5 minutes de lecture

par Stephanie Jones, traduit de l’anglais par Eva Quéméré

Bien que l’an passé le Royaume-Uni ait été élu « pays le plus généreux d’Europe », de nouvelles données de l’Office for National Statistics (ONS) ont montré qu’entre 2012 et 2015 le volontariat a décliné de 7 %, entraînant sur les trois ans une perte d’au moins 1 milliard de Livres. La dernière décennie a aussi vu diminuer de 15,4 % le nombre total d’heures y étant dédiées, passant de 2,28 à 1,93 milliard.

Mais ces chiffres ne présentent pas pour autant une image exhaustive de la réalité : toujours selon l’ONS, de plus en plus de jeunes deviennent bénévoles et, malgré la baisse du nombre d’heures y étant consacrées, de plus en plus de personnes s’engagent.

 

– Article paru en anglais sur le site The Conversation le 27 mars 2017 –

Un pays de volontaires
Ces statistiques ne montrent pas non plus la façon dont ces volontaires sont répartis dans le pays. Le Pays de Galles est peuplé de trois millions de personnes dont 940 533 sont actuellement engagées dans une activité formelle de volontariat, soit 32 % ! En Angleterre, on rencontre 15,9 millions de volontaires pour une population totale de 53,9 millions, tandis qu’en Écosse ils sont 1,3 million à être engagés pour une population de 5,3 millions d’habitants.

Mais, à nouveau, ces données ne racontent pas toute l’histoire : aux 940 533 bénévoles officiels du Pays de Galles – qui œuvrent avec des associations locales, lèvent des fonds et travaillent dans des boutiques caritatives – s’ajoutent 1,6 million de volontaires informels qui, par exemple, rendent visite à leurs voisins âgés et leur font leurs courses. Il en est de même en Angleterre (18 millions) ainsi qu’en Écosse (1,9 million).

Alors que les volontaires informels soutiennent la communauté locale en restant proches de chez eux, mes recherches ont montré que les bénévoles officiels œuvrent souvent plus loin. En observant le rôle et l’expérience des volontaires des associations du patrimoine ferroviaire de Galles du Nord, j’ai en effet constaté qu’ils étaient bien plus disposés à voyager dans le pays pour travailler sur un projet leur tenant à cœur. Ces dix dernières années, le volontariat a considérablement diminué dans les zones rurales, mais, alors que la participation aux formes traditionnelles d’association – comme aller à l’église et participer à ses projets caritatifs – s’est écroulée, le volontariat dans le patrimoine industriel s’est accru.

Communauté et patrimoine
Avec ses deux cents ans d’histoire, la Ffestiniog railway est la plus ancienne ligne de chemin de fer à voie étroite du Royaume-Uni. Elle est aujourd’hui exploitée par neuf sociétés – l’une est basée à Gwynedd en Galles du Nord, tandis que les huit autres se trouvent de part et d’autre de l’Angleterre, du comté de Sussex en passant par la River Dee jusqu’à la ville de Merseyside. Les bénévoles, en faisant la sécurité, en conduisant les trains ou encore en contrôlant les billets des voyageurs, jouent un rôle vital dans la préservation de ce patrimoine.

Là où ceux qui aident leurs voisins le font sur une base journalière, voire hebdomadaire, les motivations des volontaires de Ffestiniog sont très différentes. Bien souvent, ils travaillent pour la voie ferrée durant leurs vacances, un moyen de se relaxer après avoir exercé le reste de l’année un travail souvent très exigeant, de s’évader de leur vie quotidienne et de participer à une activité que l’on ne retrouve pas dans beaucoup de villes. D’autres le font aussi pour maintenir un lien avec un lieu dans lequel ils ont vécu ou qu’ils ont connu quand ils étaient enfants.

J’ai constaté que le volontariat était aussi une façon de créer de nouvelles relations. C’est particulièrement notable dans le secteur du patrimoine, dans lequel une grande partie des bénévoles est retraitée – ou proche de l’être. Leur participation peut les aider à maintenir une vie sociale, créer de nouveaux réseaux et faire le pont entre l’emploi et la retraite.

Bien souvent, plusieurs membres d’une même famille prennent part à l’activité bénévole, qui devient alors une tradition. Un participant m’a par exemple dit que sa fille, son gendre, deux neveux et trois de leurs enfants travaillaient avec Ffestiniog railway. « C’est ça l’atmosphère de la voie ferrée, une grande famille ; les autres bénévoles le retrouvent aussi. »

Tout comme les volontaires informels qui aident leurs voisins, les bénévoles officiels de la voie ferrée trouvent un esprit de communauté. Alors qu’ils ne sont liés ni par le sang ni par le mariage, leur forte amitié fait souvent naître un esprit de famille, une appartenance, une camaraderie, une communauté, une identité.

« C’est fantastique de partager une passion avec des personnes qui aiment les mêmes choses. J’imagine qu’en un sens c’est vu comme un hobby de geeks, mais on est entouré d’un vrai esprit de communauté. On est une équipe – peut-être dysfonctionnelle, mais une équipe ! »

Les chiffres et les données ne représentent jamais vraiment la réalité du volontariat en Grande-Bretagne, qu’il soit formel ou non, tout près ou plus loin. Les Britanniques emploient leur temps libre pour faire la différence et ça, les statistiques ne savent pas le raconter.

Print Friendly, PDF & Email
+ posts