratuit. Il dépend uniquement de la composition de la famille afin de rendre le calcul plus équitable.
Le résultat
Une étude de la DREES de 2019 sur « La combinaison des prestations et ses effets sur le niveau de vie » explique comment tout cela fonctionne en théorie.
Le graphique suivant permet de voir comment ces différents dispositifs s’articulent aujourd’hui, pour une personne seule avec la progression de ses revenus d’activité. Plus précisément il s’agit d’une personne seule dont le montant du loyer est égal ou supérieur au plafond de loyer, ce qui permet de recevoir un maximum d’AL.
On lit clairement comment les différents dispositifs « s’empilent » successivement au fur et à mesure que les revenus d’activité s’accroissent. Tour à tour, leurs contributions au revenu disponible évoluent et finissent par s’éteindre. On pourra lire dans l’encadré ci-dessous emprunté à cette étude un commentaire détaillé. Pas simple !
Ainsi, pour cette personne, son revenu disponible augmente avec son revenu d’activité (à une exception près). Depuis le point de départ (c’est-à-dire aucun revenu) jusqu’à 1,5 SMIC (seuil à partir duquel il n’y a plus d’aide, mais où l’imposition à l’impôt sur le revenu démarre), en moyenne, 1 € supplémentaire gagné permet d’accroître son revenu disponible de 0,57 €. Mais ce taux d’accroissement est variable comme le décrit le commentaire dans l’encadré.
Une personne seule sans revenu d’activité perçoit 767 euros mensuels grâce au RSA et aux aides au logement Une personne seule sans revenu d’activité et locataire de son logement bénéficie de 767 euros mensuels de prestations, soit 498 euros de RSA (y compris 13 euros de prime de Noël, en moyenne dans l’année) et 269 euros d’allocations logement. Avec un revenu d’activité égal à un SMIC net (soit 1 204 euros mensuels), une personne seule perçoit 241 euros mensuels au titre des prestations sociales grâce à la prime d’activité. Ses ressources atteignent donc 1 445 euros mensuels. Entre ces deux niveaux, le revenu disponible augmente globalement avec le revenu d’activité. Jusqu’à environ 40 % du SMIC net, toute hausse du revenu d’activité est entièrement compensée par une baisse du montant du RSA ; la prime d’activité augmente alors que l’allocation logement reste constante, égale à 269 euros mensuels. Le revenu disponible croît alors de 0,61 euro lorsque les revenus d’activité augmentent de 1 euro. Un point d’inflexion important se situe un peu au-dessus de 40 % du SMIC net, seuil à partir duquel les allocations logement et la prime d’activité diminuent, alors que le RSA n’est plus versé. Dans cette situation, et dans celle-ci seulement, un accroissement du revenu d’activité peut entraîner une légère baisse du revenu disponible. Cette baisse reste toutefois modérée : elle est de 26 euros pour un revenu d’activité passant de 40 % à 43 % du SMIC.À partir de ce seuil, le revenu disponible redevient croissant avec le revenu d’activité, mais à un rythme moindre. A partir du seuil de 50 % du SMIC, le revenu disponible augmente plus vite en raison du bonus de la prime d’activité : 1 euro de revenu d’activité supplémentaire conduit à une hausse de 0,5 euro du revenu disponible. Il augmente encore plus vite à partir de 85 % du SMIC, et ce jusqu’à 100 % du SMIC, en raison du forfait logement pris en compte dans la base ressources de la prime d’activité : le revenu disponible croît de 0,84 euro lorsque les revenus d’activité augmentent de 1 euro. L’allocation logement n’est plus versée pour des revenus d’activité supérieurs à un SMIC, les prélèvements de l’impôt sur le revenu commencent à partir de 1,15 SMIC environ et le montant de la prime d’activité s’annule dès 1,5 SMIC. Entre 1 et 1,5 SMIC, pour chaque euro de revenu d’activité supplémentaire, l’augmentation du revenu disponible est moins importante : elle varie de 0,30 à 0,58 euro. Au-delà de 1,5 SMIC, l’impôt sur le revenu constitue l’unique dispositif de redistribution — parmi ceux étudiés ici — et 1 euro de revenu d’activité supplémentaire engendre une hausse comprise entre 0,64 et 0,87 euro du revenu disponible. |
Faut-il intégrer l’AL dans le futur Revenu universel d’activité ?
Quels sont les arguments qui plaident pour cette réforme ?
On peut distinguer ceux qui justifient la création d’un revenu universel et ceux qui concernent plus spécifiquement l’AL. L’accumulation des dispositifs fait que l’ensemble est devenu illisible, générant des taux de non-recours trop importants. Il y a donc une volonté forte de simplification.
Cette multiplicité des aides qui se cumulent peut nourrir un sentiment d’injustice pour ceux qui en sont exclus tout en ayant, par leur travail, des ressources modestes.
La question de l’activité et du travail est une problématique importante et la réforme vise à réduire voire à éliminer les situations « où le travail ne paie pas ». L’objectif affirmé est que le travail doit payer et de la même façon dans tous les cas.
Enfin, l’équation se complique quand on veut obtenir un dispositif qui permette de lutter contre la pauvreté avec des contraintes budgétaires fortes.
