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par Frédéric Rey

La responsabilité sociale des entreprises est mise au pied du mur. En Allemagne, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en France, une action coordonnée de juristes et de militants d’ONG s’attaquent aux industriels sur leurs responsabilités en matière de pollution.

Les constructeurs automobiles vont-ils connaître le même mouvement de judiciarisation que les cigarettiers ? Dans plusieurs pays occidentaux, les plaintes se mutliplient. La nouvelle qui a dû faire frémir plus d’un industriel est venue cet été du Japon. Dans un accord daté du mois d’août 2007, sept constructeurs automobiles japonais ont décidé d’indemniser 520 habitants de Tokyo souffrant de troubles respiratoires dus à la pollution atmosphérique. En 1996, plusieurs citoyens japonais avaient déposé une plainte contre le gouvernement, la préfecture de la capitale, une compagnie d’autoroutes et les industriels. Si en 2002, les autorités publiques ont été condamnées en première instance, les constructeurs avaient été exonérés de leur responsabilité. Alors que cette affaire devait être rejugée, les entreprises ont préféré l’option d’un accord à l’amiable en accordant l’équivalent de 7,4 millions d’euros aux plaignants.

Aux Etats-Unis, c’est l’Etat de Californie qui met en cause la responsabilité des constructeurs dans le réchauffement climatique. En Europe, à l’initiative d’un Britannique, Peter Roderick, directeur du programme Climate justice, un réseau de juristes et d’avocats allemands, britanniques, néerlandais et français ont pris la tête de ce combat en utilisant tous les instruments de la soft law et ceux plus contraignants de la hard law. «Il s’agit de caractériser tous les éléments dommageables auquels contribue l’industrie automobile comme la canicule de 2003 et les décès qu’elle a causés », explique Olivier Queinnec, juriste chez Sherpa.

Cette association française, présidée par l’avocat William Bourdon, étudie le lancement d’une procédure dans les prochains mois. En Allemagne, c’est la voie de la soft law qui a été adoptée. L’organisation de défense de l’environnement Germanwatch a déposé une plainte contre Volkswagen auprès du ministère allemand de l’économie estimant que la stratégie de modèles du constructeur était contraire aux principes directeurs de l’OCDE que l’entreprise s’était pourtant engagé à respecter. BMW et DaimlerChrysler pourraient à leur tour faire l’objet d’une procédure. Cette judiciatisation du débat intervient à un moment où la Commission Européenne réfléchit à imposer un cadre plus contraignant. Les résultats des engagements volontaires des constructeurs à réduite les émissions de CO2 n’ayant eu jusqu’à présent qu’un succès limité.

Frédéric Rey

Fondée en 2001, l’association Sherpa cherche à rendre concrète la notion de responsabilité sociale des entreprises à l’aide d’actions juridiques. L’avocat a été mandaté par des ouvriers birmans pour porter plainte contre le pétrolier TotalFinaElf pour crime de séquestration http://www.asso-sherpa.org/

A écouter, William Bourdon sur Europe 1 le 21/08/07

Le programme  » Climate justice  » réunit 70 ONG (Les Amis de la Terre, Greenpeace, le WWF …) et des associations de juristes qui engagent des poursuites judiciaires pour obtenir une compensation financière des dommages subis, dès lors que les responsabilités économiques ou politiques seraient établies. Plusieurs plaintes ont déjà été déposées. Au Niger, le programme Justice Climatique s’est associé, dans une plainte, aux communautés locales contre la dégradation du cadre de par les pollutions des sociétés pétrolières. La même démarche est en cours au Népal avec les communautés de l’Himalaya menacées par la fonte des lacs. http://www.climatelaw.org/
Adoptés en 1976, les principes directeurs de l’OCDE sont des recommandations volontaires et non obligatoires instituées par les gouvernements pour les entreprises multinationales.

 

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