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par Catherine Godard, propos recueillis par Danielle Kaisergruber

Ancienne cadre dans le secteur bancaire, Catherine Godard est bénévole pour SNC (Solidarités Nouvelles contre le Chômage) depuis une dizaine d’années dans le 18e arrondissement de Paris. Elle raconte ce qu’elle a appris et observé.

 

bénévoles

 

Ça arrive comment « devenir bénévole » ?

 

Pour moi, de manière assez classique. Je suis en retraite en 2004, et passées quelques années, je commence à souhaiter ce type d’activités. C’est par le bouche-à-oreille que je suis arrivée chez SNC en 2007 : des amies m’en avaient parlé, le fondateur Jean-Baptiste de Foucauld était assez connu et estimé, et puis l’accompagnement de demandeurs d’emploi était en résonnance avec ma vie professionnelle puisque j’étais dans les ressources humaines. D’ailleurs, j’en avais également entendu parler très positivement dans ma propre entreprise avant de la quitter.

 

On est « recruté » comme bénévole ?

 

Pas tout à fait. Mais il y a bien un processus : le futur bénévole a un entretien avec deux personnes du groupe pour valider ses motivations, ses souhaits, ses possibilités. Il y a ainsi des personnes pour lesquelles on sent tout de suite que cela ne collera pas… ou au contraire que cela ira. Quelques-unes aussi qui souhaitent juste être bénévoles pour pouvoir le mettre dans leur CV ! Puis on participe au moins à deux réunions de groupe local et ensuite on réalise deux premiers entretiens. Comme le principe de base de SNC est que tous les entretiens sont faits par un binôme, on commence toujours avec un plus ancien. Il y a aussi une petite formation d’une journée.

 

De toute manière, les pratiques sont très souples et évolutives : SNC est organisé en groupes locaux, et chaque groupe qui a un responsable -également bénévole – se réunit une fois par mois pour partager, évoquer les problèmes rencontrés, faire des retours d’expérience. Cela permet à chacun d’évoquer les problèmes rencontrés, et de s’améliorer. Il y a peu de « consignes » du « siège » et chaque groupe trouve son propre mode fonctionnement. Les groupes se composent d’une dizaine de bénévoles accompagnants.

 

Il y a également chez SNC des « groupes d’entreprise » : par exemple de grandes entreprises telles que Lafarge ou la Société Générale. D’autres, telles que BNP Paribas, ont développé des dispositifs pour encourager le bénévolat de leurs propres salariés. Cette dernière a choisi un certain nombre d’associations comme SNC ou Lire Faire Lire et certains salariés et retraités s’y engagent. Au total il y a actuellement 182 groupes répartis sur tout le territoire français, dont 15 groupes d’entreprise.

 

Qui sont tes « collègues bénévoles » ? Quelles sont leurs motivations ?

 

Mon groupe est assez atypique puisqu’il comporte une forte majorité de gens jeunes et en pleine vie professionnelle. Certains parlent de leur engagement SNC dans leur environnement professionnel, d’autres pas, peut-être par crainte de ne pas paraître assez investi dans leur vie professionnelle, ou par envie de séparer complètement celle-ci et toute autre activité.
Parmi les accompagnants qui ont une vie professionnelle -souvent déjà bien remplie -, leur motivation tient beaucoup à un raisonnement du type « moi j’ai fait de bonnes études, j’ai plutôt de la chance et je veux rendre à la société ». Il y a également, s’agissant de SNC, une forte sensibilité au problème social du chômage, particulièrement dans les mondes professionnels des ressources humaines.

 

Il faut dire aussi que l’accompagnement de demandeurs d’emploi en difficulté est une activité particulièrement flexible : les accompagnements peuvent se faire le soir, toujours dans des lieux neutres, le plus souvent des cafés, et donc selon la disponibilité des trois parties prenantes : la personne accompagnée et les deux bénévoles qui composent le binôme.

 

Sur l’ensemble de SNC, la répartition des accompagnants entre actifs et retraités est un peu différente : 40 % d’entre eux ont de 50 à 65 ans, et donc un certain nombre sont retraités. Mais il y a aussi des jeunes : 9 % ont moins de 35 ans.

 

Qu’est-ce qui caractérise le travail pour SNC, en quoi est-ce différent du travail professionnel ?

 

La première caractéristique est certainement la souplesse des accompagnements, dans le temps et dans la manière de les conduire. Il y a bien une philosophie SNC qui repose sur l’écoute, la liberté de choix du nombre de rendez-vous, l’étalement de l’accompagnement dans le temps, le côté très personnalisé : chaque binôme s’adapte aux spécificités des personnes accompagnées, à leur parcours et à leur personnalité. En ce sens c’est tout à fait différent de la relation des demandeurs d’emploi avec les conseillers de Pôle emploi qui ont des portes-feuilles très lourds et ne disposent pas toujours de grandes marges de manœuvre. D’ailleurs certains bénévoles de SNC participent à des Comités de pilotage locaux d’une Convention avec Pôle emploi pour y apporter leur expérience et faire des propositions de pratiques nouvelles.

 

Une autre caractéristique : au-delà de la souplesse et de la très grande liberté d’organisation des accompagnements et du travail local (chaque groupe local a ses spécificités), ce qui me frappe c’est l’absence de luttes de pouvoir. Les relations avec les autres, comme d’ailleurs les relations avec le « siège » (c’est-à-dire une dizaine de personnes) qui sont assurées par les responsables de groupes sont faciles. L’ensemble du système est très décentralisé et responsabilisant.

 

Pour en savoir plus :


Metis dossier « L’accompagnement tout un travail ! » mars-avril 2016
Metis, « Accompagnement personnalisé et bénévole : le cas de SNC », par Fanny Barbier – 03 avril 2016
Metis, « Ce que nous apprend l’accompagnement bénévole des chômeurs », par Jean Simonet – 18 septembre 2016

 

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