par Planet Labor
Depuis que le tribunal administratif de Berlin a déclaré « illégal », le 7 mars, le nouveau salaire minimum entré en vigueur au 1er janvier 2008 dans les services postaux, la controverse à ce sujet a redoublé d’intensité.
Lors d’un débat au Bundestag, le 12 mars, l’aile droite du parti conservateur et le FDP ont appelé le ministre SPD de l’Emploi à remanier la loi. Les concurrents privés de la Deutsche Post menacent, quant à eux, de réclamer des millions d’euros de dommages et intérêts.
Saisi par les concurrents privés de la Deutsche Post, TNT et PIN, et par l’organisation patronale BdKEP, le tribunal administratif de Berlin a estimé que le salaire minimum, négocié par le syndicat des services Ver.di et une organisation patronale dominée par la Deutsche Post, qui a été étendu à toute la branche par le ministre fédéral de l’Emploi par le biais d’un décret, était « illégal ». Car selon les juges, ce salaire, compris entre 8 et 9,8 euros bruts de l’heure, ne peut s’appliquer qu’aux entreprises dépourvues de toute convention collective. Or les concurrents privés de la poste ont conclu, en décembre 2007, avec le jeune syndicat des nouvelles entreprises du secteur postal GNBZ (créé pour l’occasion) leur propre salaire minimum s’élevant à 7,5 euros l’heure à l’ouest et à 6,5 euros en ex-RDA. Selon le tribunal, le ministre de l’Emploi a ainsi « outrepassé ses compétences » en rendant obligatoire un salaire minimum qui rend caduc un autre accord salarial.
Trouble dans la grande coalitions. Cet arrêt a aussitôt relancé la polémique qui avait déchiré la grande coalition avant l’entrée en vigueur du salaire minimum dans le secteur postal. Il s’agit « d’une victoire pour la concurrence », s’est félicité Michael Glos (CSU), ministre fédéral de l’Économie. Lors d’un débat houleux au Bundestag, le 12 mars, l’aile droite du parti conservateur (CDU/CSU) et le parti libéral ont appelé Olaf Scholz, ministre SPD de l’Emploi, à revoir sa loi qui « cimente le monopole de la Deutsche Post » et à renoncer à ses plans visant à introduire dans chaque branche un salaire minimum. Prenant la défense d’Olaf Scholz, Franz Thönnes, secrétaire d’État SPD, a repris la position du ministre : 1° L’arrêt n’est pas encore en définitif, car le ministre a fait appel. 2° Cet arrêt est erroné et contredit des arrêts antérieurs prononcés par le Tribunal fédéral du Travail et par le Tribunal administratif fédéral. 3° Le gouvernement continuera son travail visant à introduire un salaire minimum dans chaque branche conformément à une décision de la grande coalition prise à l’été 2007.
Une remise en cause d’une généralisation du salaire minimum. Mais l’arrêt de Berlin le met dans une situation difficile. Les avocats de l’organisation patronale BdKEP ont déjà envoyé une lettre au ministre, lui demandant d’annuler son décret et menacé, le cas échéant, de réclamer des millions de dommages et intérêts. Depuis l’entrée en vigueur du salaire minimum « dicté » par la poste allemande, environ 2700 emplois ont été supprimés chez PIN AG et le groupe a été placé en situation de redressement judiciaire. D’autre part, l’arrêt devrait avoir un impact immédiat sur la controverse au sein de la grande coalition portant sur la mise en place d’un salaire minimum légal dans le secteur de l’intérim. Le parti conservateur juge un tel salaire « inutile », car près de 100% des salariés intérimaires sont déjà couverts par des accords de branche. L’arrêt devrait lui fournir de nouveaux arguments.
Une risposte de Ver.di. Qualifiant l’arrêt de « totalement incompréhensible », le syndicat ver.di a décidé, pour sa part, de contre-attaquer. Le 11 mars, il a déposé une plainte pour « corruption » contre le jeune syndicat GNBZ, estimant qu’il s’agissait d’un « pseudo-syndicat », créé par les concurrents privés de la poste pour tenter de bloquer la mise en place du salaire minimum légal.
Planet Labor, 13 mars 2008, n° 080205 – www.planetlabor.com
Laisser un commentaire