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L’évaluation à la performance se déploie dans la filiale britannique d’EDF. « Faire comprendre le lien entre les objectifs fixés et l’ambition de notre entreprise, est l’essence de notre pacte collectif d’entreprise juste, responsable et durable ». Entretien avec Philippe Huet Chief Officer – People, Organisation & Brand Performance d’Edf Energy.

 

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Quels sont les différents systèmes d’évaluation des pratiques professionnelles et de la performance pour les 15 000 salariés d’EDF Energy ?

Qu’ont ils gardé de l’héritage des compagnies anglo-saxonnes dont il est issu ? Ont-ils été influencés par celui de l’ancien Service Public français ?

EDF Energy comme filiale à 100% du groupe EDF est convaincu que la performance de ses employés, « our people », est au cœur de la performance de notre entreprise. Au quotidien ce doit être la première préoccupation de nos 2329 managers. Ce principe est associé à la préoccupation majeure d’assurer la pleine santé de nos employés ainsi que leur sécurité et celle de nos installations.

 

En accord avec son actionnaire (EDF à 100%), EDF Energy a une stratégie qui s‘appuie sur six ambitions. Les deux premières concernent la performance notamment en santé et sécurité au travail. L’absence d’accident surtout : « zero harm safety record ». Et aussi d’avoir des employés mobilisés et motivés dans leur travail : « High performing people ». Puis nous avons quatre autres ambitions liées à la nature de notre business : être leader dans la production d’électricité d’origine nucléaire, être le premier choix des clients, être performant financièrement. Et enfin être un leader en matière de développement durable.

 

Nous avons construit et affiné un système d’évaluation au fil des ans autour de ces grands principes. Il s’est matérialisé au moment de la fusion avec British Energy (branche nucléaire), puisqu’on a à ce moment-là rapproché ce système de ce qui se faisait historiquement chez EDF Energy, plus alors tourné vers le commercial et les réseaux de distribution que chez British Energy.

 

Comment les évaluez-vous ?
Il faut que les employés sachent ce qu’ont attend d’eux, individuellement et en équipe. Ils ont chaque année trois entretiens avec leur manager, dans une discussion structurée, individuelle ‘one to one’ en début, en milieu et en fin d’année.
En début d’année, le manager vérifie que les objectifs personnels sont bien cohérents avec les objectifs de l’équipe et ceux de leur métier d’appartenance. À côté des objectifs personnels, il faut analyser les efforts ou les besoins de formation nécessaires pour bien tenir les objectifs fixés. En milieu d’année, vérifier qu’on est sur la bonne trajectoire et s’il faut l’infléchir un peu. En fin d’année, on regarde le parcours effectué, qui débouche sur une appréciation sur le potentiel et sur la performance. Cette dernière se traduit en termes de bonus et d’ajustement salarial. C’est tout l’ensemble de ce processus qu’on appelle le « coaching for performance ». On encourage nos managers à avoir ces conversations plus que trois fois par an, quand c’est nécessaire individuellement ou sur rendez-vous.

 

L’issue de ces discussions doit être approuvée par les deux parties via confirmation électronique car notre système d’appréciation est maintenant en ligne. Chacun de nos employés doit avoir un objectif de santé et de sécurité. C’est un pilier de la performance durable de notre entreprise : un environnement, des comportements et des actions en complète sûreté et sécurité, y compris santé au travail.

La qualité des évaluations est contrôlée lors de revues qualité, en zoomant par exemple sur la pertinence des objectifs. La satisfaction des salariés durant ces échanges est, quant à elle, appréciée au travers des réponses à l’observatoire social tous les ans. Ces résultats permettent d’affiner la communication et l’offre de formation aux managers.

 

Vous assurez-vous que vos sous traitants ont les mêmes préoccupations ?
EDF Energy fait appel à des sous-traitants dans nombre de ses secteurs d’activité. En matière de santé et sécurité, nous suivons notre performance totale dans ce domaine, y compris celle de nos sous-traitants. Nous veillons sur ces thèmes-là à ce que nos sous- traitants soient alignés sur nos objectifs et nos ambitions.

 

Y a-t-il eu des cas dans lesquels les syndicats se sont opposés à la mise en place ou la refonte de système d’évaluation comme cela a pu exister en France ?

Nous sommes persuadés qu’il n’y pas de climat sain dans une entreprise sans un dialogue transparent, constructif et patient avec des représentants syndicaux et aussi non syndiqués. A la différence d’EDF en France, il existe a EDF Energy plusieurs statuts (accords collectifs) pour notre personnel syndiqué (« unionized ») et une large population d’employés non affiliés (les « personal contract holders » détenteurs d’un CDI individuel).

 

On engage le dialogue à la fois directement avec nos employés et avec leurs représentants syndicaux et les représentants du personnel non syndiqué. Tous les éléments d’appréciation ont été discutés. Régulièrement nos syndicats nous rappellent à la nécessité de ce dialogue entre les managers et leurs équipes centré sur la performance et la formation pour éviter tout malaise.

 

Il n’existe pas de sujet de tension potentielle, de contentieux. C’est « win-win » comme on dit. C’est un patrimoine de l’entreprise. Nous sommes tous responsables de cela. Il n’y a pas de hiérarchie ou autre. Nous encourageons nos managers à bien faire comprendre le lien entre les objectifs fixés et l’ambition de notre entreprise. C’est l’essence de notre pacte collectif d’entreprise juste, responsable et durable.

 

La crise a-t-elle provoqué des réorganisations, freiné les augmentations et les bonus. Est-ce que ça ne délégitime pas ce système d’évaluation à la performance ?
Non, ça le renforce au contraire. Comme la situation d’une équipe dans un voilier, ou une cordée en montagne. Quand l‘environnement devient hostile ou très perturbe, il est plus que jamais nécessaire d’être clair sur le rôle et les responsabilités de chacun, les bonnes compétences, les formations nécessaires. Il nous faut des employés mobilisés et motivés dans le climat nécessaire a l’atteinte de nos objectifs et en premier lieu celui du « zéro accident ».

 

Concernant le sujet des restructurations, rappelons d’abord que la rotation de personnel est plus importante en Grande Bretagne qu’en France. Mais nous investissons dans la durée, notamment dans le nucléaire, ce qui nous pousse naturellement à privilégier la fidélité à nos métiers et à développer et entretenir les compétences sur le long terme. Beaucoup ont fait toute leur carrière chez nous. 20% de notre main d’œuvre a plus de 55 ans. Beaucoup ont travaillé depuis l’âge de 16 ou 18 ans.

 

EDF Energy est en plein développement et prévoit d’embaucher 1 000 personnes cette année (et plusieurs milliers dans les 5 années à venir). Nous recherchons particulièrement des ingénieurs et d’autres experts techniques pour nos activités existantes, nos nouvelles activités nucléaires et aussi nos activités dans les domaines des énergies renouvelables et des services à nos clients.

 

Nous avons en projet de construire jusqu’à quatre centrales nucléaires de nouvelle génération de type EPR au Royaume Uni. Chacune aura besoin de 5000 personnes au plus fort de la construction. Une fois qu’elles seront opérationnelles, cela représentera 900 emplois permanents sur chacun des sites de Hinkley Point (West Sommerset) et Sizewell (Suffolk) auxquels il faut ajouter les milliers d’emplois qualifies induits par le développement des activités de services a nos centrales dans leurs régions d’implantation.

 

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