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par L Fauconnier avec Reuters

La réforme du marché du travail en Italie semble ne pas produire les effets attendus. Son objectif était de favoriser l’embauche, notamment sous forme de contrats non précaires, et de faciliter les licenciements en mettant en place une rupture conventionnelle. Sécurité et flexibilité (ou souplesse) ont régi le projet, maîtres principes des réformes des marchés du travail réclamées par la Commission et par les marchés.

Mario Monti avait mis 6 mois à trouver un compromis acquis de haute lutte. Il voulait mettre fin à un marché composé d’une part de salariés hyper protégés et d’autre part de jeunes précaires ô combien flexibles et insécurisés. Il avait également pour objectif de redresser la courbe du chômage. Une loi était votée en juin dernier, elle permettait dans les grandes et moyennes entreprises de licencier plus facilement et elle taxait les contrats précaires. Les acteurs de la finance européenne ou mondiale avaient salué la réforme.

Les problèmes sont toujours présents

Aujourd’hui, patrons comme syndicats déclarent que rien n’a véritablement changé
« Rien ne montre que les entreprises licencient davantage depuis l’application des nouveaux règlements, ce n’est simplement pas le cas » dit Pierangelo Albini responsable des questions du travail à Confindustria, le Medef italien. Les syndicats ne disent d’ailleurs pas le contraire et il n’existe aucune statistique officielle sur la question.

« la réforme n’a pas changé grand-chose en matière de procédure judiciaire , précise l’avocat Michele Tamburini, potentiellement la loi pourrait rendre les licenciements plus faciles mais tout dépend de la manière dont les juges l’interpréteront et peu nombreux sont ceux qui veulent faire le test ».
Mario Monti lui-même reconnaît les limites de la loi et dénonce les blocages du syndicat CGIL, il réclame désormais une simplification drastique des règles du marché du travail.

« On a très peu eu recours aux nouvelles règles, déclare Giorgio Santini du syndicat CISL, les procédures de licenciement sont plus compliquées que jamais car elles ont accru le pouvoir discrétionnaire des juges » ; les licenciements individuels sont possibles dans les entreprises de plus de 15 salariés si l’entreprise connaît des difficultés et elles ne sont plus obligées de réembaucher le licencié si le juge estime le licenciement injustifié. Par contre elles peuvent être condamnées à payer des compensations financières élevées. Du coup, les entreprises n’utilisent pas cette possibilité. Quant aux très petites entreprises et au secteur public, ils n’ont pas été touchés par la réforme.

L’échec de l’apprentissage
Si le licenciement est potentiellement devenu plus facile, l’embauche est devenue plus difficile s’accordent à penser CGIL et Confindustria. Mario Monti a tenté de développer l’apprentissage sur le modèle allemand, pour remplacer les contrats temporaires et précaires. Mais l’apprentissage ne décolle pas. Trop de bureaucratie et une règle constitutionnelle qui confie pour partie aux exécutifs régionaux la responsabilité d’organiser la formation des apprentis (ce qu’ils ne font pas), ce qui bloque le système.

Le taux de chômage continue de grimper, il atteint 11,1% à fin novembre 2012 (Eurostat).

Lors de la conclusion du projet de loi, les économistes avaient alerté Mario Monti des dangers que présentait un compromis minimal. « Cela donne l’illusion que le problème a été réglé alors que ce n’est pas le cas. Un remède faible peut être pire que ne rien faire du tout ». L’avenir dira s’ils avaient raison, 6 mois seulement se sont écoulés.

Que fau-il souhaiter pour la négociation française sur la « sécurisation de l’emploi » ?

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