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Dans la zone euro comme dans les pays de l’Europe de l’est et du nord, les revendications salariales explosent. Les salaires montent, dans des contextes radicalement différents.

Il est de bon ton en France d’expliquer la stagnation des salaires par la mise en œuvre des 35 heures. Rappelons le, les accords d’entreprise remontent pour l’essentiel à l’année 2000. Effectivement, ils prévoyaient souvent une « modération » salariale pendant 24 mois. Néanmoins tout cela commence à dater. Les dernières statistiques Eurostat pour le premier trimestre 2006 relativisent la « paresse » française. Le nombre moyen d’heures effectivement travaillées par semaine est de 37,3 dans la zone euro. La France travaille 37,4 h, devant l’Irlande 37 h, la Suède 36,3 h, le Danemark 35,9 h, l’Allemagne 35,8 h, le Royaume Uni 35,6 h et les Pays Bas 32 h. En fait, d’autres considérations pèsent de plus en plus lourd, notamment la recherche de compétitivité, objectif légitime d’entreprises dans la concurrence, mais au travers d’un levier privilégié, la masse salariale. L’économiste Thomas Philippon (voir l’édito) préconise d’autres méthodes.

La situation de l’Allemagne est fort intéressante. Heureux Allemands, ils n’ont pas généralisé la RTT. Ils ont considérablement amélioré leurs avantages concurrentiels, mais au prix d’une baisse du pouvoir d’achat des salariés. Avec la croissance revenue, les revendications salariales n’ont jamais été aussi fortes. Le secteur du bâtiment vient d’obtenir une augmentation de 3,5%, la chimie 3,6% plus une prime de 0,7%. Dans la métallurgie le patronat offre 3%, l’IG Metall en demande 6,5%. Quant aux cheminots, dont le précédent accord salarial prévoyait une baisse de 5,5%, ils réclament 7% pour tous et, pour les jeunes conducteurs, une augmentation de 40 %.
En Grande Bretagne, la crainte est aux salaires qui flambent. Après trois années de stagnation – tiens, eux aussi ! – on enregistre en trois mois, entre novembre et janvier derniers, une augmentation moyenne de 3,5%. Il est vrai que la croissance britannique tire les salaires vers le haut et que l’inflation augmente. Les hausses de salaire ont atteint 4% dans l’automobile et 4,6% chez British Airways, de très nombreuses négociations sont d’ailleurs en cours.

La situation est tendue dans les pays de l’Europe de l’Est ou du Nord. De très nombreux secteurs manquent de main d’œuvre qualifiée et il s’agit de retenir ou de faire revenir les migrants attirés par l’Ouest. En République Tchèque, les salaires ont augmenté de 10,1% au premier semestre 2006 et la pression ne baisse pas, un accord chez Skoda vient d’accorder 10% immédiatement. En Pologne, le syndicat polonais NSZZ-Solidarnosc a lancé une campagne nationale sur le thème « bas salaires, barrière pour le développement de la Pologne». Selon le syndicat, qui s’appuie sur les travaux de l’Institut du Travail et des Affaires sociales, « en 2006, la productivité du travail a augmenté de 28,5% et les salaires bruts réels de 7,3% ».
Les petits dragons baltes connaissent une croissance à deux chiffres mais une inflation trop forte pour leur permettre de rejoindre la zone Euro. Ces pays, concentrent les salaires les plus bas d’Europe mais les augmentations les plus élevées. Au second semestre 2006, +22,7% pour la Lettonie, +21,1% pour la Lituanie, + 16,4% pour l’Estonie. Le turnover des salariés baltes tend à s’accroître et ce, pour motivation salariale.
Mondialisation, entrée dans l’Union, mouvements migratoires, les Européens connaissent des situations variées et qui bougent très vite.

Laurène Fauconnier

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