Chronique européenne
L'Europe est à la une de nos agendas politiques, culturels et sociaux. Et pas seulement pour cause d'élections européennes en mai. Parce qu'il s'y passe des choses. Et pas que des choses négatives.
L'Europe est à la une de nos agendas politiques, culturels et sociaux. Et pas seulement pour cause d'élections européennes en mai. Parce qu'il s'y passe des choses. Et pas que des choses négatives.
Ce n'est pas la première fois qu'au Comité de rédaction de Metis Europe nous avons discuté Europe, ni la dernière... Mais ce jour de début mars 2019, le choix fut fait d'en faire un papier. En fait, le premier épisode d'un dossier évidemment consacré au sujet. Ont participé à la discussion rue Saint-Nicolas ou en ligne : Claude-Emmanuel Triomphe qui avait créé l'Université européenne du travail en 1997 ; Jean-Marie Bergère qui adore le cinéma européen (et même au-delà), Martin Richer, grand lecteur des Rapports d'Eurofound en anglais ; Jean-Raymond Masson, longtemps responsable à la Fondation de Turin (Fondation européenne de formation) ; Jean-Louis Dayan, aussi attentif à l'économique qu'au social ; Michel Weill, lyonnais et grand voyageur en Europe et ailleurs, Eva Quéméré et Danielle Kaisergruber.
La thématique des deux Frances (des deux Amériques, des deux Angleterres, etc.) devient omniprésente. La coupure ne serait plus seulement entre les riches et les pauvres, mais entre les gagnants et les perdants de la mondialisation, les branchés et les débranchés, les élites et les oubliés. La géographie semble s'imposer comme une dimension centrale de cette coupure. Qu'en est-il vraiment : les fractures sont-elles surtout territoriales ? Pierre Veltz, qui a publié de nombreux livres et articles sur les formes et les facteurs du développement technologique, économique et social, argumente :
Puisque décidément l'époque est au triomphe du conservatisme sous toutes ses formes, il n'est pas inutile de les connaître mieux. Partant du constat de l'absence d'intérêt, des universitaires et chercheurs pour les mouvements de droite, Clarisse Berthezène et Jean-Christian Vinel (tous deux professeurs au Département d'Etudes anglophones de l'Université Paris Diderot) ont rassemblé dans un ouvrage des articles croisés sur les USA, le Royaume-Uni et la France. Un détour par l'histoire instructif
La réputée et austère revue HBR (Harvard Business Review), qui d'habitude ne se mêle pas de politique, a publié dans son édition de novembre 2016, quelques semaines avant l'élection de Donald Trump, un article dont on pourrait traduire le titre par : « Que faire pour calmer la colère des gens à propos de la mondialisation ? ». Dans cet article, Pankaj Ghemawat, professeur de stratégie et de management à la Stern School of Business (New York University) et à l'IESE Business School (Barcelone) propose des pistes concrètes dont nous ferions bien de nous inspirer.
Qui se propose de passer de 500 000 à 700 000 apprentis au bout d'un quinquennat ? Qui veut assurer une « formation de qualité sur les savoirs de base » afin de lutter contre l'illettrisme ? Le Front National français qui vient de franchir une nouvelle et inquiétante étape dans son enracinement électoral. Qui veut développer l'apprentissage comme alternative à l'enseignement supérieur et travailler à la qualification des tuteurs ? L'UKIP britannique, qui se propose aussi de réduire l'échec scolaire de 50% ! Ce ne sont bien sûr que des extraits mais les programmes socio-économiques de ces partis recèlent des dispositions qui les rendent audibles voire crédibles, tant sur certains points ils empruntent à leurs adversaires ! Comment réagir alors que les élections récentes ou à venir dans de nombreux pays européens ont fait ou devraient faire la part belle à la droite de la droite ?
Le danger populiste, mêlant les extrêmes de droite et de gauche, et qui gagnerait du terrain un peu partout en Europe, est fréquemment brandi par les commentateurs, analystes et autres acteurs de la vie publique comme une menace mortifère pour nos démocraties comme pour le projet européen. De quoi s'agit-il au juste ?
« Quelques différentes puissent être nos opinions, il est un fait sur lequel, d'un bout à l'autre de la terre, nous sommes tous d'accord aujourd'hui, c'est que notre monde se trouve dans un état anormal, qu'il traverse une grave crise morale. En particulier, quand on regarde l'Europe, on a le sentiment que tous les peuples et les nations qui la composent se trouvent dans un état de nervosité maladif. Le plus petit motif suffit pour provoquer une émotion intense (...). Personne ne croit à un développement calme et productif ». Ces mots du grand écrivain autrichien Stefan Zweig résonnent aujourd'hui de manière singulière. Et ce, bien au-delà des pensées et commentaires qui affluent depuis que la démocratie française a fait place au Front National.
Hier - disons depuis 3-4 ans - l'heure était à l'indignation. Stéphane Hessel faisait un tabac avec son petit opuscule et des vagues d'indignés secouaient des pans entiers de la planète : de la Tunisie au Chili, de l'Iran à l'Ukraine en passant par l'Espagne ou l'Italie, des mouvements massifs s'élevaient contre la corruption, la privatisation de la chose publique, la restriction des droits et libertés.... Cette vague n'est pas éteinte et a encore mille occasions de se manifester ici et là. Mais les « afters » ont un goût assez amer. Les raisons en sont bien entendu très diverses. Pourtant un facteur commun me semble émerger pour expliquer ces revirements et autres désillusions. Il tient à la question et à la place du politique dans nos sociétés. Plusieurs facteurs ou vecteurs ont joué ici un rôle éminent.
La victoire de François Hollande aux élections présidentielles françaises est un événement qui dépasse l'hexagone. Il devrait influer sur la manière dont l'Europe s'est projetée et construite ces dernières années. Et en la matière le nouveau président aura fort à faire ! Mais cette victoire n'efface pas ce qui a été le fait marquant de ce scrutin: la montée du populisme qui s'est exprimée en France mais aussi chez chez tant de nos voisins. Belgique, Suisse, Italie, Royaume Uni, Pays Bas, Danemark, Finlande, Suède, Hongrie, Bulgarie, Grèce: la liste n'a cessé de s'allonger depuis des années et nous incite à réfléchir sur ce fameux vote protestataire que d'aucuns jaugent avec une condescendance souvent déplacée. Pour Metis, et en dépit de facteurs nationaux parfois très spécifiques, il y a plus d'un lien entre ces votes et une crise profonde du travail