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par François Gault, Varsovie

Conséquences de la crise financière et des perturbations répétées qui frappent l’euro, en Pologne, le système des retraites traverse une période de profondes turbulences. Cela secoue de tous les côtés mais pourrait amener des innovations bienvenues.. Dans ce pays de 38,2 millions d’habitants, les femmes peuvent prendre leur retraite pleine et entière à 55 ans (après avoir cotisé pendant vingt ans) et les hommes à 60 ans (après 25 ans de cotisations).

 

retraite pologne

Sombre tableau : en Pologne, l’âge moyen de cessation d’activité est de 56 ans et le taux d’emploi des seniors – de 55 à 65 ans – est le plus bas de toute l’Union européenne, 27% contre 38% en France et 69% en Suède. « Cette situation est grave et dangereuse ! explique le DRH d’une grande société de services. La charge est très lourde pour ceux qui travaillent et qui assurent les retraites ! ». Dans ce pays, aujourd’hui, on compte 1,5 actifs pour 1 retraité. A partir de 2013, il y aura seulement un actif pour un retraité. Et en 2030, les plus de 65 ans représenteront 60 pour 100 de la population.

 

Un système de retraite à trois piliers

Pour enrayer cette situation à haut risque, voici dix ans, le gouvernement polonais institue une réforme du système de retraites construit sur trois piliers. Le premier – système de répartition – c’est l’assurance-retraite classique basée sur les cotisations versées par les salariés et par les entreprises. Le second s’appuie sur des fonds d’investissements obligatoires, géré par l’Administration Publique des Retraites, sous le contrôle de l’Etat.

Et le troisième pilier repose sur des cotisations volontaires des salariés à des compagnies d’assurances ou à des Caisses de retraites complémentaires. Celles-ci sont mises en place par les entreprises après négociation avec les syndicats ou avec les reprèsentants des salariés, et selon les règles des conventions collectives. Ce troisième pilier offre un régime de retraite facultatif. Aujourd’hui, il est boudé par de nombreux Polonais, ceux dont le pouvoir d’achat reste faible.

Et c’est sur le deuxième et le troisième pilier que frappent la crise financière de 2008, puis les secousses récentes et prolongées de l’euro. En 2007, les fonds de pension du système polonais des retraites représentent 12,20% du PIB polonais. Leurs valeurs va chuter de plus de 12 %, recul identique en Hongrie (moins 14%) et en Bulgarie (moins 22%). La perte atteint 500 millions d’euros. Les fonds de pensions avaient placé près de 40% de leurs avoirs à la Bourse de Varsovie. En quelques mois, ils vacillent.

 

La répartition, un système plus fiable

Aujourdhui, face à cette crise systémique et pour éviter l’implosion du régime de retraites privées, les dirigeants Polonais vont sans doute s’orienter vers un renforcement des retraites publiques, premier pilier. « Ce système par répartition est beaucoup plus fiable que tout autre système ! » constatent aujourd’hui économistes et sociologues.

Beaucoup estiment même qu’une approche européenne commune serait sans doute une solution pour régler le problème – ici et ailleurs – et pour éviter que les marchés financiers ne pèsent, comme aujourd’hui, sur le système des retraites. Les pays d’Europe centrale se trouvent dans des situations identiques à celle de la Pologne, voire plus grave, compte tenu de leur économie plus fragile.

En plus, une réflexion prospective pourrait constituer l’amorce d’un nouveau modèle social européen, qu’il faudra bien construire tôt ou tard. Ici, on commence à s’interroger à ce propos. Et peut-être le moment est-il venu de poser des jalons : les performances économiques de la Pologne sont bonnes et c’est même le seul pays de l’Union à avoir enregistré une croissance positive en 2009. Il n’empêche, pour son dixième anniversaire, la réforme du système des retraites en Pologne, tremble sur ses bases.

 

François Gault, Varsovie

 

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