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Cet - couleur

Alors cette sortie de crise, ça vient ? Il paraît qu’elle approche, et même qu’elle serait verte. En attendant, la crise est là : elle est à la fois un choc dont l’ampleur nous sidère, une révélation de ce qui vraiment ne peut plus durer mais aussi de ce qui tient le coup ; elle est enfin un facteur d’accélération de changements, que l’on pense à la voiture propre, à l’instauration d’autres règles financières, la lutte contre les paradis fiscaux. Bref, la crise malgré ses souffrances est utile. Et ce, bien qu’elle ne soit pas du tout perçue à l’Est comme elle l’est à l’Ouest. Vu de la Pologne, 20 après les premières élections semi libres et surtout la grande et dure transition qui a suivi, il n’y a pas vraiment crise ! Alors envisager une sortie…. Pour les anciens pays membres en tout cas, il n’y a guère de retour en arrière possible. Même le secteur financier doit envisager de nouveaux modèles.

Les nuances de vert

Plus que jamais, la question du modèle de développement est posée. Faut-il une croissance verte ? Une décroissance ? Une économie verte ? Ce n’est pas la même chose. Le vert a bien des nuances et des alternatives. Et la montée de l’écologie politique à l’échelle européenne se conjugue à un retour remarqué du nucléaire, c’est dire si combien les choix à opérer sont complexes. Il ne s’agit pas de passer « tranquillement » à un monde plus responsable, plus fun, plus écologique. Une économie verte appelle des séries de réorganisations et de restructurations; elle nécessitera un autre modèle social.  Et s’y préparer, c’est envisager dès aujourd’hui les transitions nécessaires autant que justes pour y parvenir.

Je ne peux ici que vous renvoyer au dossier du mois, notamment aux articles de Cécile Jolly, du Centre d’Analyse Stratégique et de Philippe Pochet de l’Institut Syndical Européen. L’Union Européenne va devoir modifier sa stratégie de développement. La précédente, dite stratégie de Lisbonne – qui voulait faire de l’économie européenne une économie basée sur la connaissance, la plus compétitive et la plus cohérente socialement au monde – touchera à sa fin en 2010. Ses résultats, eu égard aux ambitions et objectifs, sont déjà largement connus et souvent décevants. Pour ne rien dire de ses hypothèses énoncées il y a 10 ans et pour beaucoup aujourd’hui dépassées.

Fini le bricolage !

Il va donc nous falloir inventer autre chose et ensemble ! L’espèce de bricolage national et minimal qui se déploie depuis trop longtemps, et qui continue de plus belle avec la crise, n’est évidemment pas à la hauteur. L’Europe des Etats ne fait pas le poids face aux multiples défis ; quant à l’Europe des citoyens, elle n’est pas encore au rendez-vous. A l’OIT, Sarkozy en appelle même à une « révolution de la gouvernance mondiale » et lier demain commerce et respect des normes sociales et environnementales. Effets d’annonce ? Retournement de tendance ? Wait and see !

Il va falloir être créatif car notre bien commun se délite : la montée de la défiance, des démagos, des populos, voire des néo fachos en témoigne. Espérons que cela n’ait rien à voir avec ce qui a eu lien en 1929 et que la sortie de crise guerrière de l’époque ne se reproduise pas. Avez-vous remarqué que lorsque l’Europe n’a plus de projets, on ne parle plus que de son identité, ou de ses frontières ? Mais qu’est ce que l’identité européenne si ce n’est un Projet ? Bref, travailler à une nouvelle stratégie de développement, c’est donc retravailler le projet européen.

Et qui dit projet, dit projet social, of course ! Or, si nous envisageons notre développement en « vert », le logiciel actuel du social risque un gros bug ! Son rapport avec la nature, la rareté, avec les transformations productives et salariales ou encore avec le monde dans sa globalité est dépassé. En témoignent d’ailleurs les combats d’arrière-garde de certains, à la gauche de la politique par exemple, mais aussi parfois dans le syndicalisme. En d’autres termes il faut reconstruire une « raison sociale » et celle-ci est indissociable d’un projet européen reconstruit. C’était il y a peu un vœu pieu, c’est aujourd’hui indispensable autant qu’inévitable. La situation présente peut à juste titre désoler bien du monde mais elle a la vertu d’une mise à l’épreuve généralisée. Le genre de Metis ce n’est ni la complainte ni la nostalgie, ni la croyance naïve en un nouvel eldorado vert. La crise nous oblige tous. Il va falloir créer, bâtir, reconstruire, en usant au mieux de ces énergies nouvelles ou qui ne demandent qu’à se réveiller !

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