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Comment passe t-on de la « libération du joug du travail » à l’épouvantail du peuple de droite (et quelquefois un peu du peuple de gauche). Quel historien/sociologue du travail réussira à reconstituer le si complexe itinéraire sociétal des 35 heures ? Ce texte n’a pas cette prétention, il veut juste poser quelques jalons qui pour certains relèvent de l’évidence partagée, pour d’autres de la conviction politique (évolutive avec le temps – ou l’âge ?). Voici la suite de l’article  » Le roman des 35 heures « , dont la première partie a été publiée le 29 mars.

 

35h

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA MISE EN PLACE DE LA REDUCTION APRÈS 1997

Premier temps sous la loi Aubry 1. Après la divine surprise pour la gauche de la dissolution, la France toute entière vit une deuxième divine surprise, en totale contradiction avec les prévisions des Fiances de 1996 : celle d’une vigoureuse reprise de la croissance. L’économie occidentale sort de sa longue dépression post première guerre d’Irak, le taux de croissance français, étranglé par la Banque de France, carrément négatif en 1992, remonte et compte parmi les plus élevés de l’Union européenne. Il en résulte un climat d’optimisme généralisé. Malgré sa crispation politique mise en scène par la transformation du CNPF en Medef, l’élection d’un président de combat et la véritable guérilla de l’UIMM, le patronat ressent ce climat favorable et s’en saisit pour repenser autant que faire se peut les organisations du travail. Les négociations s’engagent avec détermination dans des milliers d’entreprises et en deux ans plus de 30.000 accords sont conclus, un niveau sans précédent dans notre histoire sociale. L’objectif du ministère du travail d’impulsion du dialogue social, partagé à des degrés divers par les syndicats de salariés est largement atteint.

La plupart de ces accords sont offensifs du fait de la croissance. Les entreprises en croissance qui s’engagent dans ces négociations peuvent alors afficher un objectif d’augmentation des effectifs qui leur permet d’obtenir l’agrément du ministère du travail et de bénéficier des réductions de cotisations sociales. Mais cette augmentation des effectifs couvre en fait deux phénomènes bien différents : la compensation de la baisse du nombre d’heures travaillées, mais aussi les embauches nécessaires pour répondre à l’augmentation de leur activité. Des souvenirs de consultant ne sont pas forcément avouables mais par exemple une grande compagnie de transport en pleine croissance diminue effectivement son temps de travail de 11%, voit son activité augmenter sur les deux années de 8% et augmente ses effectifs de 5% grâce à toutes les réflexions sur la réorganisation du travail que la négociation a permis de mener avec le concours reconnu par tous les partenaires sociaux – et Dieu sait s’ils y sont difficiles à accorder – de l’ANACT. Ce cheminement se retrouve dans toutes les grandes entreprises, en particulier les nationalisées ou de culture publique ou parapublique. A la fin de 2000 6.930.000 salariés sont passés aux 35 heures dont 6.850.000 dans les entreprises de plus de 20 salariés, soit 62% de leur effectif.

L’articulation des travaux préparatoires et des stipulations de ces accords est largement partagée. Une analyse de la réalité des temps de travail et des réorganisations possibles. Le choix des modalités de la réduction. La compensation salariale. La modération salariale.


La réalité des temps de travail scrutée et réévaluée

Cette phase repose sur une analyse fine des temps de travail et de de leurs décalages éventuels avec les rythmes des marchés de l’entreprise. Jusqu’à ce moment jamais sans doute un échange aussi approfondi n’avait été mené avec un tel partage d’information. Des situations contrastées et occultes apparaissent au grand jour, aussi bien dans les débordements en longueurs excessives, notamment dans l’encadrement, qu’en temps de non-travail soigneusement occultés. Ces remontées conduisent à des convergences inattendues sur l’utilité d’en venir à une gestion plus proche de celle des marchés. Certaines industries du jouet par exemple, introduisent de très fortes modulations pour éviter la concentration des congés sur la période estivale et ainsi produire au plus près de la grande période de ventes des fêtes, reportant l’essentiel des congés annuels sur la fin de l’hiver et le printemps. Toutes sortes de questions se posent à ce moment : et si on sortait les pauses du temps de travail effectif ? Et les temps d’habillage et de déshabillage ? Et si la pause repas de midi passait de 30 à 40 minutes, sortant ainsi du temps de travail effectif ? La loi Aubry 2 tentera avec beaucoup de minutie, mais avec un succès relatif, de mettre fin à ces finasseries qui permettraient des réductions minimisées. Ces analyses débouchent naturellement sur des questions cruciales : si la durée hebdomadaire diminue réellement, comment faire pour que -par exemple- les temps de réunion restent proportionnels à la nouvelle durée pour maintenir une dose raisonnable de travail réel ? En fait le choix se fait de manière plus ou moins claire entre optimisation ou maximisation du travail dans la nouvelle durée.

