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Le 30 mars dernier, un accord social historique a été signé entre les syndicats américains réunis au sein de l’AFL-CIO et leurs homologues patronaux de la Chambre de commerce des Etats-Unis. Accord historique car ce type de négociation interprofessionnelle est rarissime aux Etats-Unis. Historique aussi car l’accord porte sur un sujet extrêmement sensible : l’immigration.

migration

Depuis près de 30 ans, les oppositions entre patronat et syndicats sur ce sujet étaient frontales : le patronat américain était et reste favorable à une arrivée massive de travailleurs étrangers alors que les syndicats s’y opposaient vigoureusement, craignant le dumping social.

Mais plusieurs facteurs ont contribué à changer la donne. D’une part la présence sur le sol américain de 11 à 12 millions de migrants sans papiers. Or la dernière opération de régularisation de sans papiers – qui concernait 3 millions de personnes – remonte à 1986, au temps de la présidence de Ronald Reagan. Depuis, les entrées irrégulières n’ont jamais cessé et le nombre d’illégaux a atteint 11 millions. Entre temps la xénophobie a progressé, crise économique et 11 septembre aidant.D’autre part, l’accord entre les partenaires sociaux a été conclu sous les auspices bipartisans de huit sénateurs chargés de proposer un projet de loi en mai. Ceci tient notamment au fait que les Républicains étaient forcés de tirer les leçons de leur seconde défaite présidentielle de rang. Elections qui montrent que toutes les minorités ethniques ont majoritairement voté Obama: il en va notamment des Hispaniques, 50 millions d’individus sur 314 millions d’habitants qui, en 2012, se sont mobilisés pour voter Obama et son projet d’intégration des migrants sans papiers. Enfin, cette question des minorités ethniques titille aussi les syndicats qui y voient là un potentiel de syndicalisation non négligeable dans une période où le syndicalisme nord-américain connaît, comme d’autres, un déclin continu: en 30 ans le taux de syndicalisation a été divisé par deux.

Avec cet accord du 30 mars 2013, patronat et syndicats se sont rejoints sur des critères d’obtention de visa pour travailleurs non-qualifiés, sans papiers, ainsi que sur la hausse des quotas de migrants. La plupart d’entre eux sont des personnes d’ores et déjà au travail et occupées le plus souvent dans des emplois précaires, saisonniers ou de service à domicile. L‘accord signé ouvre désormais la voie à une vaste réforme des lois sur l’immigration souhaitée par le Président. A noter toutefois que durant le mandat précédent, l’administration Obama a expulsé deux fois plus de migrants sans papiers que l’administration Bush ne le fit en huit ans. La régularisation qui s’annonce n’assouplira ni les expulsions, ni la clôture édifiée le long de la frontière avec le Mexique.

 

Note: on (re) lira avec intérêt l’interview accordée à Metis par Michaël Piore, célèbre économiste du MIT, sur les transformations du syndicalisme aux USA

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