On le voit dans le cas de l’AL pour laquelle s’est exprimée une claire volonté d’économiser sur les sommes consacrées aux AL (cf. plus haut la mise en œuvre de la RLS). Il y a en gestation des projets de réforme du dispositif des AL auquel on impute de nombreux défauts. Par exemple, les auteurs du Rapport de l’Institut des Politiques Publiques (IPP) N° 10 de JUIN 2015 consacré à la « Réforme des aides personnelles au logement » énoncent les critiques suivantes qui ne sont que partiellement fondées aujourd’hui. Ce dispositif de l’AL :
- Est d’une très grande complexité — ce qui exact,
- Est inflationniste – ce qui partiellement vrai. Sauf dans le cas particulier des étudiants, les hausses des loyers ont peu de choses à voir avec l’AL,
- Participe, avec les autres prestations sociales, à l’effet global désincitatif au retour à l’emploi des ménages bénéficiaires. On a vu précédemment que cela n’est globalement pas exact même si cela peut être vrai pour quelques cas limites. Si l’on se reporte au graphique, il faudrait également admettre que l’impôt sur le revenu est désincitatif…
L’intégration de l’AL dans le RUA pose des problèmes spécifiques :
- Le calcul actuel de l’AL dépend, on l’a vu, du niveau du loyer, du moins jusqu’au loyer-plafond. La fusion de l’AL dans un revenu universel implique l’impossibilité de prendre en compte cette composante locale et de la gommer en fixant un montant de la contribution de l’AL à celui du RUA, indépendamment du niveau réel de loyer, mais dépendant du la taille de la famille.
Différentes propositions ont été faites : soit prendre comme référence un loyer inférieur au loyer-plafond (Rapport de l’IPP), soit le loyer-plafond lui-même (Rapport de France Stratégie de février 2018). Selon le schéma retenu, il y aura, toutes choses égales par ailleurs, des gagnants qui seraient ceux, qui — à revenu égal — avaient de faibles loyers et les perdants tous ceux qui ont un loyer supérieur à ce loyer implicite de référence.
- Un effet redoutable de cette dilution de l’AL dans le RUA pourrait être la disparition du mécanisme de subrogation (cf. plus haut). Faute d’apporter une solution à cette question, on peut craindre l’augmentation des impayés et le retour à une période des départs à la « cloche de bois ». France Stratégie a proposé d’identifier la composante logement dans le RUA de manière à pouvoir poursuivre les mécanismes précédents de tiers-payants (subrogation), de prévention des expulsions, etc…
Par exemple, actuellement, dans un logement social, une personne seule ayant pour seule ressource le RSA et payant un loyer de 200 € n’aura à débourser, comme loyer résiduel, que 20 € environ, étant entendu que son bailleur reçoit 180 € au titre de l’AL. Ce locataire est cependant dans une situation précaire avec un reste pour vivre de moins de 14 € par jour (en comptant qu’il a 70 € de charge). Avec le RUA de 700 €, il aura le même reste à vivre, mais devra débourser 200 € pour son loyer. Au moindre souci, il sera tenté de ne pas payer son loyer. |
- La mise en œuvre du RUA, dans lequel une même somme serait versée en tenant compte de la taille de la famille et du revenu d’activité, pose un problème d’équité, car le niveau de vie garanti varierait fortement en fonction du statut d’occupation du logement : cela favoriserait les propriétaires occupants ; de même les locataires du parc social par rapport aux locataires du parc privé. La solution est donc de différentier le RUA en fonction du statut d’occupation du logement. La prise en compte du niveau de vie est une innovation importante pour justifier que, par exemple, les propriétaires reçoivent un RUA d’un montant égal au RSA actuel diminué du forfait logement, que les locataires du parc privé puissent bénéficier d’un RUA supérieur au précédent d’un montant égal au maximum de l’AL actuelle et que les locataires dans le parc social aient un RUA intermédiaire. Par exemple, respectivement, en zone I de 480 €, 789 € et 656€.
Le projet précis du gouvernement n’est pas encore connu. L’intégration de l’AL dans le RUA devrait effectivement permettre une grande simplification (et probablement moins de non-recours), mais on voit poindre quatre risques :
- L’accentuation de la disparition politique de l’Etat dans la sphère du logement, sachant que, déjà, l’Etat a fortement réduit ses aides à la pierre,
- Une précarisation des ménages les plus fragiles en supprimant cette sorte de garantie de paiement de loyer que procure la subrogation ; et par conséquent une difficulté supplémentaire pour les bailleurs.
- La priorité étant donnée au retour à l’emploi, la tentation sera grande de sanctionner financièrement les bénéficiaires du RUA qui seront perçus comme peu motivés pour travailler. Avec l’AL, une partie importante de paiement du loyer était sanctuarisée. Demain cela pourrait ne plus être possible.
Tout cela ne signe pas la fin des AL, car un RUA fondé sur la fusion des RSA, PA, ASS et AL laisse ouverte la question du versement de l’AL aux étudiants, aux accédants à la propriété… et à tous ceux qui bénéficient d’autres minimas sociaux (AAH, ASPA…). Il resterait environ le tiers de montant des AL à continuer à verser pour les autres publics exclus du RUA.
Pour conclure, il faut indiquer deux choses :
- Il y a une contradiction entre la volonté de réduire le budget des AL, la politique menée jusqu’ici (cf. la RLS) fondée sur une baisse des loyers dans le parc social et une mise en œuvre de la RLS qui consiste à « octroyer » un avantage de loyer justifié par le fait que les loyers du parc social sont nettement plus faibles que ceux du parc privé. Cet avantage justifie un RUA plus bas.
- La contrainte affirmée de faire une réforme à budget constant conduit à des gagnants et des perdants. Les travaux de France Stratégie montrent qu’il y aurait 24 % de gagnants, 42 % de perdants et 34 % de neutres. Il est vrai que les calculs ont montré que pour les ménages du premier décile (les 10 % les plus pauvres), il y aurait un tiers de gagnants, un tiers de perdants et un tiers de neutres.
Le chantier du Revenu Universel d’activité (RUA) a été lancé en juin 2019 par le gouvernement. Il prévoit une large concertation et doit aboutir à un projet de loi en 2020. Beaux débats en perspective !
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