Le choix des modalités de réduction
De nombreux salariés se rappellent la fâcheuse impression de 1982 quand le passage à 39 heures s’est fait de manière quasi invisible. Ils sont déterminés à trouver des modalités qui soient réellement libératrices de temps libre. Et ils sont aussi déterminés à trouver des modalités adaptées à leurs situations respectives. Le sigle RTT se répand comme une trainée de poudre et ses utilisateurs la veulent réelle, ou du moins réellement perceptible dans l’articulation entre vie au travail et vie hors travail. Cadres anticipant que leur charge de travail ne diminuera pas et ne voyant d’autre méthode que de dégager des journées entières hors du bureau. Mères de famille (les pères, bizarre, ne réfléchissent pas ainsi malgré les ambitions d’égalité des sexes du syndicat le plus porteur de cette demande) qui veulent sortir plus tôt en fonction des horaires scolaires ou de crèche. Ménages qui souhaitent libérer le samedi de la corvée harassante des courses et demandent la libération du vendredi après-midi. En définitive, les modalités les plus fréquemment retenues sont : une après-midi (mercredi ou vendredi en pratique) par semaine, une journée une semaine sur deux, des journées entières au choix combiné de la direction et du salarié.

Du côté des employeurs la demande de flexibilité est intense et de multiples formes de modulation se répandent déterminées par la demande des clients qui devront tout de même pour beaucoup d’entre eux se résigner à ne plus pouvoir joindre leurs fournisseurs le vendredi après-midi. La principale caractéristique de ces modulations est de réduire considérablement le nombre d’heures supplémentaires payables avec une majoration. Les horizons temporels peuvent être trimestriels, semestriels, annuels. Elles permettent souvent d’avoir une moindre concentration des congés annuels sur la période estivale, quitte à donner une incitation en juxtaposant journées de congés payés et journées de RTT. Des précautions sont prises pour que les salariés puissent anticiper ces modulations : communication de calendriers prévisionnels, interventions des IRP, etc.

Au total il apparaît une nette stratification des modalités par catégories de salariés. Les cadres bénéficient de journées entières de RTT, avec un assujettissement pas si fréquent que cela au forfait jours. Les employés sont davantage tenus au respect d’horaires collectifs avec un impact réel sur la durée hebdomadaire, la simultanéité de la présence dans les bureaux paraissant nécessaire. Les ouvriers de l’industrie connaissent les plus fortes contraintes avec une liberté de choix restreinte, une variation saisonnière de la durée hebdomadaire forte, pouvant aller à deux ou trois périodes de six semaines à 48 heures de présence séparées par une seule semaine d’horaires normaux, avec une forte contrainte sur les choix de congés payés annuels.

La compensation salariale
Il était évident que les 35 heures devaient être payées 39. Et de fait l’immense majorité des accords prévoient le maintien intégral du salaire antérieur. Dans certains accords défensifs de cette période, quelques-uns n’ont pas une compensation intégrale mais, dans mon souvenir, nulle part il n’y a réduction du salaire proportionnelle à celle du temps travaillé, les réductions de cotisations sociales permettant d’effacer le risque du surcoût salarial. Personne ne songe à s’inspirer, même à regret, de l’accord Volkswagen de 1993 où la réduction du temps de travail de 230% s’accompagnait d’une baisse des salaires de 10%. Simple d’application au moment de l’entrée en vigueur de la loi Aubry 1 pour les salariés en place à ce moment, l’application va se révéler de plus en plus en plus complexe avec le temps avec la multiplication des SMIC qui fit le cauchemar des services de paye jusqu’à ce que le Conseil d’Etat y mette bon ordre en rappelant le principe simple « à travail égal, salaire égal » que les fonctionnaires de la direction des relations du travail avaient fini par oublier, tout à leur jubilation de réussir à faire enfin aussi compliqué que les fonctionnaires des impôts.

