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Que réserve L’après crise ? De nouveaux business model émergent, mais le rôle des autorités publiques sera déterminant pour éviter de nouvelles dérives.

futur

Une certitude : la pure banque d’affaire a vécu. On sait que les grandes banques américaines : Lehman Brothers, Morgan Stanley, Goldmann Sachs étaient uniquement des banques d’affaires, sans activité de détail c’est-à-dire sans dépôts. Dès l’automne 2008 on les a vues (à l’exception de Lehman, disparue dans la tourmente) demander à la FED (Federal Reserve Bank) une licence de banque de détail. Dans l’ensemble, les grandes banques de dépôts européennes (dont les françaises) ont mieux résisté à la crise. La manière dont on couvre les risques est au cœur du sujet : il y a toujours risque, et la notion de risque est centrale dans ces métiers, mais il faut déterminer comment on les évalue, comment on les gère, et comment on les garantit. C’est sur ce point que doit porter l’activité des régulateurs, tout autant que sur des pseudo listes de paradis fiscaux ! Il faut juste avoir en tête que plus la couverture des risques est sûre (cf l’époque où les compagnies d’assurance achetaient des immeubles pour couvrir les risques assurantiels), moins les espérances de profitabilité sont importantes ! C’est pourquoi il n’y a que la régulation publique appuyée sur la légitimité du politique qui peut protéger le secteur de la fuite en avant et de la recherche effrénée du profit maximum.

Le modèle low cost

Pour les activités qui ne sont pas celles des business banks, donc pour les activités commerciales en direction des particuliers, on voit que deux modèles alternatifs, ou complémentaires, se dessinent : un modèle « low cost » qui peu à peu rapproche les services financiers de la grande distribution ou un modèle « haut de gamme » de services de proximité qui rapprochent les services financiers du conseil.

Le business de services financiers « low cost » repose sur des produits standardisés, simples, vendus avec un minimum d’intermédiaires (par exemple sur Internet, ou par téléphone). Les économies de coût de production reposent sur l’existence de grands centres de vente à distance (call centers) situés en Europe dans le pays concerné ou ailleurs dans le monde, et sur l’existence de back offices qui gèrent efficacement les produits vendus par les télé-conseillers. Ces grandes plates-formes de traitement informatique et administratif existent déjà et sont souvent regroupées dans seulement une ou deux capitales européennes. Les conditions d’emploi et de travail des salariés concernés se situent en-dessous des standards en vigueur dans les banques et assurances où ils sont dans l’ensemble plutôt favorables. Parfois même, ils peuvent ne pas relever de la même convention collective. Le niveau de qualification y est moins élevé, la main d’œuvre est jeune et le turn over important. Pas besoin de nombreuses agences bancaires, ni de bureaux locaux pour des assureurs ou des agents d’assurance. Les conséquences peuvent être importantes en terme d’aménagement du territoire : de nombreux territoires pourraient ne plus avoir ni bureau de poste, ni banque physiquement présente, ni mutuelle ou autre compagnie d’assurance. Jusqu’à présent le développement des services financiers par internet a été, à l’exception des pays nordiques, moins rapide en Europe que prévu. Mais la crise d’une part, et l’arrivée de nouvelles générations de clients d’autre part, pourraient déclencher une nouvelle étape de banque et assurance directe : le client gère de chez lui (ou de son bureau) ses comptes et autres opérations financières.

Le modèle haut de gamme

Le modèle « services financiers de haut de gamme » suppose des agences et des bureaux répartis sur les territoires, en proximité avec les clients. Il vise à recouvrer la confiance perdue lors de la crise financière, il s’adapte aux besoins de conseil rapprochés d’une population européenne vieillissante. Les produits et services sont davantage sur mesure : pour les particuliers, pour les professionnels (artisans, commerçants, indépendants…) et pour les entreprises. Il exige des salariés plus qualifiés, bons connaisseurs des produits financiers, mais aussi capables de s’adapter aux besoins différenciés des clients et engageant leur responsabilité.

