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Directive intérim : l’avis des employeurs européens

publié le 2008-07-10

Après plusieurs années de blocage, les ministres européens du travail et de l’emploi sont parvenus à se mettre d’accord sur un projet de directive relative à la protection des travailleurs temporaires. Entretien avec Denis Pennel, délégué général d’Eurociett, la confédération européenne des agences privées de recrutement.

Comment Eurociett a accueilli le projet de directive sur les droits des intérimaires ?

dennis pennel

Notre organisation, qui représente la profession dans son intégralité en Europe, se réjouit de cet accord qui permettra à travers une harmonisation de la protection accordée aux travailleurs intérimaires d’améliorer l’image d’un secteur encore trop souvent décrié. Ce chemin vers l’égalité de traitement entre travailleurs intérimaires et salariés permanents a été long et difficile. La première version de directive remonte à 2001. Dès la fin des années 1990, la Commission a voulu réglementer le travail dit « atypique ». Si des accords entre les partenaires sociaux européens ont pu être conclus sur le travail à temps partiel et les contrats à durée déterminée, cela n’a pas été le cas pour l’intérim. La Commission a alors proposé un projet de directive mais celui-ci s’est heurté à l’opposition de certains Etats membres, dont le Royaume-Uni et l’Irlande. La voie vers une harmonisation des droits est restée pendant longtemps bloquée. Mais à la fin de l’année 2007, la présidence portugaise de l’Union Européenne s’est emparée du sujet en décidant de coupler les négociations sur le travail temporaire avec celle sur le temps de travail pour obtenir des concessions entre les deux camps qui s’affontaient sur ce sujet.

L’accord qui a été conclu en mai 2008 entre les syndicats et les employeur britanniques a ensuite ouvert la voie à une nouvelle directive. Le Royaume-Uni s’est rallié au principe de l’égalité de traitement (déjà en application dans 20 Etats membres) mais en rappelant la nécessité de souplesse dans son application (instauration d’une période de dérogation de douze semaines). Cette directive aura des conséquences importantes en Lettonie, Estonie, Bulgarie, ainsi qu’à Chypre et Malte car ces pays n’ont pour l’instant pas de législation spécifique concernant le travail temporaire.

Le cadre règlementaire sur le travail temporaire varie beaucoup d’un pays à l’autre, est-ce que le projet de directive apporte des changements ?

La directive va d’une part généraliser le principe d’égalité de traitement. D’autre part, l’accord trouvé par les Etats européens appelle à passer en revue les conditions de recours à l’intérim. Les sociétés de travail temporaire sont en effet, dans plusieurs pays, confrontés à des restrictions sectorielles (interdiction de recourir à l’intérim dans les services publics par exemple) ou liées aux situations permettant de faire appel à l’intérim. Ces contraintes sont dans certain cas injustifiées. Or, à notre grand regret, le projet de texte n’incite pas suffisamment les Etats membres à revoir régulièrement le cadre règlementaire de l’interim pour introduire plus de souplesse. Ce texte doit être examiné par le Parlement européen en seconde lecture cet automne et nous allons appeler les eurodéputés à inciter les Etats à lever certaines restrictions qui pèsent sur le secteur de l’intérim.

Les députés européens vont examiner un package de directives qui comprend à la fois le sujet des conditions de travail des intérimaires et la question du temps de travail, est-ce que leur sort est lié ?

Après plusieurs années de discussion, le Conseil des ministres européens du travail et de l’emploi est effectivement parvenu à trouver un compromis sur ces deux projets de directives très controversés mais qui ont été négociées dans un seul paquet. On peut considérer qu’elles sont politiquement liées. La proposition de directive sur le temps de travail pourrait être fortement amendée par les députés ce qui pourrait remettre en cause le compromis auquel étaient parvenus les ministres. Il existe une incertitude sauf si le Conseil parvient à dissocier les deux directives. C’est à la présidence française de l’Union Européenne que revient le soin de régler cette question politique.

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