La modération salariale
On touche là un des points cruciaux des évolutions de la perception collective ultérieure. Autant la compensation salariale immédiate paraît hors débat tant elle s’impose et tant elle fait partie de l’histoire nationale de la réduction du temps de travail, autant la perspective de voir les salaires continuer à évoluer sur la même tendance avec compensation intégrale de l’inflation et progrès du pouvoir d’achat (à une époque d’inflation maitrisée mais qui tangente tout de même les 2%) avec donc une véritable explosion du taux horaire réel parait au patronat une perspective inacceptable. Et les syndicats de salariés, heureux de ce cadeau miraculeux mais malgré tout quelquefois imprégné de pessimisme réaliste, acceptent d’entrer dans cette perspective. L’immense majorité des accords comportent donc des clauses de modération salariale qui vont de l’acceptation d’une hausse limitée à 1% par an pour les 3 années suivantes à un blocage des salaires (hors augmentation légale du SMIC) pendant ces 3 ans.

L’impact sur l’emploi
L’effet sur l’emploi n’est pas l’objet de ce texte. Il faut simplement rappeler que cette évaluation a donné lieu à de vives controverses. L’organisme de réflexion patronal REXECODE allait jusqu’à estimer une perte nette d’emplois pendant que les études les plus optimistes faites dans la foulée immédiate de la conclusion des accords indiquaient jusqu’à 850.000 créations nettes d’emplois. Les esprits s’étant progressivement calmés, un consensus semble s’être formé autour de 350.000 emplois supplémentaires créés par la réduction du temps de travail.

LE BASCULEMENT

Au bonheur des salariés
Jusqu’en 2002 enquêtes d’opinion et enquêtes de climat social enregistrent une satisfaction très générale devant cette réduction. Les cadres sont satisfaits, les employés sont satisfaits, les ouvriers sont presque satisfaits. Ceux qui dans des entreprises de moins de 20 salariés n’y ont pas droit se disent une fois de plus qu’ils ont mal choisi en travaillant dans une entreprise aussi petite. Même FO se dit que cet allègement du travail valait bien une pause dans la revendication salariale. De plus l’intensité, la durée, la profondeur des négociations ont amélioré le climat interne des entreprises. Au-delà des élus, des dizaines de milliers ont été impliqués dans des groupes de réflexion, ont été interrogés par des consultants, ont vu leurs managers et leurs DRH les consulter sur leurs souhaits, sur leurs charges, sur leurs suggestions. Le changement d’atmosphère était palpable et sans écrire un chapitre supplémentaire de la Légende dorée on retrouvait une ambiance de type 30 glorieuses.


La réorientation de l’environnement politico-économique

Dès 2001, cette perception se dégrade pour de multiples raisons. Le climat général s’altère. L’augmentation des prélèvements obligatoires IR, ISF pèse sur la upper middle class mais celle des cotisations sociales, CSG et CRDS frappe tout le monde. Combinée avec la stagnation salariale qui résulte des accords de modération, un début de rejet de ces prélèvements s’amorce dans les classes moyennes. Dans les réunions de cadres supérieurs des grandes entreprises de cette époque la fiscalité devient un sujet de récriminations constant alimenté par des hausses bien réelles mais aussi par des mesures symboliques sur les stocks options auxquelles aspire cette catégorie. Laurent Fabius reprend à son compte ce discours sans pouvoir réellement agir du fait du ralentissement de la croissance qui vide la « cagnotte » dénoncée par l’opposition mais en même temps il sème le doute dans l’électorat de gauche sur la constance politique du gouvernement. En 2000 la croissance est de 3,9%, en 2001 de 2%, en 2002 de 1,1%. Après un plus haut de 4.370.000 en avril 1999, le nombre des demandeurs d’emploi est au plus bas à 3.592.000 en juin 2001, mais en avril 2002 il est déjà remonté à 3.745.000. L’euphorie des premières années de gouvernement Jospin se dissipe et la France amorce sa longue descente de dépression collective qui amènera quinze ans plus tard sa population à se sentir plus malheureuse que les Afghans.


