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Pendant ces vacances, trêve de questions directement relatives au travail, attardons-nous sur cette Europe en devenir qui, dans son fonctionnement actuel comme dans les opinions de ses concitoyens, traverse une passe délicate.
Que donne à voir l’Europe ? La Belgique a pris la présidence décidément tournante de l’Union. A l’occasion, « la Belgique a dansé pour l’Europe » rapporte le site officiel de la présidence, tiens ! Plus sérieusement, sans doute…, Yves Leterme, premier ministre sortant a déclaré que la Belgique « limiterait son rôle pour donner de l’espace à Herman Van Rompuy et à Catherine Ashton ». Bruxelles, capitale du surréel dit la chanson.

 

Les contours du service européen d’action extérieure (SEAE) sont enfin définis. Les Etats membres l’on emporté sur le parlement européen et la Commission, le SEAE reste sous leur contrôle. Il s’agit de 8000 fonctionnaires qui, sous un statut spécifique, serviront « la politique commune issue du consensus des Etats ». Le chômage ne guette pas les diplomaties françaises, allemandes, britanniques et autres.

 

L’Union serait-elle soluble dans le marché ?

Après le traité de Lisbonne et deux années de crise, l’Europe est toujours la première économie de la planète, mais l’Union serait-elle soluble dans le marché ? Elle n’arrive pas à s’accorder, n’ose franchir le pas d’une union plus solide ou plutôt d’une coopération accrue dit-on pour ne pas effrayer les foules, et l’Europe ne pèse plus sur les grands dossiers du moment. Paradoxal, alors que l’Histoire récente lui donnait raison de critiquer le modèle libéral anglo-saxon et l’unilatéralisme des années Bush, raison aussi de croire au bien fondé d’un modèle somme toute social-démocrate et en pointe dans le combat contre le changement climatique. La gouvernance économique de l’Union s’est heurtée le 18 juin aux intérêts nationaux de court terme, « spécificités nationales » disent les politiques, et au repli frileux des opinions publiques. Quant aux propositions européennes de taxes sur les établissements financiers faites au G 20 à Toronto, on a vu le sort que leur ont fait USA, Canada ou Japon.

 

Une Europe en proie à une vacance de perspectives, de leadership, de solidarité, de crédibilité.
Le projet européen repose ou plutôt reposait sur la croyance partagée d’un avenir meilleur parce que commun. Les citoyens doutent, en attestent les référendums sur le traité constitutionnel ou les taux d’abstention aux élections du parlement européen. Quant aux élites, elles semblent ne plus y croire. L’Europe n’est pas rejetée mais elle n’enchante plus et surtout ne donne plus de sens. En son sein, elle fonctionne par compromis essentiellement techniques ou par compromis politiques souvent opaques, et dans le grand jeu de la globalisation, elle est un « soft power » face à de « hard powers ». N’est-il pas urgent de repenser l’Europe dans le nouvel Etat du monde, de retrouver ses valeurs fondamentales et les clés toujours présentes de son succès ?

 

L’agenda social est vide
L’Europe porte aussi un certain modèle social, ce rempart envié contre la crise, que devient-il ? Il se fane et sa rénovation n’est pas à l’ordre du jour. L’agenda social européen est vide, ni les Etats membres, ni les syndicats ne l’alimentent. Le social européen fait peur, bureaucratisation, restrictions. Où sont les innovations, les améliorations, les véritables adaptations aux nouveaux défis et aux générations montantes ? Le manifeste de RDS et de l’OSI « le social en Europe, facteur stratégique pour sortir de la crise » met en avant un atout essentiel, la qualité de la main d’oeuvre.

 

Vaira Vike Freiberga, Sage du groupe de réflexion sur l’avenir de l’Europe, sonne l’alerte à l’occasion d’une audition citoyenne organisée par EuropaNova. L’Europe est un nain politique dit-elle et pourrait devenir un nain économique, une Europe apathique, sans projets partagés, alors qu’elle détient les atouts et les solutions de son avenir, propositions à la clé qui mériteraient débat.

Quant aux opinions européennes, elles sont inquiètes de l’avenir. Au cœur de leurs préoccupations, le chômage, le pouvoir d’achat, la retraite et la santé. Les Européens vieillissent vite et l’anticipent. Leur âge médian sera de 52 ans en 2050. Les Américains n’auront eux que 35,4 ans. Cette déformation de la pyramide des âges contribue pour beaucoup au pessimisme des Allemands qui détiennent la palme en matière d’inquiétudes et qui explique pour partie la rigueur qu’ils prônent.

Ceci étant, le grand ménage des dépenses publiques a commencé, il n’était plus possible de jouer la montre et pour certains, c’est rude et non sans risque. La Grande Bretagne semble ouvrir une nouvelle ère Thatcher nous rapporte Steve Jefferys.

 

On vient de commémorer les quinze ans de Srebrenica et la Croatie devrait adhérer à l’Union en 2012. L’Europe de la paix a tout son sens à l’est du continent. « L’important, ce n’est ni d’être pessimiste, ni d’être optimiste, c’est d’être déterminé » disait Jean Monnet. L’Europe a toujours su trouver les voies pour rebondir, elle attire toujours autant les candidats à ses frontières, gageons qu’elle trouvera la détermination nécessaire.

 

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