Le premier business model est économe en tout, donc aussi en énergie (moins de bureaux, moins de déplacements…) : est-il « vert » pour autant ? Par intuition on aurait plutôt tendance à dire que c’est le second modèle qui est porteur de confiance, de service aux clients, de qualité, de développement des compétences des salariés, et au final de « durabilité », ne serait-ce que parce qu’il vise à une meilleure maîtrise des risques.

Comme souvent, on voit en développant ces deux hypothèses d’évolution à moyen terme, que la crise est un puissant révélateur de tendances à l’œuvre. Comme souvent, on peut se douter que les deux scénarios ne seront pas alternatifs mais que les deux tendances se développeront, selon les identités d’entreprise, selon les segments de clients.

Le rôle des pouvoirs publics

Il faut aussi ajouter que les évolutions ne dépendent pas que des entreprises et de leurs clients : les pouvoirs publics, les politiques peuvent y jouer un rôle : réduire la vente de produits financiers peu sûrs, empêcher que des personnes âgées se voient proposer des produits auxquels ils ne comprennent rien, responsabiliser les vendeurs en obligeant à ce qu’ils signent leur responsabilité : cela relève de la défense du consommateur et de la nécessaire réglementation d’un secteur qui, quoi qu’on en dise, n’est pas tout à fait un secteur comme les autres. « La banque, bien public de la mondialisation » titrait Nicolas Baverez dans Le Monde du 26 novembre 2009 : « les banques émettent de la monnaie, via le crédit. Elles conditionnent les transactions donc le niveau de l’activité, tout en gérant et en conservant une part essentielle des patrimoines des entreprises et des ménages…. ».

La remise en ordre du secteur aux différents niveaux nationaux, européen et international est une tâche assez rude : depuis la défense du consommateur sur le crédit à la consommation, en général un pur scandale, jusqu’à la définition des ratios de solvabilité, la redéfinition des frontières entre les différentes activités (banque de détail, banque d’investissement, assurance)… et bien sûr la réglementation des fameux produits dérivés et de ceux qui s’inventeront demain.

Quelles sont aujourd’hui les urgences ?

– Des institutions financières peuvent être encore en danger : le « deleveraging » ou dégonflement n’est pas achevé, pensons à Natixis en France.
– L’ampleur de la crise économique mondiale va rétro-agir sur le secteur financier (moins de primes d’assurances souscrites, moins d’activités de gestion de fonds, moins de développement du chiffre d’affaires des clients entreprises…).
– La perte de confiance des clients-consommateurs est durable.
– Les nouveaux Etats membres de l’Union Européenne sont dans des situations très critiques, d’autant qu’ils ne bénéficient pas du stabilisateur qu’est la monnaie unique (Lettonie, Hongrie…).
– Les diminutions d’emploi sont saisissantes aux USA, à Londres, moindres en Europe en général et en France sauf dans la banque de financement et d’investissement.
– Les recrutements de jeunes se font de manière très réduite.

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Philosophe et littéraire de formation, je me suis assez vite dirigée vers le social et ses nombreux problèmes : au ministère de l’Industrie d’abord, puis dans un cabinet ministériel en charge des reconversions et restructurations, et de l’aménagement du territoire. Cherchant à alterner des fonctions opérationnelles et des périodes consacrées aux études et à la recherche, j’ai été responsable du département travail et formation du CEREQ, puis du Département Technologie, Emploi, Travail du ministère de la Recherche.

Histoire d’aller voir sur le terrain, j’ai ensuite rejoint un cabinet de consultants, Bernard Brunhes Consultants où j’ai créé la direction des études internationales. Alternant missions concrètes d’appui à des entreprises ou des acteurs publics, et études, européennes en particulier, je poursuis cette vie faite de tensions entre action et réflexion, lecture et écriture, qui me plaît plus que tout.