Les facteurs inhérents aux 35 heures

Les bénéfices initiaux du passage aux 35 heures se dissipent au même rythme. Trois ans de modération salariale pèsent sur les pouvoirs d’achat. Le ralentissement de l’économie inverse (dans l’autre sens) la courbe du chômage. L’intensification du travail se ressent de plus en plus maintenant que les RTT sont entrées dans les mœurs et paraissent toutes naturelles. Seuls les cadres, grâce aux modalités qu’ils ont conquises, continuent de s’en déclarer satisfaits. Malgré la concentration de la même charge de travail, voire d’une charge croissante, sur un nombre de journées réduit, ces journées hors bureaux (avant que mails et smartphones n’abolissent la cloison travail/vie privée) sont un acquis précieux auxquels ils n’entendent pas renoncer, leur vie personnelle s’en étant réellement enrichie. Ainsi dans un programme de recrutement d’une cinquantaine d’ingénieurs pour la création d’une nouvelle direction des systèmes d’information (de l’informatique à l’information ça change tout …) sur les 8 candidats rencontrés pour le poste de directeur adjoint avec un salaire prévu en 2001 de 900/950.000 F, 6 demandent quel est le régime des RTT qui leur sera applicable et 4 se désistent parce que celui-ci ne leur convient pas. Pourtant, devant les évidences économiques et organisationnelles, beaucoup vont devoir accepter un recul de ces avantages et nombre de grandes entreprises emblématiques réussissent à négocier au milieu des années 2000 le passage de 22 ou 20 jours de RTT à 16 ou 14.

Chez les employés et les ouvriers aux niveaux de vie plus spartiates, la stagnation et même la régression du pouvoir d’achat (modération salariale + baisse du nombre d’heures supplémentaires rémunérables) pèse de plus en plus lourd dans leur appréhension de cette réduction et rend plus pesante la flexibilité des horaires que leurs organisations ont acceptée. La fatigue des périodes de modulation haute, les contraintes sur les congés payés, le sentiment que tout ça ne s’est pas traduit par une baisse manifeste du chômage qui frappe leurs enfants, voilà les composantes du syndrome de désenchantement. Mais le désigner n’est pas guérir la pathologie qu’il exprime. Augmenter les salaires en mondialisation libérée ? Revenir aux 39 heures et accepter les réductions d’effectifs symétriques des embauches de 1998/2000 ? Insoluble dilemme qui génère ce sentiment d’impuissance qui se traduira dans les urnes en faveur de ceux que l’on n’a pas encore essayés.


L’inspection du travail

Comment résister ici au plaisir de rappeler la véritable guerre que l’inspection du travail a déclenché sur les contrôles des durées réellement pratiquées ? L’association Villermé impulse un mot d’ordre de contrôle accentué sur une série de grandes/très grandes entreprises considérées comme des symboles de l’infraction à la durée du travail. Symbole sans doute, mais surtout de la passion des professions intellectuelles pour leur travail, évidemment inadmissible pour ce corps qui se refuse aux statistiques de son activité. On voit ainsi des inspecteurs du travail descendre à 23 h dans des salles de marché de grandes banques où, si les traders absorbés dans leurs écrans ne détectent même pas leur présence, les DRH tremblent devant les risques pénaux. Dans un établissement de Thomson-CSF l’inspecteur du travail se poste à l’entrée des parkings en début de journée, note les heures d’arrivée des véhicules et revient en soirée noter les heures de sortie puis fait pleuvoir sur le directeur de l’unité les procès-verbaux qui le conduiront au tribunal correctionnel et à une condamnation avec amende et interdiction de gérer. Si pour ces cadres la RTT, forme d’une nouvelle liberté, installe une situation de délinquance, il ne faut pas s’étonner que les 35 heures y perdent de leur popularité.


Les 35 heures dans le désenchantement

Le climat change. Les restructurations réoccupent les journaux télévisés. L’annonce mensuelle des chiffres du chômage redevient la hantise de Matignon et de la rue de Grenelle. Le Premier ministre en est réduit à avouer son impuissance : « L’Etat ne peut pas tout ». On le savait -même si l’on ne désirait pas y croire- mais cet aveu venant d’un homme qui avait fait preuve d’un tel volontarisme prend une résonnance particulière comme renonciation de la gauche à sa foi dans sa capacité à organiser le progrès. Les 35 heures sont progressivement englobées dans ce désenchantement qui ouvre un boulevard aux contre-offensives de la droite politique aussi bien que patronale. Le MEDEF et son surprenant baron Sellière a choisi l’affrontement sans nuances. En dehors de sa pente politique naturelle, il ne pardonne pas au gouvernement le choix de ce symbole d’une réduction imposée et ne perd pas une occasion de les fustiger. Il pèse de tout son poids pour ralentir la conclusion des accords de branche, il dénonce les méfaits des 35 heures dans chaque entreprise en difficulté. Quoi de plus naturel dès lors que la droite politique reprenne à son compte cette offensive et en fasse un des thèmes centraux de sa volonté de reconquête ? « Mettre fin aux 35 heures » va ainsi devenir un mantra des campagnes du RPR.


