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Bonne nouvelle : il semble que l’on sorte du déni dans lequel nous nous étions installés depuis 2008. Après avoir été considérée de bien haut – y compris par Mme Lagarde, du moins avant qu’elle ne rejoigne le FMI – l’exposition aux risques financiers majeurs de nombreuses banques européennes, notamment allemandes, françaises ou belges, est reconnue. On nous dit désormais que le temps presse. Mais saurons-nous tirer les leçons de ces trois dernières années ? Alors que 2008 présentait déjà tous les symptômes d’une crise systémique, décideurs économiques et politiques, passé un court instant de lucidité, ont réduit la question à celle de la finance (sans pour autant la maîtriser, CQFD)

 

Moyennant quelques réformes, nous allions pouvoir sortir du tunnel… Aujourd’hui, force est de constater que la restructuration du secteur bancaire, de ses actifs comme de ses pratiques, a été bien pâle : des règles prudentielles renforcées mais aussi des « stress tests » bidons pour ne pas parler des incantations sur les bonus, voilà en gros ce que nous avons réussi à faire. La radicalité de la critique envers les institutions financières n’est que le miroir de la mièvrerie des réformes engagées.

 

Or dans des sociétés dont l’horizon prévisible a désormais pour nom austérité, la question des choix et des contreparties à la mise à disposition de fonds publics colossaux est autant légitime, que nécessaire. Ce n’est pas tant le débat sur les nationalisations qu’il faut aborder – celles-ci ne conduisent pas automatiquement à de bonnes décisions ou à une bonne gestion, comme le passé l’a amplement démontré – que celui sur l’organisation du secteur, sur ses pratiques, sur le financement de l’économie réelle et, mieux encore, soutenable. Bref recapitaliser mais pour quoi faire ? Comment orienter le crédit en fonction des priorités stratégiques et des transitions nécessaires, qu’elles soient économiques, écologiques ou démographiques? Comment doter les PME des moyens de croître vers un mieux disant économique mais aussi social ? Quid enfin de la contribution des gains financiers à nos sociétés et à leur développement ?

 

Recréditer le politique

Mais sortons du domaine bancaire et songeons à toutes ces organisations et institutions qui ont perdu depuis belle lurette leur triple A et qui souffrent d’un déficit de capital politique, social, humain ou éthique. À leur manière, elles ont autant besoin d’être recapitalisées ou recréditées que les banques. Les discours tenus sur la dette, la crise, la mondialisation ou les agences de notation tiennent parfois d’un populisme honteux qui fait fi des réalités, des enjeux, des marges de manœuvre et de créativité. Or la crédibilité et la vitalité politique, syndicale, sociale ou culturelle de nos pays ne sont pas moins importantes que la vitalité financière. Et l’accumulation des crises n’en fait que pointer la nécessité. Les événements récents nous obligent à ne plus nous contenter de demi mesures ! Cela a commencé avec la zone euro et la construction communautaire: sans un certain type de fédéralisme, l’Union Européenne ne survivra pas. Cela pourrait continuer par nous obliger à revisiter nos mécanismes politiques, démocratiques et sociaux.

 

Notre rebond collectif est à ce prix. La croissance est affaire de budget, elle est aussi affaire d’envies, de créations et de visions partagées. Certains sursauts observés en Europe ou dans le monde – des indignés espagnols aux écolos allemands en passant par l’Italie, les occupants de Wall Street d’autres encore – nous montrent qu’il peut y avoir un regain d’intérêt pour les affaires de la Cité qui ne rime ni avec déni ni avec repli. Il en va de même pour les primaires, jusque là réussies, de la gauche française. Mais il serait désastreux que l’on n’y voie qu’une simple affaire de désignation d’un(e) candidat(e). Le déficit de crédit constitue un enjeu de société qui nous interpelle tous, à la mesure de nos désirs et de nos capacités. Certains lieux méritent d’être renfloués, d’autres de sombrer, il reste à en créer de nouveaux.

 

Parlons donc reconstruction et avenir. Quatre principes ont particulièrement souffert avec la crise : le principe de justice, le principe du vivre ensemble, le principe de progrès et, last but not least, la notion d’éthique. L’indignation qui court le monde n’est pas venue de rien ! C’est à leur reconstruction, à leur réinvention qu’il nous faut nous atteler dans l’entreprise comme dans la société, si l’on veut éviter les rafistolages qui brideraient les élans sans lesquels on voit mal notre continent rebondir.

 

 

PS : il ne nous a pas échappé que le concept de « démondialisation » connaissait, en France, un vrai succès. Nous y reviendrons en temps utile !

 

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