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Triomphe article

2016 ne se termine pas aussi tristement que 2015. En Europe à tout le moins. C’est déjà ça. Pour autant, cette année nous laisse un goût amer, mélangeant déceptions, occasions manquées, lassitude et incompréhensions vis-à-vis d’un monde aux prises avec des forces peu éclairées, pour ne pas dire obscures. Alors, que nous souhaiter de beau pour 2017 ? Santé et bonheur sûrement ; amour, gloire et beauté, si vous préférez ! Mais il est d’autres formules, d’autres vœux, plus inhabituels, auxquels nous pourrions penser.

 

Le premier, qui aurait été incongru dans nos pays jusqu’en 2014, c’est la sécurité. Depuis Charlie nos corps, nos cœurs et nos têtes ont été blessés, bouleversés, déstabilisés. Et le restent : le 13 novembre, Nice, Berlin c’était hier. Aujourd’hui et très vraisemblablement demain, nous avons plus que partie liée avec Alep, Mossoul ou Istanbul, pour ne rien dire de Tripoli, du Caire ou de Tunis. La tempête souffle sur la Méditerranée et les vents ne sont pas prêts de se calmer. A l’Est, moins de sang, mais on peut faire confiance au camarade Vladimir pour entretenir conflits larvés, frontières instables et autres provocations. Et ce ne sont pas les nouvelles de l’Ouest qui peuvent nous rassurer : ce que semble vouloir concocter l’homme de Washington semble dangereusement éloigné de la raison et du bien commun. Le modèle de sécurité collective né de la Seconde Guerre mondiale est un peu à l’image de notre modèle social : essoufflé, fragilisé, sous-financé. Et à cette insécurité physique s’en ajoutent d’autres : celle de l’emploi, inversion ou pas de la courbe du chômage ou celle encore d’un mode de vie menacé par des influences extérieures, que certains à l’instar de Laurent Bouvet nomment l’insécurité culturelle, perçue – et exploitée – de manière grandissante dans tout le continent. Vivre en sécurité en 2017 n’aura sans doute rien d’une formule creuse.

Le second a trait à la fraternité, à la préservation de ce qui nous fait hommes. Le difficile apprentissage de la différence marque aujourd’hui clairement le pas. Et ses liens avec les multiples facettes de l’insécurité sont légions. Les phobies collectives de toutes sortes instillent un climat de défiance, de rejet, de repli. Face à elles, appeler au vivre ensemble est plus que jamais nécessaire, mais ne suffit plus. Le véritable défi réside dans un nouvel équilibre en individus, collectifs et communautés. Et ce à l’échelle locale, nationale, européenne ou planétaire. Les années 70 célébraient le droit aux différences, trop souvent niées ou brimées par un système collectif et normatif excluant. C’est un peu le chemin inverse qu’il nous faut emprunter aujourd’hui : celui de la reconstruction de communs de proximité, mais aussi de communs globaux. Il serait ridicule et dangereux de vouloir effacer les frontières, de ne pas fixer de limites. Les maisons sont pour partie faites de murs. Mais que seraient-elles sans fenêtres et portes ? Sans chemins et points pour y accéder ou en sortir ? Pour ne pas devenir l’instrument de sa propre destruction, l’humanité doit urgemment penser de nouvelles mixités, de nouvelles règles, de nouveaux liens. Il ne s’agit pas que de bons sentiments ou de valeurs. Mais de nouveaux modèles politiques, économiques ou éducatifs qui poursuivent, maintiennent, rénovent le bien commun.

Le troisième nous renvoie à l’engagement. Dans toutes ses dimensions. Du travail à l’engagement politique, en passant par celui qui, et c’est ici un grand motif d’espoir, pourrait être qualifié d’engagement sociétal ou civil. La colère contre les élites n’est pas infondée tant celles-ci ont pu trahir. Elle peut même avoir un effet cathartique bénéfique. Mais cette colère ne peut tenir lieu d’alternative. Et ce qui se produit là où elle est passée ne présage rien de bon : je pense à Trump (encore !), mais aussi à d’autres, proches, très proches. Les causes aussi nobles que concrètes – du climat aux réfugiés en passant par le soutien scolaire, la culture pour tous et bien d’autres – ont besoin de nous tous. Et contrairement aux idées reçues sur leur individualisme, ce sont les moins de 30 ans qui donnent aujourd’hui l’exemple. La génération des quinquas, des post soixante-huitards a perdu bien de ses illusions et semble pour partie se réfugier dans le désenchantement. Mais a-t-elle définitivement renoncé à changer le monde ? Espérons que non. C’est en tout cas le vœu que je forme.

Que 2017 nous redonne des couleurs, du bonheur d’être ensemble, du goût à des aventures formidables et toutes sortes de belles surprises !

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Haut Commissariat à l'engagement civique