Les 35 heures dans l’offensive politique et idéologique

Beau slogan, mais pour quelle traduction ? Les réductions de charges des lois Aubry sont pérennisées et accentuées les « abattements « Fillon, le coût pour les finances publiques des 35 heures devenant ainsi illisibles. Le recours aux heures supplémentaires est non seulement élargi mais symboliquement et réellement valorisé par leur défiscalisation à l’avantage du salarié comme de l’employeur. Le discours sur la nécessité de « restaurer la valeur travail » occupe une place déterminante chez les politiques de droite comme chez les responsables patronaux, même (surtout ?) ceux des PME restées aux 39 heures. Mais au-delà de ces discours et de ces coups de menton, de ces contre-vérités sur les durées du travail en Allemagne, quelle solution concrète est avancée ? Ose-t-on dire qu’on reviendra aux 39 heures, et pourquoi pas aux 40 ? Non, parce qu’il faudrait alors clairement prendre position sur deux points cruciaux. Ces 39 heures doivent-elles être payées 39 – auquel cas on ne voit pas le bénéfice de compétitivité – ou bien rester payées 35 -auquel cas on ne voit pas bien sur quel soutien populaire s’appuyer ? Ces 39 heures doivent permettre en bonne logique de produire 11% de plus que les 35 à effectif constant, que fait-on de cette production en face de laquelle il n’y a pas de demande : accepte-t-on d’en tirer les conséquences sur le niveau des effectifs et d’engager un vaste plan social généralisé à l’échelle du pays tout entier pour résorber ce sureffectif ou bien garde-t-on ce sureffectif dans les entreprises pour quel effet sur leur capacité concurrentielle ? La lecture de quelques ouvrages récents dont certains sont des succès de librairie n’apporte pas d’éclairage sans équivoque sur cette question. Point n’est besoin d’argumenter, il suffit de marteler et les rectifications obstinées des journalistes spécialisés dans des medias de moins en moins mass n’y peuvent rien.

Slogan qui porte certes, mais où est le projet de loi qui formaliserait le parti à prendre ? Les mois à venir vont peut-être nous apporter des éclaircissements mais rien n’est moins sûr et les salariés, entre rêves de pouvoir d’achat augmenté, impuissance devant un monde trop complexe, crainte des robots à venir finiront-ils par voter pour un non-projet ?

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Universitaire spécialisé en finances publiques (et en histoire des idées politiques), je suis appelé au ministère du Travail en 1974 pour y créer un département d’études permettant d’adapter le budget à l’explosion du chômage. Très vite oubliées les joies subtiles du droit budgétaire et du droit fiscal, ma vie professionnelle se concentre sur les multiples volets des politiques d’emploi et de soutien aux chômeurs. Etudes micro et macro économiques, enquêtes de terrain, adaptation des directions départementales du travail à leurs nouvelles tâches deviennent l’ordinaire de ma vie professionnelle. En parallèle une vie militante au sein d’un PS renaissant à la fois en section et dans les multiples groupes de travail sur les sujets sociaux. Je deviens en 1981 conseiller social de Lionel Jospin et j’entre en 1982 à l’Industrie au cabinet de Laurent Fabius puis d’Edith Cresson pour m’occuper de restructurations, en 1985 retour comme directeur-adjoint du cabinet de Michel Delebarre. 1986, les électeurs donnent un congé provisoire aux gouvernants socialistes et je change de monde : DRH dans le groupe Thomson, un des disparus de la désindustrialisation française mais aussi un de ses magnifiques survivants avec Thales, puis Pdg d’une société de conseil et de formation et enfin consultant indépendant. Entre-temps un retour à la vie administrative comme conseiller social à Matignon avec Edith Cresson. En parallèle de la vie professionnelle, depuis 1980, une activité associative centrée sur l’emploi des travailleurs handicapés qui devient ma vie quotidienne à ma retraite avec la direction effective d’une entreprise adaptée que j’ai créée en 1992.